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Intervention de Serge Lebigot

Réunion du 23 mars 2011 à 16h15
Mission d'information assemblée nationale-sénat sur les toxicomanies

Serge Lebigot :

- L'association « Parents contre la drogue » reçoit toute la journée des parents dont les enfants sont des consommateurs de drogues diverses, en particulier de cannabis. Pour ce qui est de la cocaïne et de l'héroïne, on a tendance à les envoyer vers des communautés thérapeutiques.

Dans notre pays, on ne lutte pas contre la toxicomanie, on se contente de gérer les problèmes. Durant ces quinze dernières années, la consommation de drogues en France n'a cessé d'augmenter ; dans le même temps, les gens ont commencé à consommer de la drogue de plus en plus tôt. L'âge moyen du premier joint serait actuellement de douze à treize ans.

La raison de ce désastre est évidente : la France a délaissé la politique de prévention au profit d'une politique de gestion de la drogue. Le tristement célèbre slogan : « Savoir plus pour risquer moins » s'est traduit sur le terrain par : « Savoir plus pour consommer plus, en croyant risquer moins ».

Cette politique se résume à une capitulation face au problème de la drogue. Au lieu de combattre les causes, les responsables qui en ont la charge se sont contentés de les gérer !

La politique de l'autruche -« Pas de vagues ! »- a prévalu et nous a conduits à la situation inquiétante dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui, avec une augmentation importante de la consommation de toutes les drogues chez les jeunes et un âge de la première consommation qui diminue chaque année.

Les parents sont très peu au courant ou très mal informés du problème de la toxicomanie, qui est complexe. En conséquence, ils deviennent victimes du système et ne peuvent jouer leur rôle d'acteurs en matière de prévention.

De plus, les discours banalisants de certains hommes politiques en faveur de la consommation de drogues contribuent également à la désinformation des parents.

Certains, devant ce constat, vont nous apporter des réponses toutes faites. « Nous avons un problème de cannabis ? Légalisons-le ! ». Ceci revient à dire : « La maison brûle ? Brûlons toutes les maisons ! ». Cette politique du pompier pyromane est absurde, tout comme la légalisation du cannabis ! L'expérience des autres pays nous le démontre. De nombreuses études à travers le monde prouvent que, lorsque la perception des risques perçus décroît, l'usage de drogues augmente.

Aucun des arguments avancés par les promoteurs de la légalisation ne tient la route ! En ce qui concerne les salles d'injection, aucune étude sérieuse indépendante -c'est-à-dire qui ne soit pas réalisée par ceux qui dirigent les salles d'injection ou qui les ont mises en place- n'a montré leur efficacité. En revanche, un grand nombre d'études indépendantes montrent que les salles d'injection ont une incidence négative en termes de consommation et de trafics de drogues. Elles montrent également que les overdoses à l'intérieur des salles d'injection sont fréquentes. Enfin, elles concluent que les salles d'injection n'ont aucune incidence en termes d'amélioration de la santé des toxicomanes.

Toutes ces propositions sont faites par des associations qui, sous couvert de soutien aux toxicomanes, militent en réalité pour la libéralisation complète des drogues !

Que propose notre association ? Plus que choisir la politique de la capitulation, c'est-à-dire la légalisation de la création de salles d'injection, nous demandons que soit enfin mise en oeuvre une politique de lutte contre la toxicomanie basée non plus sur des idéologies du passé mais sur des réalités de terrain, en France comme à l'étranger. Nous n'avons de cesse de réclamer une politique de prévention et de sortie de la toxicomanie. Je parle ici d'une prévention sérieuse, dès le plus jeune âge. Il ne s'agit ni de banaliser, ni de dramatiser mais d'expliquer les problèmes liés à la drogue, en relation avec les problèmes de l'adolescence. Certaines campagnes de prévention en faveur du port de la ceinture de sécurité ou du dépistage de certains cancers ont prouvé leur efficacité.

Il ne faut pas non plus réduire la prévention à la seule éducation nationale. C'est pourquoi nous demandons que chaque mairie organise une journée d'information sur les dangers des drogues. Cela permettrait de toucher de nombreux parents et enfants.

Arrêtons de classer les dealers par catégorie : gros dealers, petits dealers, dealers consommateurs : le poisson que chacun vend est le même ! Il est aussi dangereux pour le jeune qui va le consommer.

Drogues douces, drogues dures sont à également des termes à bannir car ils correspondent à des techniques de marketing utilisés par ceux qui veulent banaliser les drogues. La vraie distinction doit porter sur les drogues à effet rapide et les drogues à effet lent, l'héroïne jouant le rôle de la crise cardiaque et le cannabis celui d'un cancer qui ne se révèle que lorsque les dommages deviennent visibles.

Les dispositions de l'article L 3421-4 du code de la santé publique, qui réprime toute incitation directe ou indirecte à la prise de drogues, doivent être appliquées et renforcées.

Certaines stations de radios ou chaînes de télévision ne se privent pas de diffuser des messages banalisant l'usage de drogue. Promouvoir la drogue, ce n'est pas être « cool » : c'est être irresponsable !

Le cannabis ne doit plus conserver chez les jeunes son statut d'icône « cool », de produit naturel. Il est également important que sa consommation ne soit pas perçue par les jeunes comme une pratique à laquelle souscrit la société, et ne soit plus considérée sans danger. Consommer de la drogue quelle qu'elle soit revient à jouer à la roulette russe car il n'existe pas de consommation de drogues sans risque à court ou à long terme.

J'espère que cette mission sera l'occasion pour le pays d'abandonner la politique de la ligne Maginot intellectuelle et que l'on cessera de jouer aux apprentis sorciers avec les salles d'injection.

Commençons à tirer les leçons des expériences conduites à l'étranger. Les idées des années 1970 appartiennent aux années 1970 et non au XXI ème siècle ! Quand la santé des enfants, des adolescents et des jeunes adultes est en jeu, les idéologies du passé doivent s'effacer et la raison prévaloir.

Le phénomène de la drogue a changé ; nous devons avoir le courage de nous adapter car l'inaction et la complaisance de ces dernières années se sont traduites par des désastres en termes de santé publique.

Nous devons mettre en oeuvre une politique de prévention qui tienne enfin compte des réalités de terrain et non des objectifs politiques à court et moyen termes des lobbies de la drogue !

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