Oui. Lors de la mise en place du fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaires, le vaccin grippal était pris en charge à 100 % parce qu'il ne s'inscrivait pas dans le colloque singulier entre le praticien et son patient face à un symptôme ou à une maladie, mais qu'il mettait en cause une relation à trois, le troisième provocant la rencontre entre le malade et le médecin et devant donc le financer, justifiant ainsi le tiers payant. Le tiers payant ou la gratuité pour la mammographie de dépistage n'a pas provoqué de révolte chez les radiologues. Ils ont accepté la double lecture, nécessité du dépistage. Il convient de bien différencier le soin, du dépistage et de la prévention.
S'agissant du cancer du sein, toutes les recommandations suggèrent le dépistage après cinquante ans. On a malheureusement en France un dépistage massif avant cinquante ans, bien qu'aucun avantage n'ait été démontré et qu'il ne semble pas qu'on puisse espérer une amélioration du pronostic. Les études randomisées ont fait l'objet d'une revue Cochrane en avril 2011. Rappelons qu'elle est l'oeuvre d'un groupe d'auteurs indépendants qui passe en revue un ensemble d'études publiées en fonction de leur qualité et propose des méta-analyses. Leurs conclusions sont donc très respectées. Une distinction y est faite entre les études absolument parfaites où le dépistage est considéré sans effet et les bonnes études qui montrent l'efficacité du dépistage. Personnellement je reste partisan du dépistage chez les femmes de plus de cinquante ans tous les deux ans, tel qu'il est pratiqué.
Il convient de remarquer par ailleurs qu'un dépistage, par définition, débusque des cas et les augmente ainsi artificiellement. Au début d'un dépistage apparaît une pointe qui se résorbe ensuite pour une population identique, le dépistage ne faisant que révéler les cancers plus tôt. Aussi, normalement, sur une période de dix ou quinze ans, le nombre total de cas doit être identique. Dans les faits, il apparaît que le nombre de cancers dépistés est légèrement supérieur, d'une part parce que d'autres causes de mortalité peuvent dissimuler les cancers non dépistés et d'autre part parce qu'il y a, dans le cas du cancer du sein, un sur-diagnostic qu'on estime à environ 5 % à 10 %, alors qu'il atteint 300 % à 400 % dans le cas du cancer de la prostate. La revue Cochrane évalue, elle, ce sur-diagnostic à 30 %. En conclusion et au vu de ces données, les recommandations restent en faveur du dépistage s'agissant du cancer du sein, mais sont totalement défavorables à tout dépistage du cancer de la prostate. En revanche, je regrette que le dépistage du cancer du col de l'utérus ne soit pas mieux organisé.