Je n'ai évoqué que les difficultés auxquelles j'ai été directement confronté. Je ne dispose, pour la suite, que d'informations en provenance de sources ouvertes.
Ces difficultés étaient de plusieurs ordres. Je le répète : je n'ai pas pu installer le siège de l'ÉPRUS durant les neuf mois pendant lesquels j'ai dirigé l'établissement. Le président de l'ÉPRUS et moi-même avons très rapidement fait une proposition visant à installer l'établissement dans une tour parfaitement sécurisée et sécurisable, puisque ne s'y trouvaient que des services de l'État ou proches de l'État. De surcroît, cette tour est très bien connue des services de gestion des ministères chargés des questions sociales – santé et travail – puisqu'un grand nombre d'entre eux y sont installés. Si, comme nous l'avions proposé, nous avions pu, à notre tour, y installer l'ÉPRUS dès la fin du mois de novembre 2007 nous aurions pu, dès mars 2008, disposer d'un établissement pharmaceutique et prendre en charge une grande partie, voire la totalité des nombreuses opérations que la DGS souhaitait nous confier. De plus, la France prenait alors la présidence de l'Union européenne et il n'existait dans aucun autre pays de l'Union une structure de ce type : ainsi aurions-nous pu entraîner nos partenaires dans des coopérations, qui étaient souhaitées par le gouvernement français.
Le président de l'ÉPRUS et moi-même n'avons été informés de l'impossibilité d'installer l'ÉPRUS dans ces locaux que la veille de la réunion du conseil d'administration qui devait entériner le projet. Il a fallu attendre mon départ pour que la situation se décante. J'avais, à plusieurs reprises, fait des propositions – nous avons visité vingt-huit sites –, mais je n'ai jamais pu obtenir les informations me permettant d'établir le bon dimensionnement du site de l'ÉPRUS.
Par ailleurs, si je ne demandais pas l'augmentation des effectifs prévus pour la gestion des stocks, même en cas de modification stratégique importante, du fait que je travaillais en liaison avec le service de santé des armées afin de sécuriser les stocks dans des conditions que les militaires maîtrisent, j'avais en revanche posé la question de la réserve sanitaire. La DGS avait en la matière un projet, certes limité, mais conforme à la loi : il consistait à sécuriser les urgentistes en leur permettant d'obtenir une véritable professionnalisation de leurs missions, notamment extérieures. Or, pas même ce projet n'a pu aboutir, puisque, à mon départ, les règles d'emploi de cette réserve minimale n'avaient pas encore été présentées au conseil d'administration, la DGS ayant souhaité le faire à ma place. Par-delà ce projet, j'avais pour ambition de constituer une réserve de plusieurs dizaines de milliers de professionnels de santé, ce qui aurait permis de couvrir l'ensemble du territoire – ce projet est, à mes yeux, toujours d'actualité. Je n'ai pas réussi à savoir en quel sens trancherait la DGS : or une réserve de quelques dizaines de milliers de professionnels ne peut être gérée comme une réserve minimale de quelques centaines.
Quant à la stratégie de stockage, elle n'a été arrêtée qu'après mon départ, alors que tout était prêt avec le service de santé des armées.
L'addition de toutes ces incertitudes et l'absence de siège de l'établissement ne nous a pas permis d'obtenir de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) l'agrément pour l'ouverture d'un établissement pharmaceutique, ce qui nous contraignait à ne réaliser certaines opérations, devenues urgentes en raison des dates de péremption, qu'en oubliant des dispositions majeures de la loi, comme le monopole pharmaceutique. Cela n'était possible qu'à la condition d'obtenir l'expression d'une certaine confiance politique, mais tel ne fut pas le cas. Il m'était donc devenu impossible de rester et je suis parti. Le reste est affaire de perception. J'ai présenté ma démission, en en exposant les raisons, ce qui n'est pas habituel. Il est tout à fait normal qu'il ait été mis à fin à mes fonctions, ce que je considérais comme souhaitable.