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Intervention de Didier Tabuteau

Réunion du 13 avril 2010 à 15h00
Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe a

Didier Tabuteau, conseiller d'état, directeur général de la Fondation Caisses d'épargne pour la solidarité et directeur de la chaire Santé de l'Institut d'études politiques de Paris :

L'alerte était-elle légitime ou non ? J'avoue ne pas savoir répondre à cette question indéniablement majeure, faute de connaître les données dont disposaient l'OMS et les institutions de santé nationales. Mais j'attends avec beaucoup d'intérêt les travaux qui seront produits sur le sujet.

Quant à la proportionnalité de la décision, je ne suis pas choqué qu'on se soit fixé pour objectif de vacciner toutes les personnes qui le souhaitaient. C'est d'ailleurs ainsi qu'on agit pour la grippe saisonnière et cela répondait à l'attente de la population, telle qu'on pouvait la percevoir en septembre-octobre. Cette demande de protection était légitime et je rappelle qu'on y a répondu par d'autres moyens : ainsi je n'aurais garde d'oublier la campagne en faveur des mesures d'hygiène, qui a certainement servi contre d'autres maladies que la grippe H1N1.

Cela étant, même s'il faut prendre en compte une certaine proportion de refus de vaccination – que je suis incapable d'évaluer mais qui commandait peut-être de ne pas aller jusqu'à 94 millions de doses –, je le répète, la décision prise en juin-juillet ne me choque pas au regard du critère de proportionnalité, mes réserves portant plutôt sur le fait qu'on n'a pas mené la politique que cela impliquait.

Sur le problème de la responsabilité, je dois avouer mon incompréhension. J'avais cru comprendre que le vaccin ferait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) normale. Dès lors, nous devions être dans le champ d'une responsabilité de droit commun, tant pour le producteur que pour le prescripteur. Si le produit avait été utilisé sans AMM ou hors AMM, c'est l'article L. 3131-3 du code de la santé publique qui se serait appliqué : en cas de menace sanitaire grave, « les professionnels de santé ne peuvent être tenus pour responsables des dommages résultant de la prescription ou de l'administration d'un médicament », et c'est l'État qui assume cette responsabilité. Mais, si le vaccin, comme on l'a dit, avait été évalué normalement et avait obtenu une AMM, je ne vois pas en quoi un régime dérogatoire aurait été justifié ! Certes, depuis 1976 et les cas de syndrome Guillain-Barré enregistrés aux États-Unis après une campagne de vaccination contre la grippe porcine, les entreprises pharmaceutiques entretiennent quelques inquiétudes, et on aurait à la rigueur pu prendre une mesure législative. Mais je ne suis pas sûr que cela aurait rassuré – au contraire même, on aurait sans doute accru les doutes de la population.

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