Vous êtes jaloux ! (Rires sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
En effet, les atteintes au secret des affaires se sont multipliées au cours des dernières années, causant un préjudice économique considérable aux entreprises françaises. L'utilisation croissante et les progrès rapides des nouvelles technologies de l'information et de la communication fragilisent ce patrimoine malgré l'amélioration des moyens de défense technique.
Selon une récente étude, présentée dans le rapport de la commission des lois, 61 % des entreprises françaises ont déclaré avoir subi au moins un incident de sécurité en 2011, contre 39 % en 2010. En outre, 17 % des entreprises auraient été victimes de vol de propriété intellectuelle en 2011, contre 6 % en 2008.
Ces situations peuvent avoir des conséquences d'autant plus graves qu'elles concernent des secteurs stratégiques, tels que l'aéronautique, l'automobile, la filière de l'énergie nucléaire, les laboratoires de recherche, la métallurgie et la sidérurgie.
Face à ces attaques de plus en plus nombreuses, l'arsenal juridique français apparaît inadapté, faute d'une définition précise de la notion d'information économique protégée et d'une infraction réprimant efficacement ces comportements.
Si plusieurs textes protègent déjà les savoirs de l'entreprise – comme les droits d'auteur, les brevets, le secret professionnel, les logiciels ou encore les secrets de fabrication – il n'existe pas de protection globale et appropriée des informations à caractère économique, alors même que cette protection existe chez nos partenaires.
Les États-Unis ont ainsi adopté, en 1996, l'Economic Espionage Act. En Allemagne, trois infractions relatives au secret des affaires sont définies et réprimées par la loi sur la concurrence déloyale dite « UWG ». En Autriche, la violation du secret d'affaires est réprimée par la loi contre la concurrence déloyale. En droit italien, enfin, la protection du secret des affaires a été renforcée en 1996.
Ainsi, l'écart de protection entre notre législation et celles de nos partenaires économiques désavantage lourdement les entreprises françaises au nom du principe de la libre concurrence.
Une réflexion s'est donc engagée depuis plusieurs années sur l'opportunité de modifier notre législation et d'apporter une protection suffisante au secret des affaires. Un groupe de travail, présidé par Claude Mathon, avocat général à la Cour de cassation, a formulé, au mois d'avril 2009, plusieurs propositions. Les représentants des administrations et des entreprises ont travaillé en 2010 et 2011 sous l'égide de la délégation interministérielle à l'intelligence économique afin de préparer un dispositif législatif et réglementaire de protection des informations économiques stratégiques des entreprises. L'expertise juridique du Conseil d'État a également été sollicitée.
La proposition de loi que nous examinons est l'aboutissement de toutes ces réflexions.
Elle énonce ainsi une définition précise des informations économiques protégées et sanctionne leur divulgation. La définition exhaustive – dont je vous épargne la lecture – est d'ailleurs proche de celle de l'Economic Espionage Act américain, et de ce qui caractérise les informations « secret défense » dans notre législation.
Par ailleurs, il apparaît que la protection du secret des affaires des entreprises dans le cadre des procédures judiciaires – notamment dans le cadre de la procédure américaine dite de discovery – n'est pas efficace. En effet, la loi du 26 juillet 1968, dite « loi de blocage », complétée en 1980, qui voulait protéger les ressortissants français contre le contournement des mécanismes de coopération judiciaire qui font l'objet de la Convention de La Haye du 18 mars 1970, s'est révélée une source de difficultés pour les entreprises françaises confrontées à des demandes de renseignements émanant de la justice américaine. C'est pourquoi la proposition de loi de notre collègue Carayon vise également à répondre à l'application imparfaite de la loi de blocage.
Je ne peux m'empêcher de faire référence à une autre proposition de loi que le Parlement examine actuellement, celle du président de notre commission des lois Jean-Luc Warsmann, relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives. En effet, qu'il s'agisse de la rationalisation des déclarations sociales au sein d'une déclaration sociale unique, de la création d'un coffre-fort numérique, afin de permettre aux PME de ne déclarer qu'une seule fois ce qui faisait jusqu'à présent l'objet de déclarations multiples et redondantes à l'administration, ou encore de l'extension du rescrit dans le champ social qui permettra aux entreprises d'obtenir de l'administration sociale des réponses opposables, toutes ces mesures ont une seule et même finalité : répondre de manière concrète aux difficultés des entreprises dans leur vie quotidienne.
S'il y a parfois des textes qui divisent sur les bancs de cette Assemblée, je crois – ou du moins j'espère – que celui-ci fera au contraire l'unanimité, comme ce fut le cas en commission des lois.
Jean-Michel Clément n'a-t-il pas qualifié cette proposition de loi « d'heureuse initiative » ? Jean-Jacques Urvoas n'en a-t-il pas salué la « pertinence » ? Ils auront l'occasion tout à l'heure, je crois, de rappeler leur propos. Cette position des groupes socialiste et GDR semble confirmée, puisque aucun amendement n'a été déposé en séance publique.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, le groupe UMP votera cette proposition de loi avec la certitude d'agir au service des entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)