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Intervention de Marie-Anne Montchamp

Réunion du 25 janvier 2012 à 15h00
Don d'heures de réduction de temps de travail ou de récupération à un parent d'un enfant gravement malade — Discussion d'une proposition de loi

Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, la présente proposition de loi vise à permettre aux salariés du secteur public comme à ceux du secteur privé de faire don d'heures de RTT ou de récupération à un collègue dont l'enfant, âgé de moins de vingt ans, est atteint d'une maladie, d'un handicap ou est victime d'un grave accident, qui rend indispensable la présence de ses parents auprès de lui.

C'est une expérience de terrain qui a inspiré cette proposition, une expérience vécue dans votre circonscription, monsieur le rapporteur Paul Salen, cette circonscription qui fut longtemps celle de Jean-François Chossy, dont chacun connaît ici non seulement la sensibilité humaniste mais aussi l'implication sans faille auprès des plus fragiles frappés par le handicap ou par la maladie. Quel geste admirable, en effet, que celui de ces salariés de l'usine Badoit, à Saint-Galmier, qui ont fait don de 170 jours de congé à un de leurs collègues dont le fils Mathis était en fin de vie, affecté d'un très grave cancer qui devait l'emporter à l'âge de tout juste onze ans. Grâce à cela, le papa de ce jeune garçon a pu hospitaliser son enfant à domicile, l'accompagnant constamment jusqu'à la fin.

C'est ce geste que cette proposition de loi veut favoriser et amplifier, en lui donnant, tout simplement, un cadre légal.

Comme vous, monsieur le député, le Gouvernement a fait le choix de considérer que ce dispositif fraternel et de bon sens permettrait d'accompagner l'élan spontané de solidarité de nos compatriotes.

Ce dispositif a vocation à prendre toute sa place dans la politique d'aide et de soutien aux aidants, volet important de la politique d'aide à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées dont Roselyne Bachelot et moi-même assumons la responsabilité au sein du Gouvernement. C'est pourquoi je me suis sentie si concernée par ce texte, aux côtés de mon collègue Xavier Bertrand, ministre du travail. Il s'agit ni plus ni moins que de permettre à des parents, qui doivent déjà faire face à des situations éminemment éprouvantes, douloureuses, de pouvoir bénéficier de temps complémentaire pour accompagner leur enfant, sans être confrontés à une baisse significative de leur rémunération.

Il est à ce titre naturellement complémentaire du congé de présence parentale qui permet aux parents d'enfants gravement malades de bénéficier de jours de congés qui donnent lieu, comme chacun sait, à une allocation de 49 euros par jour en moyenne, prise en charge par la branche famille de la sécurité sociale.

Ces dispositions législatives que vous nous proposez aujourd'hui ajoutent vraiment à l'état du droit en dénouant les difficultés juridiques liées à une démarche simple dont nos compatriotes ont besoin quand ils sont confrontés à ce type de situation.

Mesdames et messieurs les députés, vous savez bien, comme nous, qu'il n'est pas toujours si simple de faire face dans ce cas. Le Conseil d'État l'a suffisamment souligné dans nombre de ses rapports publics. Or, comme ont pu le constater les salariés de l'usine Badoit, la mise en oeuvre pratique de leur démarche généreuse n'était pas si facile.

Outre qu'elle posait des questions juridiques, il a pu leur être opposé que des mécanismes comparables existaient déjà. Or, et je veux insister sur ce point, ce nouveau dispositif relève d'une autre logique que celle des mécanismes existants, une nouvelle logique qui repose sur un accord tripartite entre le donneur anonyme, l'employeur et le salarié bénéficiaire. C'est un dispositif très souple, simple à mettre en oeuvre et qui apporte les garanties essentielles à chacune des parties, c'est-à-dire l'anonymat et le respect des périodes minimales de congé pour le donneur, le maintien de la rémunération et des droits liés à l'ancienneté pour le bénéficiaire, le nécessaire accord de l'employeur. Il offre des garanties tout en conservant une grande souplesse. Ainsi, alors que les mécanismes existants sont fondés sur la solidarité nationale, celui-ci est l'expression d'une solidarité au sein de l'entreprise entre des collègues de travail. C'est cette solidarité interpersonnelle que le Gouvernement souhaite soutenir.

Dans ces temps de contrainte budgétaire, cela a évidemment le grand mérite de ne pas peser sur nos finances publiques tout en ouvrant un nouvel espace de conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle. En effet, le texte ne crée pas de nouveaux jours de congé, mais permet aux salariés solidaires de mutualiser les leurs. Toutefois, je veux souligner que le principal intérêt de ce dispositif va bien au-delà de l'aspect budgétaire. Son principal mérite est de valoriser cet esprit de volontariat et de don sans lequel nous ne pouvons espérer renforcer notre cohésion sociale. Les transferts financiers seuls ne suffisent pas. Nous avons besoin de l'envie partagée de faire société, de l'engagement personnel de nos compatriotes, ce même engagement qui est en jeu dans les questions du bénévolat, du mécénat, des aidants familiaux. Cet esprit, c'est celui d'une société civile solidaire qui n'attend pas tout de l'État, qui se prend en main, qui se préoccupe elle-même de son destin.

J'espère vraiment que le dispositif dont nous allons débattre, circonscrit à des situations précisément définies, donnera d'une certaine manière un nouvel élan à la négociation entre les partenaires sociaux sur cette question et sur un terrain qui, sans doute, est pour eux encore inédit. Des exemples existent déjà. Je pense à l'entreprise Merial, filiale vétérinaire de Sanofi, qui a vu la direction, les syndicats – CFDT, CFE-CGC, CGT, FO – conclure en avril dernier un accord d'entreprise sur « l'absence enfant malade ». Cet accord prévoit un congé de vingt jours ouvrés rémunérés à 75 % et pouvant être pris par demi-journées pour s'occuper d'un enfant gravement malade de moins de dix-huit ans. Là encore, c'est un bel exemple à suivre.

C'est parce que le Gouvernement souhaite que de tels exemples soient suivis, prospèrent et soient connus de nos compatriotes, qu'il est favorable – très favorable – à cette belle et généreuse proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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