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Intervention de Michel Mercier

Réunion du 26 octobre 2011 à 16:
Commission élargie : commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés :

Bien entendu, je ne parle pas du premier président de la Cour de cassation, ni de certains juges d'instruction…

Vous avez par ailleurs évoqué l'augmentation de la charge de travail du juge d'instance. Lors de l'examen du projet de loi relatif à la répartition des contentieux, j'ai confirmé que la situation des juridictions d'instance ferait l'objet d'un examen attentif en lien avec les chefs de cour et de juridiction, dans le cadre des dialogues de gestion actuellement en cours. Nous en tirerons toutes les conséquences en termes de localisation des emplois et donc d'augmentation des effectifs dans les tribunaux d'instance où cela sera justifié. Des transferts depuis les TGI vers les tribunaux d'instance sont en effet envisageables puisque les juges de proximité siégeront désormais dans les formations collégiales civiles des TGI, libérant ainsi des emplois de magistrat. Il pourra également être mis fin aux tâches annexes qui étaient jusqu'à présent confiées aux juges d'instance, comme la participation aux sessions d'assises ou aux audiences correctionnelles.

La prochaine législature devra par ailleurs être l'occasion d'examiner l'hypothèse d'une fusion des juridictions de première instance, car la coexistence de juridictions d'instance et de grande instance pose des problèmes d'organisation et manque de souplesse.

En ce qui concerne la répartition des tribunaux spécialisés dans le contentieux du surendettement, prévus par le décret du 23 août 2011, vous avez affirmé que le tribunal de Villejuif était, dans le département du Val-de-Marne, le seul qui n'ait pas bénéficié dans ce cadre de moyens supplémentaires. Le choix des tribunaux d'instance concernés a été effectué à partir des propositions des chefs de cour et de juridiction. Dans le Val-de-Marne, le président du TGI de Créteil a désigné le tribunal d'instance de Villejuif et prévu le redéploiement d'effectifs depuis le tribunal de grande instance. Un magistrat du siège, deux greffiers et un adjoint administratif de la deuxième chambre civile seront ainsi attribués au tribunal de Villejuif, qui bénéficie donc bien de moyens supplémentaires.

Le groupe de travail sur l'exécution des peines a élaboré trente et une recommandations autour de deux grands axes : évaluation de la charge de travail des services d'application des peines et pilotage de ces services. Nombre de ces mesures pouvaient être mises en oeuvre immédiatement : elles ont fait l'objet de la circulaire ministérielle du 7 octobre 2011, qui a notamment diffusé les tableaux de bord destinés à la modélisation du rapport d'activité des juges d'application des peines afin de mesurer l'activité du service dans chaque tribunal. Cette circulaire a également repris les préconisations destinées à améliorer la communication entre les différents acteurs de la chaîne pénale : promotion de l'ensemble des instances de dialogue déjà existantes, organisation de réunions thématiques entre le parquet et le service de l'application des peines ou entre ce dernier et les services du tribunal pour enfants.

Le groupe de travail a par ailleurs estimé que la charge d'activité des magistrats compatible avec la nécessité de rendre des décisions de qualité dans des délais raisonnables était de 700 à 800 dossiers par juge de l'application des peines. Nous en avons tenu compte lors des travaux préparatoires au projet de loi de programmation sur l'exécution des peines, qui sera présenté dans quelques semaines au Parlement.

Plusieurs questions ont été posées sur l'aide juridique.

Du point de vue pratique, tout d'abord, il est exact que l'on ne trouve pas partout des timbres à 35 euros, mais à partir du 1er janvier 2012, la contribution pourra être réglée par voie électronique. En attendant, il est nécessaire de recourir à des timbres en papier.

Il manquait 85 millions d'euros, sur un coût total de 103 millions, pour financer l'intervention des avocats consécutive à la réforme de la garde à vue. Après avoir examiné différentes voies possibles, le Gouvernement a tranché en faveur d'une contribution reposant sur la solidarité entre justiciables. Certains proposaient de taxer tous les actes, y compris les actes notariés, mais il nous a semblé qu'il y avait eu suffisamment de discussions entre avocats et notaires cette année, et qu'il était préférable de ne pas lancer un nouveau chantier de cet ordre. De son côté, le rapport de Mme Pau-Langevin et de M. Gosselin sur l'aide juridique et l'accès au droit a présenté plusieurs pistes, dont celle d'une taxe sur les actes juridiques – notamment sur ceux soumis à la procédure d'enregistrement ou d'immatriculation au registre du commerce – et d'une contribution à la charge des assureurs.

