Le budget de la politique de la ville porte un espoir, celui des 8 millions de Français qui vivent dans les quartiers prioritaires, et une ambition, celle de faire de nos quartiers des lieux où il fait mieux vivre.
Le projet de budget de 2012 s'inscrit dans un contexte difficile, celui de la crise économique et financière internationale. L'équation n'était donc pas simple à résoudre. Nous devions concilier deux paramètres : d'un côté, la responsabilité et la maîtrise des dépenses publiques ; de l'autre, le devoir de solidarité et le respect des engagements pris.
Comme on dit au Quai-d'Orsay, M. Goulard – dont je partage cependant l'avis sur de nombreux points – a été franc et cordial. Je lui répondrai de la même façon, sans user de la langue de bois. Nous avions d'ailleurs déjà abordé toutes ces questions de fond ici même, le 1er février, lors du débat organisé à la suite de la remise du rapport qu'il avait rédigé avec M. Pupponi sur l'évaluation des aides aux quartiers défavorisés.
Je partage une des conclusions du rapport : le maire doit jouer un rôle de chef d'orchestre en matière de politique de la ville. Cependant, comme l'a souligné Pierre Méhaignerie, sa vision doit s'étendre au périmètre de la communauté de communes ou d'agglomération. C'est particulièrement vrai en Île-de-France, en raison du projet du Grand Paris.
Il reste que notre réunion d'aujourd'hui s'inscrit dans le cadre de la discussion budgétaire. Je comprends parfaitement les analyses et les questionnements de François Goulard et deMichel Piron, mais nous aurons de toute façon un débat, notamment à l'occasion des prochaines échéances électorales, présidentielle et législatives. En outre, comme l'a dit M. Goulard à propos des ZFU ou des CUCS, le coup est déjà parti. Il n'en demeure pas moins que la question de l'efficacité des dispositifs en matière de politique de la ville devra être examinée en faisant preuve d'un grand courage politique. J'ai, sur ce sujet, quelques idées que j'exposerai le moment venu. Ce débat ne m'effraie donc pas mais, pour le moment, ma mission est de gérer le financement des dispositifs existants.
Comme l'ont souligné les rapporteurs, les crédits de la politique de la ville sont préservés malgré le contexte de crise. De même, les crédits d'intervention de l'ACSé sont stabilisés. Quant à la dotation de solidarité urbaine, son montant a progressé de 133 % entre 2002 et 2012, pour atteindre aujourd'hui 1,37 milliard d'euros. Enfin, la dotation de développement urbain est stabilisée à 50 millions d'euros.
On parle peu de la DSU dans les débats sur la politique de la ville, alors que c'est aussi une question qui réclame un certain courage politique. À quoi sert-elle ? Ne devrait-elle pas être mieux fléchée ? On parle du financement des CUCS, mais l'enveloppe de la DSU, qui joue également un rôle en matière de solidarité urbaine, est encore plus conséquente.
Depuis 2004, la rénovation urbaine se poursuit et représente une incontestable réussite. Non seulement ce programme sera mené jusqu'à son terme, mais le Premier ministre m'a demandé de réfléchir à un deuxième acte.
De même, l'article 64 du projet de loi de finances prolonge jusqu'au 31 décembre 2014 le dispositif des zones franches urbaines, qui concernait, en 2010, 307 000 salariés et 61 558 établissements. Si nous avons choisi cette date, c'est par cohérence : en 2014 aura lieu la révision globale de la géographie prioritaire de la politique de la ville. Ce sera également l'année des prochaines élections municipales.
En ce qui concerne les zones franches urbaines, tous les maires, quelle que soit leur sensibilité, s'y disent favorables, mais tous en dénoncent dans le même temps les effets d'aubaine. Certains jugeront que l'on peut s'en accommoder, mais nous avons le devoir de veiller à la bonne utilisation de l'argent public, et ce d'autant plus qu'il est rare. Nous ne pouvons donc accepter que cet argent serve à financer l'implantation d'entreprises réduites à de simples boîtes aux lettres.
Les zones franches urbaines ont été créées dans le cadre de la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, lorsque Éric Raoult était ministre de la ville. L'objectif était de créer des emplois au bénéfice des habitants des quartiers sensibles. Pour la même raison, nous proposons qu'un emploi sur deux – contre un sur trois à l'origine – soit réservé à ces habitants dans les entreprises bénéficiaires du dispositif. Qui peut s'opposer à un tel renforcement de la clause d'embauche ?
L'ensemble des ministères a maintenu ses efforts en faveur des quartiers : en 2012, près de 2 milliards d'euros de crédits leur seront consacrés. Pour la première fois depuis près de deux ans, un conseil interministériel des villes s'est réuni le 18 février sous la présidence du Premier ministre, François Fillon.
Afin de d'orienter plus précisément l'emploi des aides de droit commun, j'ai voulu que soient conclus, à titre expérimental, des contrats urbains de cohésion sociale donnant explicitement le pouvoir aux maires, en concertation avec l'ANRU et les acteurs de la rénovation urbaine. Cette politique s'inspire directement du rapport de François Goulard et François Pupponi. Ces expérimentations concernent trente-trois sites et portent sur trois thèmes prioritaires : l'emploi, l'éducation et la sécurité.
Quinze mille contrats d'autonomie supplémentaires sont prévus en 2011 et 2012. Les services publics de l'emploi sont également mobilisés, grâce aux contrats aidés et à l'apprentissage, tandis que le soutien à la création d'entreprise – microcrédit, « Cordées de l'entrepreneuriat » – est renforcé.
Je partage le sentiment de Michel Piron sur l'éducation : l'école est le creuset de la République, le lieu par excellence de la mixité sociale. Elle doit donc – l'école primaire en particulier – offrir partout les mêmes chances de réussir. Le programme de réussite éducative concernera 135 000 enfants en 2011 et 2012. Nous consolidons également les « Cordées de la réussite », dont le succès est reconnu par tous. Par ailleurs, à la rentrée 2011, trente académies ont offert 10 300 places en internat d'excellence.
La mobilisation des moyens de droit commun, c'est aussi la recherche d'une solidarité plus efficace en direction des villes. La péréquation est à cet égard un enjeu vital, en donnant plus à ceux qui ont le moins. En 2012, un nouveau fonds de péréquation sera mis en oeuvre, et 250 millions d'euros seront redistribués aux communes les plus pauvres.
Il existe aujourd'hui une véritable attente, une véritable exigence de la part de nos concitoyens en matière de politique de la ville. Le Gouvernement y répond par un objectif, une méthode et un résultat. Un objectif : la consolidation de la République dans tous nos quartiers populaires ; une méthode : conjuguer l'humain et l'urbain ; un résultat : le lancement d'un véritable développement économique, social et urbain dans nos quartiers, qui regorgent de talents dont notre économie ne saurait se passer.
C'est en nous en tenant résolument à cette ligne que nous réduirons les écarts entre les territoires, afin que nos quartiers retrouvent la confiance et soient tournés vers l'avenir.