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Intervention de Jacqueline Fraysse

Réunion du 19 décembre 2011 à 21h30
Renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacqueline Fraysse :

Vous avez, de surcroît, renvoyé à un décret le soin de fixer les conditions d'application de cet article.

Autre exemple, l'indépendance des experts : elle aurait dû être le pivot d'un projet de loi prétendant préserver la chaîne du médicament des influences économiques et industrielles. Car c'est bien par les experts que les laboratoires influencent les décisions de la Haute Autorité de santé et de l'agence sanitaire, comme l'a montré le scandale du Mediator et comme le montre, a contrario, la récente décision de la Haute Autorité de santé de revoir fortement à la baisse l'efficacité des médicaments anti-Alzheimer. Pour ce faire, la HAS s'est appuyée sur des experts totalement indépendants des firmes pharmaceutiques, ce qui a permis de battre en brèche une précédente évaluation de 2007.

Cela prouve, d'abord, qu'il existe des experts indépendants, et ensuite, que l'on n'a pas besoin d'aller les chercher « sur la planète Mars », contrairement à ce qu'affirme le ministre avec unepointe de mépris pour la recherche universitaire française, ce qui n'est pas acceptable.

Distinguer, comme vous le faites, entre liens d'intérêts et conflits d'intérêts pour admettre les premiers et proscrire les seconds est un jeu dangereux. Bien sûr, il n'y a pas obligatoirement conflit d'intérêts dès qu'il y a lien d'intérêts. Mais où placer le curseur ? Êtes-vous certain de pouvoir déterminer quand un simple lien d'intérêt, fût-il indirect – par exemple par conjoint interposé –, peut engendrer un conflit d'intérêts ? On voit bien que la frontière est ténue.

Le doute s'installe encore plus fortement sur vos intentions lorsque vous renoncez à la transparence totale, que vous annonciez pourtant il y a un an, en refusant de rendre publiques l'ensemble des conventions passées par les industriels du médicament ainsi que de centraliser ces informations sur un site internet unique, ou encore lorsque vous refusez d'interdire les pratiques d'hospitalité envers des étudiants en médecine.

Nous considérons au contraire que, pour restaurer la confiance dans la chaîne du médicament, il est nécessaire de rompre tous les liens entre ceuxqui produisent les médicaments et ceux qui les évaluent. Cela passe sans aucun doute par la création d'un corps d'experts indépendants, que vous persistez malheureusement à refuser.

Mon dernier exemple concerne les accidents médicamenteux et le droit des victimes.

Chaque année, les accidents médicamenteux causent 140 000 hospitalisations et sont responsables de 13 000 victimes. À titre de comparaison, l'insécurité routière fait moins de 4 000 victimes par an en France et la drogue moins de 300. Il faut donc bien mesurer que, si les médicaments soignent, ils peuvent également tuer, et dans de larges proportions. Nous sommes par conséquent face à un véritable problème de santé publique, mais également d'indemnisation des victimes.

C'est pourquoi je regrette que vous ayez refusé de renforcer le droit des victimes en rejetant nos amendements visant notamment à inscrire dans la loi la possibilité d'initier des actions de groupe. C'est compliqué, avez-vous dit à l'instant. Je ne vois pas en quoi. Je crois plutôt que vous ne les souhaitez pas, que même, comme les laboratoires sans doute, vous les redoutez.

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