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Intervention de Catherine Morel

Réunion du 1er décembre 2011 à 9h00
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Catherine Morel, vice-présidente de l'Union nationale des pharmacies de France :

Je veux intervenir en tant qu'actrice de terrain puisque, depuis trente ans, je m'efforce de collaborer avec les travailleurs sociaux, les médecins et les patients.

Les pharmaciens d'officine constituent le premier réseau de professionnels à l'écoute des patients, même si ce réseau est parfois méprisé par l'administration. Par leur action quotidienne, ils assurent une prévention individuelle. En amont du diagnostic, l'officine est souvent l'antichambre du cabinet médical : sans jamais faire de diagnostic, nous expliquons les comptes rendus d'analyses biologiques et, le cas échéant, nous efforçons d'en dédramatiser les résultats afin de préparer au mieux la consultation.

En aval, le pharmacien peut être, passez-moi l'image, le morceau de sucre qui adoucit la médecine, notamment lors de l'annonce d'une pathologie lourde. L'officine est souvent le lieu où la parole se libère, non seulement celle des patients mais aussi celle des aidants. Dans mon département, qui connaît une recrudescence des cancers, c'est souvent au sein même des officines que la souffrance morale des familles s'exprime. Les pharmaciens contribuent à la recherche de solutions pour permettre aux proches de mieux accompagner le malade – ce en concertation avec le médecin traitant s'il s'agit, par exemple, de ménager une pause dans l'activité professionnelle d'un parent.

Ce réseau informel de proximité, pour autant qu'il repose sur le respect de chaque intervenant et de ses compétences – car c'est ainsi que l'on prévient tout conflit –, est celui qui se révèle être le plus utile au patient.

L'intervention des pharmaciens dans des actions collectives s'explique, à l'origine, par le constat de dysfonctionnements. On peut à cet égard citer quatre principaux domaines : la psychiatrie, l'addictologie, la gériatrie et les petites urgences – que nous essayons de gérer afin de décharger les hôpitaux. Afin d'assurer ces missions au mieux et de façon pérenne, les pharmaciens ont besoin de moyens financiers. Imagine-t-on de changer de médecin traitant tous les deux ou trois ans ? La prévention suppose une relation de confiance et de dialogue dans la durée ; or, sur ce point, la situation des pharmaciens d'officine est gravement compromise.

La prévention devrait à mes yeux constituer une orientation prioritaire des politiques de santé publique. Je comprends mal les opérations des groupes de pression, les conflits de pouvoir et autres chevauchements de structures. Il est difficile de se repérer dans la multiplicité des thèmes : quelques actions prioritaires, décidées au niveau national, seraient assurément plus efficaces.

Je m'étonne par exemple que le plan Cancer, pour lequel plusieurs structures interviennent, ne mette pas prioritairement l'accent sur la prévention du tabagisme, mis en cause dans toutes les pathologies, que ce soit les cancers, les maladies cardiovasculaires ou les broncho-pneumopathies chroniques obstructives. Où est l'action de l'État en la matière ?

Les pharmaciens sont, comme les autres professionnels de santé, déroutés par le grand nombre d'intervenants, par le jargon trop fréquent et par la complexité des procédures. J'avais imaginé un guichet unique, mais il présenterait l'inconvénient de méconnaître les priorités sanitaires spécifiques à chaque territoire, lequel doit se voir accorder une marge de manoeuvre sur le fondement des données fournies par les observatoires régionaux de santé.

Le ministère de la santé avait décidé que 2011 serait l'année des patients et de leurs droits ; la semaine dernière était consacrée à la sécurité, avec trois thèmes prioritaires : « Bien utiliser les médicaments » ; « Comprendre les indicateurs de qualité » ; « Agir sur les actions à risques ». Qui en a entendu parler ? Personne. C'était pourtant l'occasion d'informer les patients dans les officines, dans les cabinets médicaux et dans l'ensemble des structures publiques et parapubliques.

L'Union nationale des pharmacies de France aimerait que les pharmaciens soient associés aux campagnes de prévention ou aux projets dès leur élaboration, et pas seulement pour apporter leur soutien a posteriori, comme ce fut le cas avec le programme Sophia.

Les pharmaciens souhaitent aussi être rémunérés lorsqu'ils interviennent dans ces campagnes de prévention, ce que tous leurs interlocuteurs font dans le cadre de leur activité professionnelle : les pharmaciens sont les seuls, lors de ces campagnes, à devoir mettre leur activité entre parenthèses. L'absence de rémunération est un mauvais signal adressé à nos interlocuteurs ; peut-être contribue-t-elle aussi à déresponsabiliser certains professionnels de santé.

Les campagnes de prévention doivent être plus simples, et leurs objectifs hiérarchisés. L'État doit affirmer explicitement que la santé est sa première préoccupation.

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