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Intervention de André-Jean Rémy

Réunion du 12 janvier 2011 à 16h00
Mission d'information assemblée nationale-sénat sur les toxicomanies

André-Jean Rémy :

- Je suis surtout hépatologue, c'est à ce titre que j'interviens en prison et que je coordonne les unités médicales du Centre hospitalier de Perpignan.

La loi qui régit la prise en charge des personnes détenues a créé les unités de consultation extra-ambulatoires (UCSA) et a transféré la prise en charge de la qualité et de la continuité des soins ainsi que la prévention et l'éducation à la santé au ministère de la santé. Plusieurs pays ont suivi la même voie récemment. Son principe de base est l'égalité entre la prison et l'extérieur.

La prison est en effet un lieu de contamination virale. L'Institut de veille sanitaire (InVS), dans son enquête sur la prévalence des hépatites en France, a démontré que la prison multiplie par dix le facteur de risques relatifs à l'hépatite C et par 4 celui de l'hépatite B. Actuellement, 3.300 détenus sont atteints d'hépatite C, 1.700 de l'hépatite B et 800 du VIH. Entre 60 et 100 détenus sont contaminés chaque année en prison, selon l'estimation des professionnels de terrain.

Il existe des pratiques à risques en prison du fait de l'absence d'activités et de la relative disponibilité de produits illicites ou de médicaments détournés de leur usage thérapeutique.

Les pratiques à risques sont multiples : injections, « sniffs », tatouages artisanaux, piercings, scarifications ou relations sexuelles non protégées.

Selon l'enquête « Coquelicot », sur 61 % d'usagers de drogues ayant souvent fréquenté la prison, on dénombre 12 % d'injecteurs dont 30 % avec échange de matériel non stérile.

Ces pratiques à risques en milieu carcéral sont connues des équipes soignantes. Les données françaises de terrain sont les suivantes, selon les résultats d'une enquête de pratiques 2010, deux tiers des UCSA ont eu connaissance de pratiques de « sniff » , la moitié connaissance de partage de paille, un tiers connaissance d'injection et de partage de seringues entre détenus, un quart de partage de coton ou de cuillères. On compte 60 à 100 nouvelles contaminations virales par an.

En fonction de l'objectif actuel de réduction des risques inscrit dans la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, les programmes d'échanges de seringues sont possibles et légaux au dehors mais la réduction des risques s'est arrêtée aux portes des prisons et il n'existe pas de politique réelle de RDR en prison, en France !

Les injections et autres pratiques sont plus fréquentes à l'extérieur de la prison qu'à l'intérieur mais comportent moins de risques, un tiers donnant lieu à échange de seringues.

L'efficacité du programme d'échange des seringues est prouvée, notamment en Espagne, pour ce qui est des contaminations au VIH ou au VHC.

En conclusion, la fréquence des infections virales est plus élevée en prison qu'en milieu libre. De nouvelles contaminations se produisent chaque année.

Il faut donc, selon nous, définir une véritable politique de réduction des risques en prison comprenant l'ensemble des mesures, y compris les programmes d'échange de seringues et de traitements de substitution aux opiacés.

Pour répondre à la question de Mme Lemorton sur le taux de couverture vaccinale des populations toxicomanes, 30 % de toxicomanes sont vaccinés contre l'hépatite C. Les expériences internationales menées dans les centres de prise en charge montrent que l'on peut vacciner les patients contre une hépatique C quel que soit leur environnement. Certains programmes ont prouvé leur efficacité.

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