Monsieur Reiss, les 4 000 emplois aidés affectés à l'éducation nationale sur les 20 000 annoncés par le Président de la République seront en grande partie consacrés à l'assistance administrative dans les écoles, ce qui est très attendu par les écoles primaires.
L'école du socle commun est une piste intéressante et le rapport que vous avez rédigé comporte à cet égard plusieurs orientations. J'ai été frappé de constater en Finlande que ce pays avait supprimé toute rupture entre le premier le second degrés. Les résultats d'une enquête sur la victimation au collège, que j'ai publiés hier, montrent bien que l'entrée au collège en sixième est une véritable rupture dans la scolarisation, les élèves de sixième étant par exemple beaucoup plus inquiets que leurs camarades des années suivantes. Le continuum semble donc très intéressant dans l'esprit de la loi de 2005 instaurant un socle commun.
Deux expérimentations sont actuellement en cours dans ce domaine, à Richelieu et à Grand-Pressigny, en Indre-et-Loire. Dans les deux cas, profitant de la baisse du nombre de collégiens, les classes des écoles primaires vont rejoindre physiquement l'enceinte du collège, l'ensemble faisant l'objet d'une convention entre la commune et le conseil général.
J'ai également proposé que, pour remédier aux difficultés de lecture des enfants entrant en sixième sans maîtriser parfaitement les fondamentaux, des professeurs des écoles viennent dorénavant aider leurs collègues du secondaire en assurant cette remédiation dans le domaine de la lecture. Ce n'est pas le même métier que d'être professeur des écoles ou professeur de collège. Une fois l'élève entré dans le cycle du collège, si les fondamentaux ne sont pas maîtrisés, qui est mieux placé que le maître du primaire pour apporter la médiation ? Tous les liens, toutes les passerelles sont les bienvenus.
Il nous faut maintenant réfléchir aux questions juridiques et administratives. Faut-il un statut particulier ? Faut-il regrouper les écoles sous la responsabilité d'un seul directeur ? Ces questions dessinent un déclinaison de la mise en oeuvre du socle commun instauré par la loi de 2005, qui prévoit des fondamentaux – les sept piliers – et leur acquisition progressive.
Monsieur Bodin, si nous avons voulu, en 2005, mettre en place un socle commun de connaissances et de compétences et recentrer l'apprentissage sur quelques fondamentaux, c'est bien pour en permettre l'acquisition progressive. Chaque enfant, selon son rythme, doit acquérir ces piliers tout au long de la scolarité obligatoire – c'est tout le sens de la personnalisation.
Je ne suis pas favorable, je le répète, au rétablissement de l'examen d'entrée en sixième, contraire à l'idée de socle commun que je viens d'évoquer et qui suppose une pédagogie personnalisée pour l'acquisition des fondamentaux. Qu'adviendrait-il en effet des 15 % d'élèves qui ne passeraient pas en sixième ? Cette pratique nous contraindrait à revoir l'ensemble de l'organisation et du fonctionnement des écoles.
Vous soulignez à juste titre que l'objectif ne doit pas être de porter au niveau du bac un pourcentage donné d'une une classe d'âge, mais de faire en sorte que 100 % des élèves sortent de l'école avec une solution. De fait, le ministre de l'éducation nationale n'est aujourd'hui pas en mesure de garantir aux parents que, quoi qu'il arrive, leurs enfants sortiront de l'école avec un bagage et une solution. C'est là que nous devons améliorer l'efficacité du système : de l'École polytechnique au CAP, il faut trouver une solution. Notre système éducatif doit être capable de s'adapter, de personnaliser, d'individualiser, de différencier les moyens, de faire plus pour ceux qui ont le plus de besoins, mais aussi de détecter les meilleurs pour leur permettre d'aller vers l'excellence – car l'école de la République est aussi celle qui mène vers l'excellence –, afin d'obtenir 100 % de réussite. Je partage donc votre vision sur ce point.
