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Intervention de Frédéric Dupuch

Réunion du 13 avril 2011 à 16h00
Mission d'information assemblée nationale-sénat sur les toxicomanies

Frédéric Dupuch, directeur de l'Institut national de police scientifique :

Il est très difficile pour nous d'apprécier l'évolution quantitative des produits. Nous agissons sur saisine et nous ne pouvons donc nous prononcer qu'à partir de ce qui nous est envoyé. Prétendre à une connaissance exhaustive de ce qui se passe signifierait que nous recevions tout, ce qui n'est pas le cas.

Si l'on examine aujourd'hui les résultats de l'année 2010 à partir du logiciel STUPS, on trouve dans les produits saisis 40 % de cocaïne, 33 % de cannabis et 16 % d'héroïne. Mais ces résultats dépendent des services enquêteurs qui ont saisi les prises et les ont envoyées aux laboratoires. Je ne pense pas que l'on puisse en déduire une approche quantitative de la majorité des produits qui circulent.

En matière de sécurité routière, nous trouvons en majorité du cannabis. Et lorsque nous analysons les prises, nous nous apercevons que le taux de THC est aujourd'hui de 11 %, ce qui traduit une croissance lente de la teneur en principe actif.

Selon les études documentaires de M. Fabrice Besacier, à la fin des années 1970 et au début des années 1980, le taux de THC du cannabis était de 5 %. Ce taux a relativement peu bougé jusqu'à la fin des années 1990. Il a maintenant doublé. À quoi cela est-il dû ? Au recours à des organismes génétiquement modifiés, à des systèmes de pousses bien alimentées et à un éclairage plus fort. Vous avez entendu parler, il y a un mois, d'une affaire en Seine-Saint-Denis : tout un équipement avait été mis au point, notamment avec de la lumière forcée, pour faire pousser du cannabis. M. Fabrice Besacier, qui a été saisi de prises de différentes feuilles, a vu que le THC de certains plants atteignait 14 %.

La teneur en principe actif des autres produits que nous appréhendons est relativement stable. La pureté moyenne de la cocaïne aux frontières, que nous étudions à partir de Roissy, est de 64 %. Elle est de 34 % pour les prises réalisées sur la voie publique. Le taux de pureté de l'héroïne ne change pas : il est de 13 %. Le cannabis, en revanche, est de plus en plus pur.

Venons-en aux médicaments. C'est un domaine dans lequel nous travaillons main dans la main avec l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, précisément pour jouer un rôle d'alerte. Vous savez que ne peut être poursuivi pour trafic de drogue que quelqu'un qui vend de la drogue, concept qui obéit à une définition juridique. Les drogues médicamenteuses sont listées dans un texte réglementaire, mis à jour par le ministère de la santé. Si un produit s'en rapproche, mais qu'il ne correspond pas à la définition, il n'est pas considéré comme une drogue illicite et ne peut donc, en tant que tel, donner lieu à des poursuites, alors même qu'il est toujours possible d'incriminer les trafiquants pour des infractions de nature fiscale ou douanière.

Lorsque nous recevons des produits dont les analyses chimiques permettent de dire qu'ils sont proches de tel médicament considéré comme une drogue, mais qui n'en sont pas tout à fait une parce qu'une branche de la molécule a été modifiée lors de la conception chimique, nous faisons remonter cette information à l'observatoire, et celui-ci soumet la question au ministère de la santé pour que la liste des substances illicites soit réévaluée. Tout un réseau européen travaille sur ce sujet afin d'alimenter réciproquement les pays et se tenir à jour.

Un exemple récent est fourni par la méphédrone, un médicament qui est désormais considéré comme une drogue. Un léger déplacement d'une des branches chimiques de la molécule initiale avait permis de ne rien changer aux effets psychotropes de cette drogue. Mais ce n'était plus tout à fait la même molécule. Les douanes ont saisi des quantités énormes de ce nouveau produit, appelé M-4. Elles l'ont bloqué sous couvert d'une infraction douanière, mais on ne pouvait pas poursuivre les trafiquants pour trafic de drogue. La liste des stupéfiants a donc été modifiée et, maintenant, le M-4 est considéré lui aussi comme une drogue.

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