Je souhaite au préalable signaler que je n'ai aucun conflit d'intérêt direct, mais un conflit indirect : un membre de ma famille est salarié du LEEM – Les Entreprises du médicament –, qui représente les entreprises du secteur de l'industrie pharmaceutique en France.
L'alerte concernant la pandémie grippale a été donnée en avril 2009 depuis le Mexique. Les États-Unis et le Canada ayant très rapidement pu identifier et isoler le virus, la première question qui s'est posée a été celle de sa contagiosité. Avait-on affaire à un virus de la grippe se comportant de façon inhabituelle ? Alors que pour le SRAS, en 2003, les premiers articles scientifiques étaient parus après la fin de l'épidémie, dans le cas de la pandémie de grippe A(H1N1), les premières séries d'articles ont été publiées depuis le Mexique dans le mois qui a suivi l'alerte donnée par l'Organisation mondiale de la santé. Ils nous ont rapidement permis de calculer ce que l'on appelle le taux de reproduction de base, mesure épidémiologique du nombre de cas secondaires générés par un cas index. L'ajustement de la courbe exponentielle sur la première série venant du Mexique a montré que ce taux de reproduction était de 1,4, avec un temps de génération de trois jours entre deux cas. C'était le signe d'un virus de la grippe au comportement normal. Ainsi, dès le début du mois de mai, on était capable d'affirmer que cette maladie avait un potentiel pandémique et que son comportement était classique.
En effet, le taux de reproduction signe la souche virale. Par exemple, la rougeole a un taux de reproduction de 20, le plus élevé. Si un enfant atteint de cette maladie est mis en contact avec une classe de maternelle ou une crèche dans laquelle aucun enfant n'est vacciné – ce qui ne serait plus possible aujourd'hui –, il pourra provoquer à lui seul vingt cas secondaires. Pour la grippe, ce taux de reproduction était donc de 1,4. Cela peut sembler faible, mais c'est suffisant pour que le virus fasse assez rapidement le tour de la planète.