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Intervention de Jean-Pierre Balligand

Réunion du 23 novembre 2011 à 17h00
Commission d'enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Balligand :

Ma question s'adresse au directeur du Trésor, car je doute qu'il soit pertinent d'interpeller la DGCL et la DGFiP sur ces questions. Mes propos vont sembler hérétiques à nombre de mes collègues. Mais s'il y a défaillance dans cette affaire, elle est en effet liée au risque systémique qui découle du phénomène suivant : des prêts bancaires ont été consentis à des taux beaucoup trop bas, et partant, à des taux d'intermédiation bancaire infimes, du fait d'une bataille colossale entre banquiers pour se garder des parts de marché. Depuis que les règles de Bâle III obligent ces banquiers à provisionner, tout le monde fuit, parce que les prêts aux collectivités locales n'ont plus aucun intérêt par rapport aux autres prêts. Mais à l'époque, dans les grandes collectivités, il n'y avait aucun lieu de donner l'alerte au moment de la signature du contrat puisque les taux étaient très bas, très inférieurs à ceux des prêts classiques que les petites collectivités, elles, avaient l'habitude de souscrire. Le conseil général que je présidais avait 15 à 17 % de prêts structurés parmi ses emprunts, parce qu'il y gagnait de l'argent. En revanche, Vervins, la commune de 3 000 habitants dont je suis le maire, souscrit depuis plus de dix-sept ans des prêts à taux fixe : lorsque les taux sont bas, on est prêt à payer 0,4 % de plus pour s'épargner des ennuis quand on n'a ni cadre A ni directeur financier pour piloter les opérations.

À l'avenir – car que faire du passé ? –, il nous faudra absolument un dispositif permettant d'apprécier le risque systémique. Car c'est bien de cela qu'il s'agissait : il n'est pas normal que les banquiers prêtent de l'argent pour rien. Il faut bien qu'ils s'y retrouvent ! Lorsque j'ai découvert la structure des prêts qui avaient été contractés par Laval ou par Saint-Étienne, au moment où mes collègues y ont été élus, j'ai été effaré ; puis j'ai pris connaissance du taux consenti à l'époque de la signature et des différés de paiement accordés, totalement inédits à mes yeux malgré mon expérience. Qu'ils soient de droite ou de gauche, des responsables de collectivités ont réalisé des travaux un an et demi avant le renouvellement des mandats, sans acquitter la moindre échéance : ils les laissaient à leur successeur !

La direction du Trésor – et la Commission bancaire – sont en cause parce que la supervision macro-financière, qui aurait permis de déceler le risque systémique, a manqué. Loin de moi l'intention de dédouaner les banquiers. Mais à la date de la signature du contrat, le risque était nul et les conditions très intéressantes ; quelques années plus tard, parce que le contexte global a entièrement changé, le système bascule. Il faut en tirer les leçons.

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