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Intervention de Jacques Texier

Réunion du 12 janvier 2012 à 9h30
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Jacques Texier, président du Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise :

En ce qui concerne la démographie médicale, je partage l'avis de monsieur Bernard Salengro : nous pouvons retrouver des marges de manoeuvre en augmentant les capacités de recrutement et en permettant aux médecins de suivre plus d'une carrière. Un rapport sur la santé au travail, rédigé par monsieur Paul Frimat et deux de ses confrères, a montré que de nombreux médecins de soins exprimaient l'envie d'une carrière différente. Or, la médecine du travail répond à cette aspiration, car les difficultés auxquelles elle est exposée ne sont pas les mêmes que pour la médecine de soins. Une opération a d'ailleurs été lancée avec succès il y a quelques années pour encourager les reconversions.

En ce qui concerne la disparité géographique, le plafond fixé par la loi – pas plus de 3 300 salariés par médecin du travail – est atteint, voire dépassé pratiquement partout. Et dans certaines régions, on monte à 10 000, voire 15 000 salariés. Cela pose un problème majeur, et c'est pourquoi nous sommes partisans d'encourager les reconversions et d'augmenter les capacités.

L'éventuel recours aux médecins traitants est un sujet difficile, pour ne pas dire tabou. Pourtant, il existe : les travailleurs indépendants, qui n'avaient pas accès aux services de santé au travail, ont passé un accord avec des médecins de ville afin d'organiser leur suivi médical. Mais il est vrai que la connaissance du poste de travail, celle des risques qui lui sont associés, mais aussi des aspects psychosociaux et organisationnels, sont autant d'éléments essentiels qui rendraient presque impossible le recours à d'autres professionnels que les médecins du travail. Cela étant, le médecin de ville a connaissance de l'état physique de son patient, l'entrée dans un poste ne pose pas nécessairement un problème, et certains postes ne présentent pas de risques particuliers. Les services de santé au travail peuvent suivre 10 millions de personnes par an. S'ils doivent également suivre toutes les embauches – soit 20 millions –, on peut imaginer une procédure particulière pour les salariés en bonne santé prenant un poste sans risque particulier. Bien entendu, le recours aux médecins de ville aurait un coût qu'il faudrait prendre en charge, et aurait pour effet de détourner une partie de leur activité.

Même si c'est difficile, la médecine du travail ne pourra que s'adapter aux nouvelles formes de travail. D'une manière générale, si le médecin s'entoure d'une équipe de santé, c'est parce qu'il doit faire face à des situations de plus en plus variées, de plus en plus complexes, à des maladies professionnelles plus nombreuses : affections physiques ou psychosociales, liées à l'âge, aux restructurations, à la mobilité professionnelle… Il faut, en particulier, trouver des modes d'organisation pour prendre en charge le million et demi de salariés travaillant à domicile. Là encore, un recours au médecin traitant peut être envisageable. En tout état de cause, nous sommes à la veille d'assister à des évolutions très intéressantes.

Il est vrai que le premier plan Santé au travail, s'il a donné lieu à de nombreuses signatures de principe, n'a pas eu les résultats escomptés, faute d'une bonne adaptation à ce nouvel outil. Le deuxième plan, compte tenu de la réforme que vous avez votée et des décrets attendus, pourrait changer la donne. Mais il convient d'améliorer l'organisation de la prévention, de faire en sorte que les capacités soient adaptées – sans quoi la plupart des visites d'embauche se réduiront à une simple formalité.

S'agissant de la coordination et du pilotage, une réflexion doit être menée sur la représentativité, notamment au sein du Conseil d'orientation sur les conditions de travail. Malgré l'importance du retour de terrain dont nous bénéficions, nous n'avons jamais la possibilité d'apporter au bon moment à nos interlocuteurs que sont l'État et les partenaires sociaux le fruit de notre expérience, sans même parler de prise de décision.

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