Nous saluons tous le travail accompli par ATD-Quart Monde.
Il nous appartient, en tant que législateurs, de trouver le bon équilibre. Il n'est pas dans notre intention de faire en sorte que les enfants soient plus facilement adoptables. Cela dit, un certain nombre de statistiques démontrent qu'il y a de plus en plus d'enfants placés et de moins en moins d'adoptions. Il nous faut accompagner au mieux les familles, ce que prévoit clairement la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, et poser la question de l'adoption au moment le plus opportun pour l'enfant.
La loi de 2007 contient tous les éléments permettant aux travailleurs sociaux de déposer une demande de déclaration judiciaire d'abandon, mais ceux-ci ne le font pas, et pour beaucoup d'enfants, la déclaration d'abandon intervient alors qu'ils ont déjà sept, huit, neuf ans, voire plus. Ces enfants sont pourtant placés depuis leur petite enfance, les liens avec leur famille naturelle sont distendus, voire inexistants depuis très longtemps. Lorsque la décision intervient, il est trop tard pour les confier à l'adoption, car, en matière d'adoption, l'âge tardif des enfants est l'une des causes d'échec. C'est la raison pour laquelle le législateur tient à ce que la question de l'adoptabilité soit posée systématiquement.
La loi de 2007 prévoit en outre l'élaboration d'un projet de vie pour chaque enfant placé. Or ce n'est pas systématiquement fait en pratique car, généralement, les personnes et les services concernés n'ont pas réussi à s'accorder.
L'obligation de se poser la question de l'adoptabilité de l'enfant doit naturellement s'accompagner de la garantie que sa famille a reçu un soutien. Il ne me semble cependant pas nécessaire d'inscrire cette obligation dans le texte car elle figure déjà dans la loi réformant la protection de l'enfance.
Qui prend la décision concernant l'adoptabilité de l'enfant ? Des professionnels – juges, procureurs, travailleurs sociaux – mais aucun membre de la société civile. Le conseil de famille, au sein du conseil général, examine la situation de l'enfant mais seulement lorsque celui-ci est remis à une famille. Il faudrait que le conseil de famille, qui représente la société civile puisse intervenir pour décider de l'adoptabilité d'un enfant, mais je ne sais pas si nous pouvons inscrire une telle disposition dans la loi car cela aurait un impact certain sur les moyens des départements et je ne suis pas certaine que le Gouvernement nous suivrait sur ce point. Il est évident que nous serons amenés à nous poser ces questions.
Il n'y a pas de désaccord entre nous, législateurs, et votre mouvement sur les objectifs à atteindre, mais nous observons des éléments objectifs : la loi de 2007 n'est pas appliquée dans sa totalité et l'intérêt supérieur de l'enfant n'est pas pris en considération comme il le devrait.
En ce qui concerne l'adoptabilité, nous voulons aller plus loin. Nous attendons du ministère qu'il établisse un référentiel, en lien avec les départements et les organisations oeuvrant dans le domaine de la protection de l'enfance.
L'Observatoire national sur l'enfance en danger, l'ONED, a fait des préconisations en ce qui concerne le concept de l'attachement, qui malheureusement n'est pas encore reconnu par les professionnels. Pierre Naves, inspecteur général des affaires sociales, propose l'organisation d'une conférence de consensus : cela me paraît effectivement une bonne solution.