Je suis en revanche réservé quant à l'idée d'une orientation précoce. Le but n'est pas le collège unique, mais le collège pour tous : que 100 % d'une génération aille au collège est un vrai progrès, mais il faut des parcours différenciés pour des enfants qui, à 13 ou 14 ans, ont des difficultés dans certaines disciplines et pourraient trouver un meilleur épanouissement s'ils étaient orientés vers d'autres domaines. Il ne faut donc pas rétablir une orientation trop précoce. On ne peut pas affirmer le droit à l'erreur et le caractère réversible de l'orientation et, dans le même temps, envoyer – pour grossir le trait – les enfants à l'usine dès 12 ans. Les parcours doivent donc être différenciés et permettre un retour pour une orientation définitive. Il doit s'agir d'une pré-orientation réversible.
Monsieur Pélissard, je tiens à vous rassurer en votre qualité de président de l'Association des maires de France : il y aura le même nombre de classes à la rentrée 2012 qu'à la rentrée 2011. Cela représente un effort important en termes d'organisation, car nous allons poursuivre le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Certaines classes fermeront et d'autres ouvriront, car l'éducation nationale doit s'adapter à l'évolution démographique et à la situation de la carte scolaire, mais le nombre restera constant dans le cadre du budget que vous examinez.
Monsieur Charasse, monsieur Juanico, vous m'avez interrogé sur le nombre de postes, en demandant comment nous ferions face aux prochaines rentrées. Je serais tenté de vous demander en retour comment on faisait, voilà 20 ans, avec 35 000 professeurs de moins et 500 000 élèves de plus – ces chiffres sont attestés et faciles à vérifier. Le système fonctionnait-il alors moins bien qu'aujourd'hui ? Le système éducatif peut améliorer ses performances, son efficience et son efficacité avec plus de différenciation, d'autonomie, de confiance aux acteurs locaux et d'individualisation des parcours.
L'exemple de recrutement que vous citez, monsieur Charasse, est quelque peu caricatural. Je rappelle que, dans leur immense majorité, les enseignants sont recrutés sur concours. Sur les 17 000 recrutements auxquels l'éducation nationale procède cette année – restant ainsi le premier recruteur de France –, 80% sont des enseignants, dont 90 % sont recrutés sur concours pour la vie. Peu de pays font cela.
J'ai rappelé tout à l'heure à Mme Langlade quelle était notre politique de remplacement. Nous faisons en effet appel à des contractuels, que nous allons chercher là où les compétences se trouvent : auprès des anciens enseignants, de ceux qui n'enseignent pas à l'éducation nationale et des futurs enseignants. Nous travaillons pour cela avec Pôle emploi – qui possède, vous en conviendrez, des compétences en matière de recrutement. Qu'y a-t-il de choquant à ce que, pour recruter des contractuels sur la base d'une description de fonctions, nous allions les chercher chez les professionnels concernés ?
Monsieur Juanico, nous ne supprimons pas les RASED, même s'ils sont moins nombreux qu'ils ne l'étaient voici quelques années. Leur mission a du reste été revue, comme je l'ai rappelé tout à l'heure. J'ai également indiqué quel était le taux d'encadrement pour ces personnels et je ne puis souscrire à votre jugement selon lequel le document élaboré par l'administration de mon ministère ne serait pas conforme à la réalité –l'administration de la direction générale de l'enseignement scolaire est compétente et performante.
Madame Berthelot, vous avez rappelé que la Guyane a bénéficié d'importantes créations de postes pour accompagner le mouvement démographique. Nous avons stabilisé les lauréats des concours pour assurer une affectation pluriannuelle, lancé un plan de formation pour encourager les contractuels locaux à passer les concours et débloqué 6 millions d'euros de crédits en 2012 pour la construction scolaire. Nous avons également créé un internat d'excellence – que j'ai eu l'occasion de visiter – à Maripasoula. Tout cela témoigne de l'engagement de l'État en faveur du département de la Guyane.