Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Burhan Ghalioun

Réunion du 12 octobre 2011 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Burhan Ghalioun, président du Conseil national syrien :

Je voudrais tout d'abord m'excuser de mon retard. Nous préférons le terme de sécularisme à celui de laïcité, parce que dans la culture politique arabe, syrienne notamment, celui-ci est trop attaché au modèle français, c'est-à-dire à un État perçu essentiellement comme anticlérical et antireligieux. Depuis le début du soulèvement, tout le monde, y compris les islamistes, a adopté l'expression d'État civil, qui fait l'objet d'un consensus inconscient et désigne un État séculier, sans attache religieuse particulière et neutre à l'égard des convictions religieuses et politiques. Cela constitue une grande réussite et montre l'évolution des mentalités depuis quelques années.

Entre l'intervention militaire, qui nous est interdite jusqu'ici – à la fois du côté du Conseil de sécurité et d'une grande partie de l'opinion publique – et l'immobilisme, il existe d'autres voies. Je suis en faveur d'un élargissement des sanctions pour toucher davantage les hommes d'affaires finançant les escadrons de la mort et la répression, notamment le responsable de la chambre de commerce.

Par ailleurs, une action politique collective de la communauté internationale, telle une conférence internationale sur la répression sévissant en Syrie, pourrait être utile. De même, j'espère, dans quelques temps, une reconnaissance officielle par l'Union européenne du CNS qui pourrait constituer un acte politique de première importance, susceptible de faire pression sur le régime et de conduire à son isolement.

La révolution actuelle couvre l'ensemble du pays, hormis quelques quartiers centraux d'Alep, qui font l'objet d'un quadrillage plus important et sont occupés par une classe bourgeoise ayant profité, lors des dernières années, de l'ouverture vers la Turquie ou d'autres pays. Ces quartiers ne sauraient tenir en otage tout un peuple ! Dans toutes les villes et les villages, la contestation s'étend, malgré une répression sans merci.

La révolte a commencé, dans la foulée du printemps arabe, par un petit événement : des enfants de dix à quatorze ans ont écrit sur les murs de Deraa, une ville du sud de la Syrie, « À bas le régime ! », répétant ce qui avait été fait en Égypte et en Tunisie. Quinze ont été arrêtés et torturés, et aux parents qui sont venus demander leur libération, le préfet, qui est de la famille du président de la République, a répondu : « il faut les oublier, vous n'avez plus d'enfants, et si vous tenez à en avoir d'autres, envoyez-nous vos femmes et on va vous en faire ! ». Le lendemain, toute la ville est descendue dans la rue…

Cela témoigne de tout un style de gouvernement, qui n'accepte que la soumission, utilise tous les moyens pour terroriser la population et agit de façon totalement arbitraire, au mépris de toute règle de droit.

Le peuple se révolte parce qu'il ne peut plus accepter d'être traité en esclave par la terreur et l'humiliation – d'où les slogans les plus importants du mouvement : « Dignité » et « Liberté ». Sans espoir ni existence politique, il s'est lancé dans cette révolution, de façon définitive.

On assiste aujourd'hui à une escalade dans la violence et la répression ainsi que dans la détermination du peuple syrien à aller de l'avant.

Quant au Liban, il est très sensible à ce qui se passe en Syrie. Si le régime syrien disparaît, comme je l'espère, certaines forces politiques seront confortées et le Hezbollah verra son influence limitée, voire marginalisée. Beaucoup d'échanges existent entre Syriens et Libanais et on trouvera toujours les moyens de maîtriser la situation et d'éviter la guerre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion