Quand il met en place un groupe de travail, que ce soit sur la justice ou sur le Parlement, il n'attend même pas ses conclusions pour prendre des décisions. Voilà qui illustre un détournement complet de l'esprit des institutions, une rupture de l'équilibre des pouvoirs, ce que l'on pourrait appeler, en d'autres termes, une dérégulation politique. Or, on sait où mène la dérégulation. Mais en politique, c'est beaucoup plus grave, et cela peut être malsain, voire dangereux.
Revenons aux fondamentaux : la démocratie nécessite de l'information, et celle-ci nécessite du débat, donc une expression libre. Mon collègue Marcel Rogemont a déjà fait remarquer que les médias, un des outils principaux du débat démocratique, sont repris en main. Je n'insiste pas sur ce point, mais il est clair que l'on se prive là d'un outil de la démocratie.
Le deuxième outil fondamental, c'est l'Assemblée nationale, et le Parlement d'une façon générale. Or, vous réduisez son expression. C'est effectivement une insulte à la dignité des sénateurs que de les faire discuter d'un texte qui est déjà appliqué. Et cela préfigure, malheureusement, la façon dont l'ensemble du Parlement sera traité une fois qu'auront été adoptées les dispositions que vous proposez.
Nous avons affaire à une dérive vers un régime de plus en plus autoritaire. Et cela se fait avec la complicité, voire le lâche soulagement, d'un certain nombre de députés de la majorité, puisqu'ils soutiennent ce texte.
Cet affaiblissement historique de notre démocratie et de notre expression parlementaire nécessite une réflexion assez profonde. Je vous invite, chers collègues de la majorité, à ne pas voter votre mort uniquement parce qu'on vous l'impose d'en haut, et à relire le livre qu'a écrit La Boétie au XVIe siècle, Discours de la servitude volontaire.