En effet, une fois que nous sommes convenus que les systèmes de formation doivent inciter les étudiants à se tourner vers la médecine générale afin de repeupler en généralistes les territoires sous-denses, il ne s'agit plus tant de régionaliser le numerus clausus que de faire en sorte que des étudiants en nombre suffisant postulent aux postes offerts.
Si, chaque année, les postes offerts en médecine générale sont plus nombreux que les étudiants susceptibles d'y postuler, vous ne contribuerez en rien à l'installation de médecins généralistes, a fortiori dans des zones sous-denses. Les généralistes qui sortiront des universités seront moins nombreux et moins nombreux encore ceux qui s'installeront dans les zones sous-denses.
Les chiffres sont, à cet égard, très éloquents. Si je prends, sur deux années, l'exemple de la région Centre – les statistiques portent sur cinq années –, nous observons que sur les 160 postes de médecine générale proposés en 2007 à l'examen national classant, seulement 59 ont trouvé preneur, soit un peu plus du tiers, et qu'en 2008, sur les 125 postes proposés, seulement 46 ont été pourvus. Sur les cinq dernières années, pour toute la France, seuls 3 600 postes ont été pourvus sur les 12 000 proposés.
Cet amendement vise donc à priver les étudiants des moyens d'échapper à la médecine générale. Certains peuvent évidemment aller à l'étranger, certaines interrompre leurs études en raison d'une grossesse : pourquoi, dans ces conditions, ne pas rédiger un sous-amendement visant à prévoir une marge de 5 % à 10 % ? Celle-ci serait suffisante car, par leur nombre, les cas que vous avez évoqués, monsieur le rapporteur, ne sont pas dans un rapport de un à trois. L'ordre de grandeur n'est pas le même. Il n'est pas vrai que sur une promotion de 160 étudiants, 100 voyagent à l'étranger ou attendent un enfant. Il faut savoir raison garder !
C'est une question très concrète : si nous voulons que les dispositifs auxquels nous réfléchissons actuellement soient efficaces, il ne suffit pas de tenir de grands discours sur la nécessité d'orienter les étudiants vers la médecine générale ou d'augmenter le numerus clausus. Si les étudiants trouvent, dans le même temps, les moyens d'échapper à la perspective de devenir médecin généraliste, aucune des mesures que nous étudions actuellement n'aura de chance d'aboutir, qu'on soit favorable, comme vous, à des mesures strictement incitatives et d'aménagement des stages ou, comme nous, à une régulation plus volontariste.
L'évolution du numerus clausus risque même d'aggraver les difficultés dans certaines régions. Si je prends de nouveau l'exemple de la région Centre, l'augmentation, pourtant nécessaire, du numerus clausus ne changera rien au fait que les postes proposés ne sont pas pourvus. Notre amendement n'a donc aucun caractère idéologique : il est, je le répète, très concret.