S'agissant de la première hypothèse, la question était de savoir s'il était légitime de taxer l'activité économique – celle des entreprises, mais aussi celle des particuliers, notamment quand ils vendent ou achètent un bien immobilier – pour financer l'intervention de l'avocat en garde à vue. Techniquement, les droits d'enregistrement sont actuellement partagés entre communes, départements et État. Ajouter une tranche d'imposition additionnelle affectée au Conseil national des barreaux aurait inutilement accru la complexité de ce prélèvement et réduit sa lisibilité.

Quant à taxer les assureurs, cela serait indirectement revenu à taxer les contrats d'assurance, et donc les assurés, ce qui aurait posé à peu près les mêmes questions que le droit finalement créé.

Dès lors qu'il avait été décidé de financer la réforme de la garde à vue par une taxe affectée, il était sain que cette taxe ait un rapport avec la dépense considérée. De ce point de vue, le droit de timbre était la moins mauvaise des solutions.

La justice a un coût, il faut l'assumer et l'organiser pour prendre en compte les facultés contributives de chacun !

En termes d'organisation, la contribution pour l'aide juridique – qui ne doit pas être confondue avec le droit de timbre sur appel – sera affectée au Conseil national des barreaux et gérée par la profession. Le produit attendu est estimé à 86 millions d'euros compte tenu du nombre de procédures annuelles enregistrées, déduction faite du nombre de bénéficiaires exonérés – notamment les attributaires de l'aide juridictionnelle.

Sur les premiers mois d'application de la réforme de la garde à vue, la dépense liée à l'intervention de l'avocat reste dans les limites de ce qui avait été prévu : il n'y a pas lieu de craindre, à ce stade, une insuffisance de financement. Par ailleurs, rien ne permet d'affirmer que la mise en place de la contribution aura pour effet d'augmenter de façon significative le nombre de demandes d'aide juridictionnelle. Le cas échéant, les bureaux d'aide aux victimes seraient à même de traiter ces demandes supplémentaires. Le nombre de bureaux d'aide juridictionnelle dans lequel le délai de traitement moyen est supérieur à deux mois est d'ailleurs redescendu à cinq ; il devrait être de douze en 2012.

Répondant à M. Verchère, je préciserai que nous allons créer cette année 370 nouveaux emplois de greffier, après en avoir créé 399 en 2011. L'École nationale des greffes n'avait d'ailleurs jamais connu de recrutements aussi importants : cette année, 774 greffiers stagiaires y sont entrés, et ils seront autant l'année prochaine.

Ces recrutements massifs vont permettre d'augmenter le ratio entre nombre de magistrats et nombre de greffiers, de façon à parvenir à une proportion de 1 pour 1. Aujourd'hui, ce taux est d'environ 0,92 : nous avons donc déjà notablement progressé.

La délinquance des mineurs, qui marque beaucoup les gens, connaît une aggravation en termes tant de fréquence que de violence des actes. Lorsque l'on visite des établissements pénitentiaires, on rencontre de nombreux jeunes, mais peu de mineurs. Nous avons en effet, et c'est une bonne chose, réduit le nombre de mineurs incarcérés en prison : alors qu'ils étaient plus de 1 000, ils sont désormais moins de 800, notamment grâce à la création des CEF. Je précise, monsieur Dolez, que les crédits attribués à la PJJ augmenteront de 1,98 % en 2012 pour atteindre 773 millions d'euros. Cela devrait permettre d'assurer une meilleure prise en charge des délinquants et surtout d'éviter la récidive. C'est en effet le vrai problème s'agissant des mineurs : il ne suffit pas de les suivre au moment de leur placement, mais aussi après. Le placement est destiné à rompre avec l'état de délinquance ; par la suite, le suivi permet de maintenir cette rupture.

Je rappelle que la loi du 10 août 2011 a permis d'apporter un certain nombre de réponses pénales plus efficaces et plus visibles, notamment avec le tribunal correctionnel pour mineurs. De son côté, le Conseil constitutionnel, à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité, a eu l'occasion de préciser le contenu du principe fondamental reconnu par les lois de la République relatif à la justice des mineurs, en s'appuyant sur les lois de 1906 et de 1912 ainsi que sur l'ordonnance de 1945. Cette décision est capitale en ce qu'elle permettra à la prochaine législature de rédiger un code pénal des mineurs, dont nous avons le plus grand besoin.

Je répondrai maintenant à M. Raimbourg.

Je suis d'accord avec lui : nous avons lancé un véritable plan de rattrapage…

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