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Intervention de Benoist Apparu

Réunion du 1er décembre 2011 à 15h00
Encadrement des prix des produits alimentaires — Discussion d'une proposition de loi

Benoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, madame et messieurs les députés, je vous prie de bien vouloir excuser le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire, M. Bruno Le Maire, qui se trouve actuellement en déplacement avec le Président de la République à Toulon.

Monsieur le rapporteur, votre proposition de loi entend apporter des réponses à une vraie question, celle du juste partage de la valeur ajoutée au sein de nos filières alimentaires, au service de nos producteurs comme des consommateurs.

Il n'est pas normal qu'un kilo de fraises acheté 2,40 euros au producteur se retrouve à 6 euros sur les étals des supermarchés ; le Gouvernement vous rejoint sur ce constat. Il ne vous a d'ailleurs pas attendu pour faire du partage de la valeur ajoutée une priorité de son action. Nos réponses ne sont toutefois pas les mêmes que les vôtres.

Nous avons d'abord voulu introduire plus de transparence dans la filière.

La loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche a renforcé l'observatoire de la formation des prix et des marges pour lui donner les moyens de faire toute la vérité sur les prix et les marges à chaque étape de la production. Cela permet aux producteurs de bénéficier de plus d'informations sur les coûts de production des acteurs de leur filière plutôt que de devoir négocier leurs prix sans connaître la concurrence. L'observatoire a remis son premier rapport annuel en juin dernier. Nous veillons à ce que tous les acteurs jouent le jeu de la transparence, en particulier la grande distribution.

Pour assurer un meilleur partage de la valeur ajoutée, nous avons ensuite voulu qu'il y ait plus d'équité dans les relations commerciales

Cela passe par l'encadrement des pratiques de prix après vente et des promotions hors lieux de vente, et par l'interdiction des remises, rabais et ristournes. L'accord de modération des marges du 17 mai 2010 va également dans ce sens. C'est la première fois que la distribution prend un tel engagement ; c'est la première fois qu'elle doit rendre des comptes sur ses rapports avec la production et sur ses marges.

Cela passe aussi par l'accord du 3 mai 2011 dans la filière viande qui permet que les négociations sur les prix soient rouvertes en cas de variation excessive des prix de l'alimentation animale.

Pour un meilleur partage de la valeur ajoutée, nous avons également souhaité assurer plus de sécurité aux producteurs.

Tel est l'objectif des contrats. Nous croyons dans la contractualisation parce qu'il s'agit du seul moyen de donner de la visibilité, et donc de la prévisibilité, à l'ensemble des producteurs. M. Bruno Le Maire a déjà eu l'occasion de le dire dans cet hémicycle : les contrats ne sont évidemment pas une solution miracle, mais, dans un marché dominé par la loi de l'offre et de la demande, ils constituent une garantie de sécurité indispensable pour les agriculteurs.

Vous nous répondez que les contrats ne marchent pas. C'est faux ! Il y a quelques années, on prédisait qu'avec la concurrence de la Nouvelle-Zélande, la filière agneau était condamnée dans notre pays. Force est de constater que ce n'est pas le cas. La filière ovine se porte même plutôt très bien et, si elle n'a pas disparu aujourd'hui, c'est en grande partie grâce à l'organisation du secteur et à la mise en place de contrats de premier et de deuxième niveau. Voilà bien la preuve que le système des contrats marche.

Enfin, pour améliorer le partage de la valeur, il faut plus d'équilibre dans les négociations avec l'aval de la filière

La contractualisation n'a de sens qu'avec l'organisation des producteurs. Pour que les contrats soient justes et efficaces, il faut renverser le rapport de force entre les producteurs et l'aval de la filière. Que pèse en effet un producteur seul face aux industriels ? Si les producteurs veulent peser davantage par rapport à l'aval de la filière, il faut qu'ils s'organisent.

Les règles actuelles permettent déjà aux producteurs de se regrouper mais pas suffisamment. Prendre un nouveau décret n'apporterait cependant aucun droit supplémentaire. Il faut plutôt agir au niveau communautaire. La France a donc lancé des travaux pour modifier le droit de la concurrence européen, en particulier pour ce qui concerne le lait. Si ce « paquet lait » est voté, il permettra aux producteurs de se regrouper en organisations non commerciales, sans mandat de gestion, dans la limite où ils ne dépassent pas 3,5 % de la production laitière communautaire et un tiers de la production nationale. Pour la France, cela représente 5 millions de tonnes de lait sur une production nationale de 25 millions de tonnes, soit l'équivalent de la production de toute la Bretagne. Vous imaginez le poids commercial qu'aurait un tel regroupement face à la grande distribution.

La proposition de loi de aborde un autre grand problème : les prix alimentaires. Le Gouvernement a pris ce sujet à bras-le-corps et il considère que le texte d'André Chassaigne ne constitue pas la bonne réponse.

D'une part, cette proposition de loi méconnaît la réalité du marché.

Cette réalité est caractérisée par une concurrence mondiale et européenne de plus en plus farouche. Mais la France n'est pas une île, monsieur Chassaigne ! On ne peut pas définir systématiquement un coefficient multiplicateur et un prix plancher. Et l'on ne pourra pas empêcher la grande distribution d'aller s'approvisionner ailleurs, en Espagne ou au Maroc.

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