J'ai dit que le modèle social français était écorné, je n'ai pas dit qu'il était laminé. MM. Michel Albert et Jean Boissonnat ont indiqué, il y a longtemps déjà, que l'Union européenne, telle qu'elle a été conçue, est fondée sur la concurrence, y compris celle des modèles sociaux. Mais nous sommes parvenus à un tournant. Au cours des dernières années, l'Allemagne est, de tous les pays européens, celui qui a le plus fortement remis en cause son modèle social ; comme l'a signalé l'OCDE, c'est dans ce pays que la pauvreté a le plus augmenté. L'hypothèse selon laquelle l'Allemagne va poursuivre dans la voie actuelle est fausse : elle va être amenée à revoir ses équilibres. Aussi, vouloir remettre en question notre modèle social, prétendument trop généreux, pour imiter les Allemands, risque de nous entraîner dans une spirale fautive. Mme Angela Merkel n'a-t-elle pas indiqué récemment que les salaires allemands devraient recommencer d'augmenter ? Maintenant qu'elle a retrouvé la position perdue après la réunification, l'Allemagne est, pour des raisons démographiques et de politique intérieure, à la veille d'une inflexion. L'imiter en abaissant le coût du travail pour réduire les problèmes structurels de l'industrie française, c'est faire fausse route.