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Intervention de Antoine Flahault

Réunion du 27 avril 2010 à 16h00
Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe a

Antoine Flahault, directeur de l'école des hautes études en santé publique :

La question de savoir comment stopper une épidémie est particulièrement intéressante, et il est pour le moins étonnant que nous ne puissions pas y apporter de réponse autre que théorique. La modélisation mathématique montre en effet que l'immunisation de 30 % de la population peut constituer une mesure barrière. Mais alors que les vaccins pour la grippe saisonnière existent depuis des années, on n'a jamais demandé aux firmes pharmaceutiques qui commercialisent ces produits, ni à l'État ou aux caisses d'assurance maladie, qui les remboursent, de tenter d'apporter la confirmation expérimentale de cette hypothèse, par exemple en appliquant une mesure barrière dans quelques régions de France. Grâce au réseau Sentinelles, qui permet de mesurer chaque année un pic épidémique, on pourrait voir si cette épidémiologie théorique se confirme dans la réalité. Or, à ma connaissance, elle n'a jamais été appliquée ni en France ni dans le monde. Seule exception, en vaccinant les enfants au Japon pendant des années, on a pu montrer une diminution de la mortalité chez les personnes âgées. Mais ces données sont relativement pauvres, et en outre elles ont plus de trente ans.

Quoi qu'il en soit, aucun modèle mathématique n'évoque la nécessité de vacciner la totalité de la population – du moins s'agissant de la grippe : je ne dirais pas cela pour la rougeole.

Pour répondre à votre deuxième question, il est exact que l'équipe de Xavier de Lamballerie, en collaboration avec l'École des hautes études en santé publique (EHSP), a démontré qu'il existait un grand nombre de cas asymptomatiques, peut-être trois à quatre, pour chaque cas symptomatique. C'est souvent le cas avec la grippe, et ça l'est particulièrement pour ce virus, ce qui explique la difficulté à estimer correctement la proportion de la population qui a été atteinte. On ne peut pas simplement se fier à une veille sanitaire basée sur la notification de cas : on est obligé d'effectuer des enquêtes de séroprévalence, dans la mesure du possible en temps réel, pour permettre le pilotage de la pandémie. Or, à ma connaissance, aucun pays au monde n'a mis au point un plan de ce type.

C'est l'EMEA, l'Agence européenne du médicament, au vu des « prédossiers » présentés par les laboratoires, qui a pris la décision de délivrer une autorisation de mise sur le marché prévoyant deux injections de vaccin. Les industriels ayant déjà déposé des dossiers pour le vaccin contre le virus H5N1, les dossiers relatifs au vaccin contre la souche H1N1 ont en effet été préenregistrés afin d'éviter que des problèmes de type administratif ne conduisent à ralentir le processus d'autorisation. Mais ces dossiers ont été conçus à partir d'une souche de la grippe différente de la souche H1N1 pandémique.

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