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Intervention de Gérard Bapt

Réunion du 4 novembre 2009 à 17h00
Commission élargie : commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Bapt, rapporteur spécial de la Commission des finances pour les crédits de la mission « Sant :

Mes collègues ayant à disposition, dans mon rapport écrit, la présentation et l'analyse circonstanciée des crédits de la mission « Santé », j'irai droit aux questions à madame la ministre.

Avec une augmentation des crédits qui se situe entre 1 et 2 %, le budget de la mission « Santé » pour 2010 sera un budget de continuité. Il s'élèvera à 1,2 milliard d'euros. Ce budget apparaît étonnamment stable au regard des grands changements qui affectent la mission cette année et qui l'affecteront l'an prochain, que ce soit sur le plan de l'organisation territoriale de la politique de santé avec l'installation des ARS au premier semestre 2010 ou, sur le plan budgétaire, avec les moyens exceptionnels débloqués pour lutter contre la pandémie de grippe A et le lancement du nouveau plan Cancer, qui doit mobiliser 730 millions d'euros supplémentaires pendant la période 2009-2013, un effort qui sera encore essentiellement porté par l'assurance maladie.

Ces remarques liminaires expliquent pourquoi je vous interrogerai, madame la ministre, sur les aspects budgétaires de cette mission, sur le paysage des agences sanitaires et sur le financement de la lutte contre la pandémie de grippe A.

Un article du PLFSS que notre assemblée a adopté la semaine dernière prévoyait l'affectation d'une nouvelle recette de 8,9 millions d'euros à la Haute autorité de santé – la HAS. Toutefois, les modalités de la taxe concernée ayant été modifiées par le vote de l'Assemblée, la recette supplémentaire ne devrait finalement être que de 7,1 millions d'euros. Ce montant ne permettra pas de maintenir les moyens financiers de la Haute autorité, alors que les missions qui lui sont confiées ne cessent d'augmenter. Ne faudra-t-il pas prévoir un complément de recettes, qui pourrait passer par la révision du taux des taxes et contributions versées pour les médicaments et les dispositifs médicaux ou, le cas échéant, par une revalorisation de la subvention de l'État ?

La loi « Hôpital, patients, santé, territoires » a confié de nouvelles missions au Centre national de gestion – la rémunération des professionnels en surnombre, la gestion statutaire des directeurs de soins et la rémunération des congés spéciaux des personnels de direction –, sans que le budget présenté pour 2010 n'en tire les conséquences financières. J'appelle donc votre attention, madame la ministre, sur les contraintes budgétaires et en effectifs qui pèseront sur le Centre l'an prochain ; des mesures seront-elles prises pour répondre à des difficultés prévisibles ?

Le nouveau plan Cancer annoncé par le Président de la République le 2 novembre dernier devrait mobiliser quelque 750 millions d'euros de dépenses supplémentaires pendant la période 2009-2013. On constate toutefois que l'effort portera principalement sur le volet « soins », le développement des programmes de dépistage et la recherche sur le cancer. Eu égard à l'importance des risques comportementaux et environnementaux sur le développement des cancers, ne faudrait-il pas consacrer des moyens plus importants à la prévention primaire ? Enfin, quelles sont les mesures nouvelles de ce plan destinées à lutter contre les inégalités de santé, préoccupation majeure du Président de la République ?

Toujours en matière budgétaire, je salue l'effort qui sera consenti en 2010 pour l'aide médicale de l'État – l'AME -, avec une dotation augmentée de 45 millions et qui s'élèvera à 481 millions d'euros. Cela étant, cette revalorisation ne permettra pas de régler le problème de la dette accumulée à l'égard des établissements au titre de l'AME depuis le dernier apurement, intervenu en décembre 2008. Sauf mesures prises dans le collectif budgétaire, cette dette atteindra près de 320 millions d'euros en 2010. Madame la ministre, le règlement de cette dette de l'État interviendra-t-il prochainement ?

