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Intervention de Claude Guéant

Réunion du 25 octobre 2011 à 21h00
Commission élargie : commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, commission de la défense nationale et des forces armées, commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale

Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration :

Monsieur Bénisti, je considère, comme vous, que nous n'avons pas suffisamment tiré parti, au plan national, du dispositif prévu par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance – toiletté par la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2) –, qui avait pour objet de créer dans nos communes des conseils des droits et devoirs des familles (CDDF). Alors que les comités de prévention de la délinquance déterminent, de façon globale, les orientations à décliner par les services, ces conseils – dont les noms peuvent varier suivant les lieux – regroupent, autour du maire, les représentants du parquet, de l'éducation nationale et des services sociaux, afin de rappeler à l'ordre, avec effet immédiat – ce qui est un avantage par rapport aux procédures judiciaires –, les personnes qui dévient du droit chemin. Lorsqu'il s'agit de mineurs, cela se fait en présence des parents, ce qui permet de responsabiliser ces derniers. J'ai noté, depuis le printemps, une multiplication du nombre de ces conseils sur l'ensemble de notre territoire ; je crois qu'il faut aller encore plus loin.

Comme vous, je constate que la délinquance des mineurs continue d'augmenter, qu'elle commence de plus en plus jeune et qu'elle est de plus en plus violente. La délinquance des très jeunes adolescents de treize ans me soucie tout particulièrement. Il faut trouver le moyen de les remettre dans le droit chemin dès qu'ils dérapent. D'après une étude du célèbre criminologue Sébastien Roché, si un mineur commet un dérapage avant l'âge douze ans, il y a 75 % de chances qu'il récidive en commettant des actes graves ; cette probabilité tombe à 15 % si le dérapage survient plus tard, par exemple à quatorze ans.

Nous devons donc assister les parents défaillants. Des réponses peuvent certainement être trouvées du côté de l'éducation nationale. Je propose en outre de sanctionner les parents qui laissent leurs enfants de moins de treize ans traîner la nuit dans la rue, afin de les inciter à exercer pleinement leurs responsabilités. Ce serait la suite logique de la disposition que vous avez votée, à l'initiative d'Éric Ciotti, sur la suspension des allocations familiales. Je note à ce sujet que seulement une cinquantaine de suspensions ont été prononcées sur l'ensemble du territoire, alors que les autorités académiques ont prononcé quelque 30 000 avertissements, ce qui démontre l'efficacité du dispositif.

Monsieur Goujon, la vidéoprotection est très efficace, puisqu'elle permet à la fois de faire de la prévention et d'apporter une preuve judiciaire : chacun d'entre nous se souvient du tabassage en région parisienne dont les auteurs ont été très rapidement retrouvés grâce aux images de vidéoprotection.

La vidéoprotection peut en outre être un guide extrêmement utile pour l'action policière. Vous faisiez ainsi référence à la vidéo patrouille utilisée dans le forum des Halles. Dans un lieu aussi complexe, qui comporte de nombreuses voies de circulation étagées sur plusieurs niveaux, la trentaine de fonctionnaires de police qui y sont affectés de façon permanente ne peuvent surprendre des actes de délinquance que de façon aléatoire, en déambulant à l'aveuglette. Le système de vidéoprotection permettra de remarquer les comportements anormaux ainsi que la préparation d'affrontements entre bandes rivales et, par conséquent, d'orienter les effectifs de police vers les lieux concernés.

Le mouvement doit donc être poursuivi : 1 000 caméras de vidéosurveillance seront déployées dans Paris d'ici à la fin de l'année prochaine. La Ville de Paris refusant d'assurer le financement de ce programme, l'État s'en chargera.

J'en viens à la police d'agglomération. Après Paris et les trois départements de la petite couronne, ce dispositif gagne d'autres sites, dont Marseille et Lyon. L'objectif reste inchangé : il s'agit d'assurer la continuité de la gestion de la sécurité d'un territoire. Les résultats en sont très positifs. Ainsi, tout match ou tout spectacle organisé au Stade de France mobilisait auparavant la quasi-totalité des forces de l'ordre de Seine-Saint-Denis ; depuis la mise en place de la police d'agglomération, elles restent au service des habitants du département, tandis que les compagnies de sécurité de la préfecture de police assurent la sécurité du Stade de France. Tout le monde y gagne.

