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Intervention de Jean-Luc Hees

Réunion du 14 décembre 2011 à 9h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Jean-Luc Hees, président de Radio France :

Je me félicite de l'intérêt pour Radio France dont témoignent vos nombreuses questions.

En ce qui concerne RFI, nous sommes tous très attachés à cette radio. J'y ai travaillé, c'est une radio qui pendant un temps a fait partie de Radio France, j'ai beaucoup de respect pour le travail qui y est accompli dans des conditions parfois difficiles.

Pour autant, je suis tenu à un devoir de réserve et il ne m'appartient pas de commenter les décisions prises par les autorités de tutelle de RFI, notamment sur la fusion entre RFI et France 24.

Je préciserai simplement que lorsque nous avons pris en charge le chantier de la Maison de la Radio, « la messe étant dite », nous avons été obligés d'assumer les conséquences de décisions qui ne nous concernaient pas directement. Lorsque l'on nous a annoncé que RFI allait déménager, nous en avons pris acte. Dans le « phasage » du chantier, nous avons intégré cette perspective. Or le déménagement de RFI a été compliqué par de nombreux décalages, ce qui complique la gestion du calendrier de réhabilitation de la Maison de la Radio. Aux dernières nouvelles, le déménagement de RFI interviendrait à la fin du premier semestre 2012. Pour ce qui me concerne, je m'efforce de m'adapter à toutes les situations et décisions prises, comme c'est mon devoir. Je ne fais pas de politique ; c'est votre rôle, mesdames et messieurs les députés. Je ne peux envisager ce dossier qu'en tant que « déménageur », même si je ne retire rien à ce que j'ai dit sur la fusion entre la télévision et la radio.

S'agissant de la radio numérique terrestre, son déploiement est compliqué pour des raisons financières. Les Français ont en moyenne six transistors, placés partout dans leur maison, et vivent encore dans l'univers de l'analogique.

Mais les choses peuvent évoluer très vite, comme on l'a vu dans le domaine du téléphone portable. En Allemagne, un million de récepteurs numériques ont été vendus en trois mois alors que le marché était inexistant puisqu'il n'y avait pas de radio numérique. L'argument du coût de l'équipement est donc fallacieux. Si un fabricant astucieux de récepteur numérique propose un bel objet, à l'image de l'iPhone, il en vendra sans aucun doute. Il s'agit là de politique industrielle et de politique tarifaire. En Allemagne, on peut trouver des récepteurs entre 40 et 500 euros.

Les difficultés résident plutôt dans l'attitude des éditeurs de radios, qui, pour certains, défendent des positions différentes selon qu'ils se trouvent à Paris, à Bruxelles ou à Berlin.

À cela s'ajoutent des difficultés de financement : nos frais de diffusion pour la FM s'élèvent à environ 80 millions d'euros. Nous avons fait réaliser une étude qui montre que ces frais peuvent être diminués de moitié grâce à la radio numérique terrestre. Mais la double diffusion pendant plusieurs mois en numérique et en analogique occasionnerait nécessairement des surcoûts, sauf à imaginer un basculement général vers le numérique comme ce fut le cas pour la télévision numérique terrestre. Mais la TNT a toujours été associée à une offre de services supplémentaires. La RNT n'a jamais été présentée de cette façon, ce qui est d'ailleurs une erreur.

Si on se penche attentivement sur la question, et c'est le travail de M. Joël Ronez, directeur des nouveaux médias, entre la radio sur internet ou sur iP, que l'on nous vante tant et qui va se développer, et les produits et services que l'on pourrait offrir sur la RNT, il y a peut être plus de complémentarité que ce que l'on peut imaginer.

Nous avons toujours peur de la dégradation de la qualité de notre service. On le voit avec le développement des téléphones, où développement et qualité de services ne vont pas toujours de pair. Cependant, nous ne sommes pas pour ou contre la radio sur iP, cela n'aurait pas de sens ; cela vaudrait la peine de réfléchir aux opportunités que pourrait offrir l'investissement que requiert la RNT.

S'agissant de la norme, je rappellerai que Radio France est à l'origine de la norme DAB+ dans le début des années 1980. Je souhaiterais que nous puissions continuer à être pionniers. Tout le monde s'intéresse à la norme DAB+ car elle est moins coûteuse. Cela pose quelques difficultés à un groupe comme le nôtre car nous avons un multiplexe de diffusion, et nous souhaitons rester indépendants à l'intérieur de ce dernier. Accueillir d'autres opérateurs dans ce multiplexe nous apparaît problématique, même si cette considération ne fait pas partie des critères en fonction desquels le CSA a vocation à se déterminer.

En ce qui concerne Le Mouv', nous ne sommes pas parisianistes. S'agissant d'une radio nationale, qui au demeurant manque de fréquences, il est indispensable d'être situé là où l'actualité culturelle, l'information et les débats se concentrent. Depuis l'installation du Mouv' à Paris, nous accueillons beaucoup plus d'artistes, de personnalités politiques…

J'ai été interrogé sur la convention collective : dans les textes qui ont été présentés au personnel de Radio France, nous avons effectivement fait des choix. De mon point de vue, le paritarisme a freiné certaines carrières à Radio France. Or le mérite doit compter, et j'estime que c'est l'une des responsabilités attachées aux fonctions de direction que de pouvoir gérer la promotion des personnels. C'est d'autant plus vrai dans une maison où la réactivité et le talent revêtent une particulière importance, même si l'autogestion a sans doute des vertus. Je peux me tromper, mais j'ai l'impression qu'une bonne partie des personnels de Radio France partage cette façon de voir.

