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Intervention de Françoise Branget

Réunion du 4 mai 2011 à 16h15
Mission d'information assemblée nationale-sénat sur les toxicomanies

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Branget, corapporteure pour l'Assemblée nationale :

- Dans la communauté juive, comment traitez-vous le cas des personnes addicts à un certain nombre de substances ?

Grand Rabbin Haim Korsia - La vocation de l' Association juive des intervenants contre les toxicomanies et du Service d'action juive pour l'éducation à la santé, avec l'Œuvre de secours à l'enfance, l'Œuvre de protection des enfants juifs et le Comité d'action sociale israélite de Paris, qui sont les trois grandes associations sociales juives, est d'aller dans les écoles pour dispenser l'information à l'éducation pour la santé. Il est difficile, dans les écoles à caractère propre, selon la terminologie officielle -autrement dit les écoles religieuses, quelles qu'elles soient- de parler de toxicomanie. La première réaction de ces écoles est de dire que ce phénomène n'existe pas dans leur établissement.

Nous avons dû jouer de tous les relais possibles pour convaincre les directeurs d'école que le risque existe. On a l'avantage de justifier ce que l'on fait à la fois par des raisons d'hygiène, de santé publique mais aussi par des raisons plus religieuses.

Un exemple simple n'a rien à voir avec les drogues mais qui est très important : Philippe Costes, à l'époque directeur de la DDASS de Paris, m'appelle un jour en me disant que l'on déplore une épidémie de gastro-entérite très importante due à un germe très particulier que l'on trouve en Israël et qui se transmet par mauvais lavage des mains que les enfants en vacances en Israël avaient ramené avec eux. Le Grand Rabbin de France et les responsables du Casip Cojasor et du Fonds social juif unifié, une association qui s'occupe des écoles juives, ont rédigé une lettre pour rappeler les exigences sanitaires mais aussi religieuses, la religion imposant de se laver et de s'essuyer les mains avant de manger et à chaque fois que l'on va aux toilettes. Ce simple geste a suffi à enrayer l'épidémie !

Le recours aux drogues traduit selon moi un mal-être, une recherche de quelque chose que l'on n'a pas. En hébreu biblique, cela se traduit par le fait de retisser du lien social. C'est une grande constante du judaïsme. Vous connaissez tous le passage de la Bible consacré à la reine Esther. Le grand vizir Haman veut tuer tous les Juifs de Perse. Finalement, les choses se retournent contre lui et personne n'est tué mais Mardochée demande à la communauté juive d'offrir de la nourriture aux gens et de donner de l'argent aux pauvres, c'est-à-dire de recréer du lien social. Malheureusement, dans le Xème chapitre, comme toujours, le Roi finit par lever un impôt !

Plus sérieusement, il est ici question de lien social. Avec les jeunes, il s'agit d'un effet de mode, d'une sorte de volonté de faire partie d'une bande mais aussi d'une forme de dépendance qui est en général la traduction d'un mal-être familial ou personnel. C'est le travail de tous ceux qui sont autour de la communauté éducative de déceler et d'aider les familles à affronter ces difficultés. Pour beaucoup d'entre elles, c'est le signe d'un échec alors qu'il convient de redoubler d'efforts. Les parents qui découvrent que leur enfant se drogue doivent être présents et essayer de le comprendre. En tant que rabbin, mon rôle est avant tout de réinsérer ce jeune dans l'univers familial. On n'est pas toujours fiers de ce que peuvent faire nos enfants mais on les aime parce que ce sont nos enfants et parce que nous sommes leurs parents. Dans la communauté éducative, il est important de déculpabiliser les proches pour ne pas qu'ils renoncent à leur rôle.

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