Les « contentieux de masse » sont effectivement un souci. La prostitution visible déplaît aux Parisiens, et j'ai donné ces derniers jours des instructions pour mener de nouvelles actions, qui semblent avoir été efficaces. La mendicité agressive insupporte nos concitoyens, qui ressentent une pression physique à l'origine d'un fort sentiment d'insécurité ; elle fait l'objet depuis 2003 d'une répression particulière, avec l'instauration d'un nouveau délit. La LOPPSI 2 a par ailleurs créé le délit de vente à la sauvette, qui constitue non seulement une concurrence déloyale, mais aussi une forme d'insécurité, car on ne vend pas que des reproductions de la tour Eiffel près du Champ de Mars : il s'agit aussi, dans les arrondissements de l'est parisien, de se débarrasser d'objets volés, issus de la contrebande ou dangereux pour la santé. Il convient donc de réprimer ces pratiques.

Il est vrai qu'il existe des problèmes d'articulation entre l'action de la police et les capacités de la justice. Je me suis entretenu récemment à ce sujet avec le garde des sceaux, en présence du procureur de Paris, afin qu'une réponse judiciaire minimale permette de faire vivre les textes et de dissuader les auteurs d'infractions.

Monsieur Calméjane, les 73 millions inscrits au budget de cette année – soit une augmentation de 60 % par rapport à l'année dernière – devraient permettre, en sus de la poursuite des opérations en cours, la restructuration, l'extension ou la construction des commissariats de Sarcelles, Boulogne-Billancourt, Évry, Torcy, Wattignies, Gap, Saint-Chamond, Livry-Gargan, Valenciennes, Le Raincy, ainsi qu'un certain nombre de mises aux normes.

Monsieur Valax, croyez que nous veillons en permanence à ce que les effectifs soient répartis de façon équitable. Il convient de prendre en compte, non seulement les effectifs des circonscriptions, mais aussi ceux des départements. Il faut en outre utiliser les vrais chiffres ; récemment, des élus ont comparé dans la presse les effectifs de la Seine-Saint-Denis et ceux des Hauts-de-Seine : outre le fait que ce dernier département n'est pas aussi uniforme qu'on veut bien le dire, les chiffres cités étaient erronés. Nous faisons indubitablement porter notre effort sur la Seine-Saint-Denis, qui a de grands besoins.

Madame Lebranchu, il convient de distinguer deux types d'infractions économiques et financières. J'ai le sentiment que vous aviez à l'esprit les grandes infractions, qui sont du ressort des juridictions spécialisées ; or ce ne sont pas celles-là qui se multiplient, mais les infractions liées à l'utilisation d'internet pour l'achat à distance d'objets. J'espère que, dans quelques semaines, le Parlement votera la création de la carte nationale d'identité électronique, qui permettra de garantir l'authenticité de la signature électronique et de sécuriser le commerce sur internet.

Il est vrai que la gendarmerie fait beaucoup d'efforts – tout comme la police, d'ailleurs. Je rencontre pour ma part surtout des gendarmes heureux, et je ne crois pas que ce soit ma seule présence qui les réjouisse ! Mes prédécesseurs et moi-même avons toujours eu le souci de faire en sorte que ces deux forces soient traitées de façon équitable, dans le respect de leurs singularités.

L'arrivée de la gendarmerie au ministère de l'intérieur a permis un repyramidage des grades, qui n'aurait pas été facile à obtenir dans un autre cadre. Quand je vais – comme vous – sur le terrain, j'observe qu'une brigade d'une vingtaine d'hommes a désormais fréquemment à sa tête un gendarme lieutenant, souvent un ancien sous-officier, ce qui semble logique étant donné qu'un chef de section ou de peloton est responsable d'un effectif équivalent. Le rapprochement a donc ouvert des possibilités de promotion aux gendarmes.

Monsieur Boisserie, cette année, nous remettrons en état 2 200 logements de gendarmes. Néanmoins, beaucoup d'efforts sont faits pour rénover les logements en dehors du secteur domanial. Je rends hommage aux collectivités locales qui en prennent l'initiative. Il m'est agréable de visiter les nouvelles gendarmeries, composées de petits pavillons, où les gendarmes sont logés comme des cadres moyens.

Les crédits sont évidemment limités. Nous allons pouvoir faire davantage cette année : pour la gendarmerie, les dotations immobilières réservées au casernement sont en augmentation de 45 % par rapport à l'année dernière. Il faut aussi imaginer des formules innovantes : par exemple, une partie du terrain disponible au cantonnement de Satory sera vendue à la ville de Versailles, le produit de la cession permettant de rénover les logements existants.

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