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Intervention de Michel Mercier

Réunion du 26 octobre 2011 à 16:
Commission élargie : commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés :

Vous pouvez critiquer, mais vous ne pouvez nier la vérité ! Il est facile de vérifier que le nombre d'éducateurs de la PJJ a augmenté : ils sont payés tous les mois, et s'ils ne l'étaient pas, vous le feriez savoir !

S'agissant du prix de journée en centre éducatif fermé, il est vrai qu'il est relativement élevé : plus de 600 euros par personne. Cela tient au fort taux d'encadrement.

Bien que nous ayons affaire à un public très difficile, nous avons choisi de lui éviter la prison « sèche », afin de rester fidèle à la conception française de la justice pour les mineurs – une justice qui donne la primauté à l'éducatif sur le répressif. Des moyens importants sont donc consacrés à la formation dans les CEF.

Mais il faut aussi des gardiens, car il s'agit tout de même d'établissements pénitentiaires : en cas d'échec, l'étape suivante est l'établissement pour mineur, puis la prison. Nous avons en effet essayé de diversifier les modes de placement des mineurs afin d'offrir au juge la palette la plus large possible.

Ce public difficile nécessite donc un encadrement important : éducateurs, psychologues et enseignants à plein temps, directeurs, chefs de service, personnel doublé la nuit. Les frais d'équipement sont également importants. Tout cela explique l'ampleur du coût de fonctionnement de ces centres.

L'expérience en est encore à ses débuts, et nous essayons d'en évaluer les résultats. Une enquête a ainsi été réalisée dans sept centres éducatifs fermés, ce qui a permis d'en améliorer notablement le fonctionnement. Une autre, en cours de finalisation, est destinée à mesurer l'impact du séjour en CEF dès la sortie du mineur, et six mois après celle-ci. Enfin, une troisième étude est en projet, afin de procéder à l'évaluation comparée de l'impact sur la réitération des différentes décisions de justice concernant les mineurs délinquants.

La continuité du parcours éducatif des mineurs sortant de CEF est une préoccupation majeure. Des travaux permettant de prévenir toute rupture dans le suivi éducatif ont donc été initiés. Une circulaire du 13 novembre 2008 définit les modalités précises d'audiences et d'échanges pendant la durée du placement afin de préparer au mieux la sortie de chaque mineur. L'ordonnance du 2 février 1945 prévoit d'ailleurs qu'à l'issue du placement « le juge des enfants prend toute mesure permettant d'assurer la continuité de la prise en charge éducative du mineur en vue de sa réinsertion durable dans la société ».

Les mineurs sortant de CEF peuvent aussi faire l'objet d'un suivi renforcé par le trinôme judiciaire réunissant le parquet, le juge des enfants et le service éducatif. Les services de la PJJ se sont récemment réorganisés afin de garantir à la fois la mise en oeuvre sans délai des décisions du magistrat, la qualité de la prise en charge, le caractère pluridisciplinaire des équipes et la continuité de l'action éducative, au sein de chaque unité éducative mais aussi entre les unités de plusieurs établissements.

La continuité de la prise en charge éducative à la sortie d'un CEF ne peut s'envisager uniquement en termes de placement. Les modalités d'un accompagnement renforcé en milieu ouvert font donc actuellement l'objet d'une réflexion. À cet égard, l'affaire de Pornic a marqué les esprits, car elle touchait aussi bien à la question du suivi des personnes incarcérées qu'à celle de l'agrément donné aux familles d'accueil.

J'ai rappelé à l'administration pénitentiaire la nécessité d'une affectation nominative des dossiers de prise en charge par le service pénitentiaire d'insertion et de probation, sous la responsabilité d'un cadre de ce service. Un choix a été fait il y a quelques années, celui de placer les SPIP dans le cadre de l'administration pénitentiaire plutôt que dans celui de la pure administration judiciaire. Il faut donc donner une nouvelle orientation à l'administration pénitentiaire, qui va devoir modifier ses métiers et se tourner vers le milieu ouvert, ce qui ne correspond pas à sa tradition. J'ai demandé au nouveau directeur de veiller à doter les SPIP des moyens dont ils ont besoin. L'utilisation de l'informatique, notamment le système « APPI », devra être automatique et vérifiée régulièrement.

J'en viens aux questions de M. Garraud.

Est-il opportun d'améliorer à nouveau le régime indemnitaire ? J'observe tout d'abord que, sur les 90 postes de magistrat mis au concours, tous ne sont pas pourvus. Ensuite, les magistrats ont toute liberté pour fixer la date de leur départ à la retraite, si bien que l'on ne sait pas combien vont partir chaque année. L'estimation effectuée lors du recrutement des auditeurs de justice peut être juste ou non et, souvent, elle ne l'est pas. Cela explique que l'on puisse manquer de magistrats même lorsque l'on crée de nombreux postes. Le mode de fonctionnement des carrières dans la magistrature est donc peu compatible avec une bonne gestion des ressources humaines.

Nous avons essayé, dans le cadre du budget qui nous est alloué, d'améliorer le régime indemnitaire. Ainsi, la prime modulable versée aux magistrats va passer de 9 à 12 %, ce qui représente un effort relativement important. Les greffiers ne sont pas oubliés, puisqu'une enveloppe de 3,4 millions d'euros leur a été spécialement dévolue en 2011 et qu'une autre enveloppe de 1,05 million est prévue en 2012, afin d'augmenter leurs primes à l'occasion de la mise en place dans leur corps du nouvel espace statutaire.

Nous menons depuis plusieurs années une politique de promotion sociale qui permet aux personnels de catégorie C de passer le concours pour devenir greffiers. Le problème est que l'on commence à manquer d'agents dans cette catégorie. En outre, nous devons veiller à éviter tout déclassement de la fonction de greffier, faute de voir ce dernier accomplir un travail relevant de la catégorie C. Il faut non seulement que l'équipe formée par le magistrat et le greffier puisse bien fonctionner, mais aussi qu'elle bénéficie du soutien des fonctionnaires de catégorie C pour la réalisation de travaux simples, ne nécessitant pas des connaissances juridiques poussées. Nous n'allons pas payer des gens titulaires d'un master 2 pour faire des photocopies ou classer des dossiers !

D'ailleurs, pourquoi n'a-t-on plus recours, pour effectuer ces tâches, aux personnes condamnées à un travail d'intérêt général ? Il est pour le moins paradoxal que la justice soit la seule administration à ne pas en accueillir, ni, d'ailleurs, à recourir à des emplois aidés.

L'important est de permettre aux greffiers de faire leur métier. Ils n'ont jamais été aussi nombreux à s'y préparer, puisque l'école de Dijon accueille 800 élèves. Les candidats sont de très haut niveau : la plupart sont titulaires d'un master 2, alors qu'il y a encore quelques années, on passait le concours après avoir obtenu le DEUG. Ainsi, de nombreux greffiers sont plus diplômés en droit que les magistrats qu'ils assistent…

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