S'agissant des risques psychosociaux, des études sont en cours, et leur vertu pédagogique est indéniable et indispensable. Chacun doit être sensibilisé sur ces risques, que l'on a tendance à minimiser.

Par ailleurs, j'ai été interrogé sur le label « PUR », qui est sans doute intéressant, mais ma priorité est actuellement le label « diversité ». Il s'agit d'un très gros chantier, pour lequel la bonne volonté ne suffit pas. Nous avons d'ores et déjà de bons résultats, dont je m'enorgueillis, mais nous devons poursuivre nos efforts, notamment à l'égard des femmes.

En ce qui concerne l'auditorium, c'est un chantier que j'ai trouvé à mon arrivée, mais je me suis mis à l'aimer. Nous avons quatre formations musicales et nous sommes en résidence un peu partout, d'autant que nous n'avons plus la possibilité de faire de la musique à la Maison de la Radio. Nous avons besoin de faire résonner nos formations musicales, et nous nous sommes demandés comment assurer la meilleure exploitation possible de cet auditorium, qui sera un magnifique instrument et qui donnera du prestige à nos formations. L'exploitation peut d'ailleurs aller bien au-delà de la musique, et j'ai tout de même un petit regret lié au choix d'un auditorium purement symphonique. Son ouverture est prévue le 19 décembre 2013.

S'agissant des coûts d'exploitation, je rappelle que nous avions deux studios à la Maison de la Radio, le 104, qui est en rénovation et va poursuivre son activité, et le 103 qui était un lieu de répétition. Une équipe est en train de se constituer qui va construire une programmation en fonction de cet outil, sans concurrencer la Philharmonie de Paris ou d'autres. Cela suppose une autre ambition pour la programmation de nos grands studios.

Concernant les ressources propres, la publicité représente 7 % du budget et Radio France a pu améliorer ses performances, grâce aux succès de ses antennes, ce qui nous permet de mieux négocier nos tarifs publicitaires. Nous suivons toutefois une ligne de conduite absolue, celle de « l'espace préservé » : les antennes du service public ne doivent pas devenir des réservoirs à publicité et nous n'entendons pas bouleverser l'équilibre économique des autres médias.

Les podcasts représentent le meilleur point d'entrée pour accéder à nos programmes et nos offres culturelles. Ainsi, les sites de France Culture et du Mouv' sont des vecteurs privilégiés pour faire connaître ces radios auprès du grand public.

Concernant Le Mouv', les audiences ne sont pas encore au rendez-vous et je l'assume, mais il s'agit d'un beau produit à l'intention d'un public qui le mérite. Je ne doute pas que le succès couronnera cette réalisation si la qualité est là. J'ai pu constater à cette occasion qu'il est plus facile de faire naître une radio que d'en faire renaître une. Il existe dans les équipes un esprit nouveau qui privilégie l'alliance de l'information et du programme. Je suis très optimiste en ce qui concerne les futures performances de cette radio.

Au sujet de la couverture offerte par France Bleu, il n'existe aucune raison pour que seuls les trois quarts du territoire national aient accès à cette radio. France Inter et France Bleu ont une mission de service public d'information de tous les Français en situation de crise grave et pour l'exercer, elles doivent avoir accès aux fréquences, même si je suis conscient que ce type de ressource est devenu un bien rare. Pour France Inter, qui couvre 95 % du territoire, le problème ne se pose pas. Tel n'est pas le cas pour France Bleu. Je compte introduire un recours devant le Conseil d'État suite à une récente décision du CSA refusant des fréquences à France Bleu. La RNT pourrait d'ailleurs permettre de remédier à cette pénurie.

Pour ce qui est du « coup de rabot » budgétaire, il m'a été reproché d'avoir pris acte de cette mesure d'économies avant même l'examen de celle-ci par le Sénat. J'ai agi avec la rapidité qui convient à un chef d'entreprise en annulant une tournée de l'orchestre national à Rio de Janeiro, dont les motivations profondes ne m'apparaissaient pas évidentes. Je n'ai aucun regret à ce sujet.

Je ne peux pas contrôler les accents régionaux des animateurs sur tout le réseau. Je suis normand, j'ignore si j'ai un accent, mais je n'ai pas la volonté d'imposer l'accent francilien sur toutes les antennes. Qu'il me suffise de dire à ce propos que j'ai couru toute ma vie après Jean-Michel Apathie pour qu'il travaille à France Inter…

Concernant Saint-Étienne, nous espérons que cette nouvelle antenne pourra ouvrir avant la fin de l'année 2012. Mais une telle création nécessite des redéploiements, en fonction des bassins d'audience. Ce mot n'est plus tabou aujourd'hui, les esprits évoluent dans la bonne direction, et tout ceci s'opère dans la concertation.

Au sujet de la négociation avec les sociétés d'auteurs, elle est quasiment achevée avec les éditeurs de musique. Avec la SACEM, nous avons obtenu de bons accords. Pour les éditeurs de musique, la négociation est conduite dans un cadre international et se révèle plus compliquée, avec de nombreux avocats spécialisés comme interlocuteurs.

Enfin, pour ce qui est de la politique du personnel, Radio France continue à embaucher tout en respectant scrupuleusement les indicateurs prévus dans le COM et, grâce à son Académie et une politique de formation particulièrement active, elle intègre mieux ses salariés. Radio France est attachée au principe de diversité et a par exemple, depuis quelques années, une convention avec un lycée de Seine-Saint-Denis axée sur l'intégration d'apprentis-techniciens.

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