C'est pourquoi je veux réaffirmer sans détour la nécessité d'un désarmement nucléaire multilatéral. La France devrait oeuvrer à la dissolution des blocs militaires et à la dénucléarisation progressive, contrôlée et universelle, tout en mettant en place un système global de sécurité collective dans le cadre d'un règlement politique des conflits.
Quant au nouveau concept de sécurité globale, il s'agit d'une paranoïa soigneusement entretenue. Comme nous n'avons de cesse de le dénoncer, les changements institutionnels et de doctrine mélangent les concepts de défense et de sécurité nationale, installant un climat de guerre larvée. Il s'agit d'une vision purement militaire de la sécurité qui ouvre la voie à l'intervention de l'armée dans les missions d'ordre public. Cela est particulièrement dangereux pour les libertés publiques, tout comme le sont les réformes prévues du code de procédure pénale.
Le droit de chaque citoyen d'être informé s'accommode mal avec la réforme de la protection du secret défense. Celle-ci va dans le sens d'une restriction des marges de manoeuvres des magistrats instructeurs, surplombés dans leur action par la commission consultative du secret défense, dont les prérogatives seront renforcées.
Le code pénal élargirait le périmètre des atteintes au secret défense et les peines encourues seraient aggravées. La LPM contient aussi la création de l'appellation « lieux classifiés », échappant au droit commun. Ces changements sont inacceptables et largement dénoncés par les professionnels du droit. Même la commission des lois s'oppose au projet en l'état !
En revanche, le Président de la République s'arroge le droit de tout savoir. La création, en cas de crise, d'une fonction de coordination du renseignement auprès de lui, le conseil national du renseignement, dénote une dérive outrancière : même aux États-Unis, le Président n'a pas directement la main sur le renseignement ! En outre, la codification des attributions des membres du Gouvernement est réalisée dans l'obsession de la menace permanente de risques divers, réels ou supposés, et d'atteintes aux intérêts de la nation, à même de justifier une frénésie sécuritaire.
Pour couronner le tout, suite à la réintégration de la France dans le commandement intégré de l'OTAN, l'esprit guerrier atlantiste est érigé en doctrine officielle. On peut lire avec effroi que « le risque d'implication de notre pays et des pays européens ou alliés dans une guerre interétatique ne peut être exclu à l'horizon de quinze ans. » Attention, le gâchis humain n'a jamais été aussi proche !
Notre intégration dans l'OTAN va non seulement nuire à notre souveraineté, mais aussi augmenter « les sollicitations sur les théâtres extérieurs » – c'est écrit noir sur blanc, et on pense, en premier lieu, à l'Afghanistan. Actuellement, le président américain Obama déclare vouloir intensifier la guerre dans ce pays où massacres et les bavures se poursuivent à un rythme effréné. Le régime afghan a introduit la charia dans la Constitution et a légalisé le viol des femmes par leurs maris… Un grand bond en avant, décidément !
En fait, la République islamique d'Afghanistan, dont le sous-sol regorge de ressources naturelles, est devenue un eldorado prisé des investisseurs. Au-delà, le but réel de l'occupation est d'encercler la Russie et la Chine pour préparer un possible conflit, tout en contrôlant les routes du pétrole et du gaz de l'Asie centrale ex-soviétique. Voilà les vraies raisons de notre présence en Afghanistan, que la LPM entend conforter. Nous reprenons à bon compte les visées hégémoniques des États-Unis, au motif que la population serait exposée au terrorisme d'inspiration djihadiste.
Nicolas Sarkozy, pour sa part, aurait bien voulu participer à la guerre impérialiste en Irak. À présent, il enjoint aux entreprises françaises de venir investir dans ce pays comme des vautours !
La France a aussi franchi un cap stratégique en inaugurant la base militaire d'Abou Dhabi, face à l'Iran, souscrivant ainsi officiellement au rôle de sous-traitante des États-Unis dans la défense occidentale du golfe arabo-persique. Il s'agit de la première base française créée à l'étranger depuis la fin de l'ère coloniale, dans les années soixante.