L'article 5 avait pourtant été réécrit, comme vous le savez, pour tenir compte des recommandations de la CNIL et du Conseil d'État, comme des observations du Sénat.
Les garanties juridiques constitutionnelles et même conventionnelles de protection des libertés publiques ont rétabli un lien fort, mais extrêmement encadré, de nature à apaiser toutes les inquiétudes. Dois-je rappeler une nouvelle fois ces garanties ? Le nombre d'empreintes avait été limité à deux, la reconnaissance faciale explicitement exclue et l'accès à la base sur réquisition judiciaire restreint aux seules infractions liées à l'usurpation d'identité et à la recherche de corps de victimes de catastrophes collectives et naturelles.
Nous étions ainsi parvenus, me semble-t-il, à un texte d'équilibre, apte à garantir à la fois la protection de l'identité de nos concitoyens et les libertés publiques. Nonobstant cette ouverture et cet effort de conciliation, que plusieurs orateurs, de droite comme de gauche, ont d'ailleurs reconnu, la commission mixte paritaire a rétabli purement et simplement le lien faible, sacrifiant – je n'hésite pas à le dire – les victimes de fraude à l'identité.
Combien de fois faudra-t-il donc répéter que le lien faible n'offre aucune possibilité de retrouver l'identité d'un usurpateur qui se serait introduit dans la base, ni d'identifier un cadavre ? Cette perméabilité à la fraude, doublée de l'impunité dont est quasiment assuré le fraudeur – il faudrait une centaine d'enquêtes de police pour identifier un seul fraudeur, ce qui, rapporté au taux annuel de fraudes identitaires, qu'on peut estimer à une centaine de milliers, donne un total de 10 millions d'enquêtes de police annuelles – ne garantit pas non plus à 100 % la sécurité de l'identité de nos concitoyens.
À quoi servirait-il d'instaurer une base centrale des données si l'on ne peut l'utiliser, alors même que l'on assortit cette base de toutes les garanties utiles ? La justice se trouverait, de ce fait, tout simplement privée d'un moyen efficace de confondre les délinquants.
Chacun sait, en outre, que le lien faible n'a été adopté par aucun pays au monde, Israël y ayant renoncé à cause de son manque de fiabilité. Son inventeur lui-même le dénigre, le qualifiant de « système dégradé ». Le GIXEL, qui regroupe tous les fabricants français, considère pour sa part qu'il est impossible à mettre en oeuvre car il n'a tout simplement aucun sens.
Voilà pourquoi le texte de la commission mixte paritaire est inacceptable. Il n'aurait jamais dû être adopté. Aussi, mes chers collègues, vous invité-je à voter l'amendement présenté par le Gouvernement, qui vise à rétablir, non pas bien sûr le texte initial du projet, mais celui résultant de nos travaux en deuxième lecture – le seul, nous en avons la conviction, qui soit de nature à rassembler aussi bien les défenseurs des libertés que ceux qui oeuvrent pour une meilleure sécurité des Français, c'est-à-dire, j'ose l'espérer, nous tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)