Le patrimoine culturel de la France est l'un des plus prestigieux du monde. Cet héritage commun nous oblige : nous devons le préserver et l'enrichir, dans un contexte difficile. C'est pourquoi les orientations budgétaires prises par votre ministère nous inquiètent.
Vous avez déjà répondu pour partie aux questions que je comptais vous poser sur le financement des grands projets – Maison de l'histoire de France, Philharmonie de Paris, MUCEM et nouveau centre des Archives nationales. Cependant, plusieurs fois, depuis des années, nous avons dénoncé les tensions budgétaires induites par la politique des grands chantiers culturels. La question a aussi été abordée en 2007 par la Cour des comptes qui, ayant constaté des dépassements et des surcoûts dans les investissements culturels, proposait de renforcer les outils de pilotage, de suivi et d'évaluation des opérations immobilières.
Aujourd'hui, M. Dell'Agnola, rapporteur spécial, s'inquiète du dépassement du plafond des dépenses fixé en loi de programmation des finances publiques et invite à une meilleure répartition des crédits sur le territoire. En effet, les opérations immobilières en cours sont pour la plupart concentrées en région parisienne. Dans ces conditions, comment évolueront les moyens financiers dévolus aux services déconcentrés de l'État, les DRAC, dont le rôle est d'assurer une certaine péréquation territoriale, conforme à l'esprit de la décentralisation ?
Autre sujet d'inquiétude : le ministère avait annoncé en 2010 un plan « Musées » doté de 70 millions d'euros sur trois ans. À l'époque, nous avions relativisé la portée de cette mesure – 70 millions à répartir en trois ans entre 79 structures, cela nous paraissait insuffisant. Or, les crédits 2012 destinés à ce plan diminuent de 8 millions en autorisation d'engagement et de 3 millions en crédits de paiement. Comment expliquer ces choix ?
Un dernier motif d'inquiétude tient aux crédits de fonctionnement des musées nationaux. Ils augmentent certes de 10 millions d'euros, mais cette hausse s'explique pour l'essentiel par une dotation de 5 millions d'euros en faveur de la Maison de l'Histoire de France – dont le coût total devrait s'élever à quelque 80 millions. La création de cet équipement très controversé a des conséquences de deux ordres : d'une part, le démantèlement des Archives nationales, des travaux sur un nouveau site et le transfert à Pierrefitte, pour un coût de 195 millions d'euros ; d'autre part, l'inscription de neuf musées nationaux dans le réseau de la Maison de l'Histoire de France. Pouvez-vous nous assurer que notre système muséal, qui a fait ses preuves en termes d'efficacité, de réactivité et de démocratisation culturelle, ne sera pas sacrifié pour satisfaire une vision très singulière de l'histoire de notre pays, et pour un coût exorbitant au regard de notre situation budgétaire?