J'en viens à la recomposition du paysage des agences sanitaires. La fusion programmée de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments – l'AFSSA – et de Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail – l'AFSSET – devrait être opérationnelle au début de l'été 2010. Pourriez-vous, madame la ministre, nous faire part de l'état d'avancement de ce projet de fusion ? Avant que le principe n'en soit posé par la loi « Hôpital, patients, santé, territoires », le ministre du budget avait annoncé ce rapprochement, préconisé dans le cadre de la révision générale des politiques publiques. Vous savez, madame la ministre, les inquiétudes que cette annonce a suscitées auprès d'un certain nombre d'associations, qui craignent de voir remises en question la qualité de l'expertise ainsi que l'approche contradictoire et ouverte sur la société privilégiée par l'AFSSET. La naissance de cette nouvelle agence, que l'AFSSA dominera largement de par son budget et ses effectifs, peut également laisser craindre la relégation au second plan de la santé au travail, alors qu'elle devrait garder un rôle prééminent dans la mise en oeuvre des plans Santé au travail affichés par le Gouvernement. Qu'en sera-t-il ?

Ma troisième série de questions porte sur le financement et les modalités de la lutte contre la pandémie de grippe A.

En ce qui concerne la contribution exceptionnelle demandée aux organismes complémentaires pour financer la campagne de vaccination contre la grippe A, quel schéma privilégiez-vous ? Cette contribution, de l'ordre de 300 millions d'euros, ira-t-elle à l'assurance maladie ou à l'EPRUS ? Autrement dit, soulagera-t-elle l'effort de la sécurité sociale ou de l'État ?

La participation des organismes complémentaires – qui s'explique par l'impossibilité de procéder selon les modalités de remboursement classiques au cours de cette campagne de vaccination collective – est censée couvrir le ticket modérateur à deux titres : la rémunération des professionnels de santé chargés d'assurer la vaccination, et une partie de la prise en charge au titre du vaccin. Aussi, ne devrait-elle pas être répartie, à parité, entre l'État et l'assurance maladie ?

J'en viens à la lutte proprement dite contre la pandémie. La préoccupation est bien entendu de faire participer le plus possible les professionnels de santé, mais aussi les assurés sociaux en général à la campagne de vaccination que vous avez décidée, guidée en cela par une recommandation de la HAS. Or, selon les conclusions d'un sondage réalisé par l'IFOP, 82 % des personnes interrogées n'envisageaient pas, le 24 octobre, de se faire vacciner contre la grippe A. Une proportion élevée qu'explique peut-être pour partie un certain manque de précisions à ce sujet. Il y a un mois, les personnes interrogées étaient pour 55 % dans cet état d'esprit ; leur proportion s'est donc singulièrement accrue. De même, 16 % des sondés se disaient inquiets de la grippe A fin octobre, contre 32 % un mois plus tôt. C'est pourtant une stratégie de vaccination de masse qui a été décidée.

À ce sujet, je tiens à souligner qu'au cours du contrôle sur pièces et sur place que j'ai effectué à l'EPRUS la semaine dernière, il est apparu que, compte tenu de l'application du taux de TVA à 5,5 %, le coût d'acquisition des vaccins sera finalement de 712 millions et non de 808 millions comme annoncé initialement. Je n'ai pas de remarque à faire sur la régularité de la procédure menée par l'EPRUS ; un tel contrôle relèverait d'ailleurs davantage de la Cour des comptes.

Néanmoins, pour ce qui est de la commande passée à l'EPRUS par votre ministère, je souhaite connaître les raisons qui conduisent à limiter de manière exceptionnellement étroite la responsabilité des laboratoires pharmaceutiques. En effet, l'article L. 3131-3 du code de la santé publique exclut la responsabilité du fabricant pour des utilisations en dehors des indications thérapeutiques ou des conditions normales d'utilisation. Or, l'article 24 du contrat conclu avec le laboratoire Baxter, que nous connaissons à présent dans son entier, prévoit que la garantie de l'État s'applique « contre toute réclamation ou action judiciaire élevée dans le cadre des opérations de vaccination ». Pourquoi l'engagement de la responsabilité de l'État va-t-il plus loin que les dispositions prévues par le code de la santé publique pour la production de ce qui n'est après tout qu'un vaccin contre une grippe ?

Par ailleurs, l'article 7 de ce même contrat, consacré à la garantie de la qualité du vaccin, est juridiquement peu compréhensible. Je souhaite, madame la ministre, connaître l'exacte interprétation que vous en faites.

Enfin, la prise de responsabilité maximale par l'État n'aurait-elle pas justifié une pression sur le coût unitaire des vaccins, compte tenu des spécificités propres à la production par chacun des laboratoires ? Je me permets de rappeler que ce coût est significativement plus élevé que le coût unitaire d'une dose de vaccin contre la grippe saisonnière.

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