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Intervention de Jean-Jacques Urvoas

Réunion du 29 juin 2009 à 21h30
Lutte contre les violences de groupes — Article 1er, amendements 33 34

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Urvoas :

Mme la ministre nous dit qu'il ne s'agit pas de fournir un nouvel outil aux policiers, mais aux magistrats, qui pourront désormais poursuivre – ce qui ne leur serait pas permis actuellement en raison d'un vide juridique. J'ai participé aux auditions des magistrats organisées par le rapporteur, M. Estrosi : le procureur de Bobigny, l'Union syndicale des magistrats et le Syndicat de la magistrature ; j'ai également assisté à l'audition de M. Alain Bauer, président du conseil d'orientation de l'observatoire national de la délinquance.

Je veux vous faire trois citations issues de ces auditions – étant précisé que je tiens à votre disposition l'intégralité des dépositions concernées. Alain Bauer souligne le fait que « la rédaction du texte peut susciter de légitimes interrogations sur les difficultés judiciaires quant à son application. Pour les magistrats du parquet, la recherche de preuves ne va pas aller sans poser de sérieuses difficultés ».

Le président du Syndicat de la magistrature, Christophe Régnard, insiste sur le fait que « la difficulté inhérente à ce type d'incrimination est celle de la preuve, s'agissant de poursuivre des actes préparatoires, et non un fait ou une tentative ». Le président de l'Union syndicale des magistrats conclut, lui, sur le caractère « aussi inutile qu'inapplicable des articles commentés ». Enfin, le Syndicat de la magistrature prédit que « l'appartenance à une bande sera quasiment impossible à démontrer ».

Le groupe socialiste souhaite rendre ce texte le plus efficace possible. À cette fin, nous vous proposons de remplacer une définition dont vous n'arriverez pas à nous convaincre qu'elle est claire et précise, et qui ne sera pas plus utilisée par les magistrats que le délit d'embuscade – lequel a permis très peu de condamnations, comme le reconnaît Mme Dati.

Nous vous suggérons donc de vous référer à une jurisprudence parfaitement claire et bien plus opérationnelle sur la définition de coauteur qui remonte à un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 17 décembre 1859.

J'ajouterai un dernier élément pour appeler au soutien de notre thèse. Philippe Bilger, avocat général, qui n'est pas en opposition avec la philosophie que vous voulez poursuivre, évoque sur son blog du 19 mars 2009, que je vous invite à lire, ce type d'élément et précise, s'agissant de l'infraction, que : « Les avocats auront beau jeu […] de la tailler en pièces quand elle est retenue seule, ce qui est tout de même assez rare. » Ce n'est pas moi qui le dis, mais un avocat général ! Je peux comprendre que vous contestiez les arguments de l'opposition. Je vous demande tout de même d'être attentifs au fait que plusieurs notions – telles que le groupement, voire le groupement temporaire également visé par ce texte – ne sont pas claires au regard du droit. Les magistrats devront ainsi nous expliquer ce qu'est un groupement. J'entends bien Éric Ciotti lorsqu'il précise qu'il faut qu'il y ait un but ; mais qui doit poursuivre le but ? Est-ce le groupement lui-même qui est capable d'avoir une volonté propre distincte des membres qui composent le groupe, ou est-ce le but visé par chacun des membres du groupe ? Je n'ergote pas. Les magistrats seront, demain, confrontés à ce problème quand ils devront se prononcer sur la base du texte que vous voulez voter.

Je propose la substitution de la jurisprudence de la Cour de cassation.

La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir l'amendement n° 34 .

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