C'était un élément consensuel : avant les antiviraux – qui sont récents –, il n'existait pas d'arme curative contre la grippe : l'unique arme était préventive. La vaccination est la seule façon de se débarrasser de la grippe.
Avec la vaccination, l'excédent de mortalité, qui était de 5 000 à 10 000 personnes par an, est tombé à 2 000 ou 3 000. C'est ainsi que, avec le début des campagnes de vaccination, dans les années 1984-1985, la mortalité par grippe, qui touchait principalement les personnes âgées, s'est effondrée : le nombre de décès dus directement à la grippe – et c'est à ce nombre qu'il faut comparer les 300 morts d'aujourd'hui –, qui était alors compris entre 1 000 et 2 000, est tombé à quelques unités, entre 10 et 30. La comparaison entre les 300 morts confirmées de la grippe A(H1N1)v et l'excédent de mortalité de 3 000 dû à la grippe saisonnière n'est donc pas pertinente.
J'ai décrit mes cinquante ans de carrière, mon histoire personnelle et l'histoire de la grippe à travers une vie de chercheur, dans un ouvrage intitulé La grippe, ennemi intime ; itinéraire d'un virologue, qui a été publié en septembre dernier – pendant la pandémie, ce qui n'était sans doute pas le meilleur moment.
La question de l'exclusion des médecins est essentielle. Votre analyse, monsieur Bacquet, est juste pour le moment où le plan a été lancé. Il reste que, avant même cet épisode, les médecins n'étaient déjà pas très favorables au vaccin.
Les recommandations générales pour vacciner le corps médical et les personnels soignants contre la grippe saisonnière étaient jusqu'à récemment très mal appliquées par les médecins ; 20 % d'entre eux tout au plus se faisaient vacciner, alors que chaque hiver, ils rencontrent des gens susceptibles de les contaminer et qu'ils sont eux-mêmes susceptibles de contaminer des patients qui n'ont pas la grippe. Ce très faible taux de vaccination est sans doute lié à des raisons personnelles : considérant qu'ils n'ont jamais attrapé la grippe, ils ne se vaccinent pas.