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Intervention de Yves Fromion

Réunion du 26 octobre 2011 à 10h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Fromion, rapporteur :

Le programme 144 est un programme complexe qui comprend six actions aux contenus variés : « analyse stratégique », « prospective des systèmes de forces », « recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France », « maîtrise des capacités technologiques et industrielles », « soutien aux exportations » et « diplomatie de défense ».

C'est pourquoi je vais simplement balayer ce budget de quelques coups de projecteur.

La dotation budgétaire est stable et même en légère augmentation et je vous inviterai donc à adopter ce programme.

Malheureusement, à l'intérieur de ce programme, les crédits consacrés à la recherche de défense posent problème.

En revanche, les efforts faits dans le domaine du renseignement depuis le début de la loi de programmation militaire et notamment dans le projet de loi de finances 2012, pour renforcer la fonction « Connaissance et anticipation » ont porté leurs fruits. La direction générale de la sécurité extérieure a été renforcée, ce qui lui permet de remplir sa mission dans des conditions de réelle efficacité. De nombreuses améliorations ont été apportées en faveur du renseignement humain mais se pose la question des équipements, notamment dans le domaine spatial avec la transition entre HELIOS 2 et MUSIS. Par ailleurs, la France est en retard pour les drones dans le domaine du renseignement, comme on a pu le constater en Libye ou au Sahel.

Les crédits consacrés au soutien aux exportations diminuent mais ceux consacrés à la diplomatie de défense, qui joue aussi un rôle essentiel dans le soutien aux exportations, augmentent. Il y a là un phénomène de vases communicants, qui ne remet pas en cause l'action conduite à l'international par notre pays.

Les exportations de défense ont connu en 2011 un fléchissement alors qu'elles avaient augmenté fortement par le passé. Les perspectives sont meilleures pour 2012. La France est le quatrième exportateur mondial, mais, ses résultats sont deux fois moins bons que ceux du Royaume-Uni bien que ce pays ne produise pas d'équipement dans le domaine de la défense sur son sol. BAE a racheté United Defense aux États-Unis et est ainsi devenu un fournisseur majeur de l'armée américaine.

Le dispositif de contrôle des exportations d'armement a été remodelé notamment à l'occasion de la transposition en droit français des directives européennes sur les marchés d'armement et la circulation des produits sensibles. Cependant, les équipements informatiques qui servent à ce contrôle posent un problème qu'il convient de résoudre rapidement.

Je souhaite particulièrement insister sur la recherche de défense. Les autorisations d'engagement qui lui sont consacrées dans le projet de budget sont en diminution par rapport à 2011 et passent légèrement en dessous de la barre du milliard d'euros. Il en va de même pour les crédits de paiement. Ce n'est pas un affichage encourageant.

Cependant, les choses ne sont pas aussi simples que la simple présentation des chiffres peut le laisser penser.

En effet, les agrégats consacrés à la recherche sont multiples et s'emboîtent. On trouve tout d'abord les études amont, qui représentent 633 millions d'euros en 2012. Si on leur ajoute les subventions aux organismes de recherche, on atteint presque 900 millions d'euros pour l'agrégat « Recherche et technologie ». Un montant d'1,7 milliard d'euros est atteint si on y joint les études technico-opérationnelles (qui se situent en amont des études amont), les crédits de recherche relatifs à la dissuasion qui sont dans le programme 146 et les crédits du programme 191 « Recherche duale », qui sont affectés au CNES et au CEA. Enfin, si l'on rajoute à cet agrégat « Études de défense » les crédits relatifs au développement, on atteint la somme de 3,5 milliards d'euros.

L'analyse est encore plus complexe pour le nucléaire et le spatial, qui relèvent de trois programmes différents (programmes 144, 146 et 191). L'effort fait dans ce domaine est très difficile à estimer, pour des raisons de confidentialité.

Je souhaite maintenant aborder la situation de la recherche militaire en France. Il faut tout d'abord souligner que la recherche bénéficie non seulement de mesures budgétaires mais aussi de mesures fiscales très avantageuses, avec le crédit impôt recherche. Cette mesure permet aux entreprises de bénéficier d'un crédit d'impôt de 30 % des dépenses de recherche-développement jusqu'à un montant de 100 millions d'euros et d'un crédit d'impôt de 5 % au-delà de ce montant. Le crédit d'impôt recherche, particulièrement incitatif, est très important pour les entreprises et leur permet de réaliser la bascule entre recherche financée sur les fonds publics et recherche privée.

Beaucoup de nos interlocuteurs regrettent qu'il n'y ait pas un pilote institutionnel de la recherche mieux identifié et plus « influent ». En effet, les industriels ont affaire à de multiples interlocuteurs, ce qui leur pose problème et ils déplorent que la délégation générale de l'armement n'ait plus le rôle de pilotage politique qu'elle avait à travers la DRET, aujourd'hui supprimée.

Par ailleurs, il faut que la recherche militaire se préoccupe de la capacité des forces à tenir dans la durée.

Un autre axe essentiel dans l'avenir pour la recherche est le développement de coopérations. Le traité franco-anglais a permis d'avancer dans ce sens mais il faut aller au-delà. Autre point : si l'activité de l'agence européenne de défense reste trop peu importante, il faut cependant souligner que la France en est l'un des contributeurs majeurs.

Enfin, il faut évoquer le spatial militaire. Dans ce domaine, la baisse des crédits a été significative tandis qu'en parallèle, les crédits dévolus au nucléaire ont augmenté, ce qui constitue un vrai problème. Dans le domaine du renseignement d'origine électromagnétique, la relève des démonstrateurs n'est pas assurée. La mise en place de CERES est reportée d'année en année et on en est même à réfléchir à un CERES low cost. Ces atermoiements ont des conséquences sur les bureaux d'études. Je dis clairement que notre pays ne peut se permettre de relâcher son effort dans le spatial militaire. Le conflit libyen a illustré l'importance déterminante de cette fonction.

En conclusion, la recherche de défense a tenu bon malgré les réductions du format du budget et elle a profité du plan de relance. Je suis ainsi moins pessimiste que l'on pourrait l'être si l'on s'en tient uniquement aux chiffres.

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