Je déplore que nous examinions ces crédits en commission élargie, alors qu'une séance se tient dans l'hémicycle.
Si le projet de budget pour 2012 témoigne d'un effort de transparence, cela ne signifie pas pour autant une hausse réelle des crédits consacrés à l'asile et ne peut cacher une réalité beaucoup moins satisfaisante. Le budget consacré à l'asile passe de 296 millions en 2011 à 376 en 2012, soit 80 millions en plus. Mais si l'on analyse le budget 2010, on constate que cette augmentation ne permettra pas de traiter correctement les problèmes spécifiques à l'asile. En effet, la différence entre les crédits votés dans le budget 2010 et les 410 millions de crédits effectivement consommés est de 124,6 millions. L'augmentation de 80 millions n'est donc qu'un effet d'annonce de plus. Elle ne concerne que les prévisions budgétaires, et non les crédits réellement consacrés à l'accueil des demandeurs d'asile. Les associations intervenant dans ce domaine ne cessent d'ailleurs d'alerter les pouvoirs publics sur le nombre de demandeurs d'asile qui rejoignent les personnes à la rue, sans cesse plus nombreuses.
Pourquoi le ministère, qui admet que le CADA est le dispositif le mieux adapté aux personnes en quête de protection, entérine-t-il une baisse réelle du budget consacré aux CADA, et cela derrière une augmentation toute relative des budgets alloués aux mesures d'urgence ? Ce projet de loi de finances prévoit une nouvelle diminution des crédits CADA de près de 5 millions d'euros, après une baisse de 4 millions en 2011. Cette baisse aura des incidences sur les missions premières des CADA, elle touchera l'hébergement et l'accompagnement des demandeurs d'asile, ainsi que l'emploi qui, avec le nouveau taux d'encadrement, enregistrera la suppression de 500 à 700 ETP.
Des suppressions avaient déjà eu lieu, s'agissant des postes d'accompagnement dans les dispositifs d'hébergement d'urgence. Le texte prévoit un ETP pour dix à quinze résidents, au lieu de un pour dix résidents. De même, la part des personnels socio-éducatifs diminue.
Pour faire baisser le nombre des demandes d'asile, la tentation est grande de dissuader les étrangers d'en déposer une. Pour ce faire, en amont de l'OFPRA et de la CNDA, les préfets jouent un rôle important. En effet, les demandeurs d'asile doivent obligatoirement se rendre dans les préfectures pour faire enregistrer leur demande. Tous les préfets ne sont pas forcément compétents pour cette tâche, et des débordements ont eu lieu. Expérimentée d'abord dans deux régions, puis étendue à dix-sept autres, la « régionalisation » de l'admission au séjour consiste à confier à un ou à deux préfets la compétence d'autoriser ou non les demandeurs d'asile à séjourner dans une région donnée. Cela a pour conséquence de rallonger le délai et de placer les demandeurs d'asile dans des situations inégalitaires. Pourquoi cette réforme s'est-elle faite à effectifs constants ?
S'agissant de l'action 01 du programme 303, « Circulation des étrangers et politique des visas », il semble que le Gouvernement ait trouvé là le moyen de récupérer de l'argent sur le dos des migrants. Ainsi le montant du droit de visa de régularisation est-il passé de 220 euros à 340 euros pour « renforcer son caractère pédagogique » ! Mais le but réel est le financement de ce budget par les migrants eux-mêmes.
J'en viens au programme 104 : « Intégration et accès à la nationalité française ». Ǎ partir du 1er janvier 2012, les étrangers qui souhaiteront déposer une demande de naturalisation, par décret ou par mariage, devront faire concrètement la preuve qu'ils ont, à l'oral, une maîtrise de la langue française équivalente à celle d'une personne ayant été scolarisée jusqu'en fin de classe de troisième. Je vous renvoie, monsieur le ministre, au débat que nous avons eu récemment sur une télévision. Mais combien de nationaux n'ont pas aujourd'hui le niveau de troisième ! Ce nouveau dispositif aura un fort impact réducteur, et il commencera par exclure tous ceux, et surtout toutes celles, qui n'ont pas, ou peu, été scolarisés dans leur pays d'origine.
Je rappelle que le taux d'acceptation des demandes de naturalisation est certainement déjà tombé en dessous des 50 % alors qu'il était au-dessus de 70 % en moyenne ces trente dernières années.