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Intervention de Laurent Chambaud

Réunion du 20 octobre 2011 à 9h00
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Laurent Chambaud, inspecteur général des affaires sociales :

Faut-il transférer des compétences ? Mon sentiment personnel, des expériences ayant déjà été faites dans ce domaine, est que les actions de prévention, et notamment les pratiques de clinique préventive, doivent être complètement intégrées à l'action de l'ensemble des professionnels de santé et pas seulement des médecins. La répartition des compétences pose des problèmes partout, y compris au Québec, entre les différents professionnels de santé. Un débat est nécessaire sur ce point même si l'histoire de la constitution de ces professions, spécifique à chaque pays, est un élément explicatif incontournable.

Je peux cependant vous délivrer un message d'espoir : dans mes fonctions à l'inspection générale des affaires sociales avant de rejoindre l'agence régionale de santé de l'Île-de-France, j'ai participé à une mission sur les maisons de santé pluridisciplinaires. Il y a moins de deux ans, donc, nous avons auditionné les syndicats des professionnels de santé successivement, mais les jeunes professionnels, internes, étudiants infirmiers et autres ont décidé de produire un mémoire commun. Des évolutions de la perception des modalités de l'exercice professionnel sont donc en cours, elles doivent être accompagnées sur le plan financier. Un consensus est en voie d'élaboration sur ce plan aussi. Il ne s'agit pas de passer de la rémunération à l'acte au salariat ou à la capitation totale, mais de mettre en place des formules mixtes permettant de respecter, par exemple dans le cas des maladies chroniques, un mode de forfaitisation, seul à même d'assurer un suivi sur le long terme des populations concernées ou, dans d'autre cas, des formes de capitation ou, comme au Royaume-Uni sur des points précis, d'actes. Cette approche mixte se retrouvera dans les financements des modes groupés, les centres de santé, les maisons de santé pluridisciplinaires, voire les pôles de santé. Les modalités d'intervention dans les différents actes de prévention peuvent dès lors être différentes selon que l'on est médecin, infirmière, kinésithérapeute, chirurgien-dentiste. La France en est, sur ce point, au tout début.

Les analyses de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé se fondent sur des études scientifiques, mais la lutte contre l'obésité ne se résume pas à l'interdiction de la publicité. Le problème de l'obésité et du surpoids au Québec comme au Canada n'est pas comparable avec la situation française. L'interdiction de la publicité pour les enfants est une mesure passive, sans aucune intervention des enfants ou de leur famille. En terme de prévention, les mesures passives réduisent les inégalités alors que les mesures actives les accentuent. Cependant l'exemple du Québec montre que ce n'est pas suffisant. Le contexte économique, social et culturel joue en effet un grand rôle. Les réalités en matière d'obésité au Québec, même si elles y sont un peu moins impressionnantes que dans d'autres provinces canadiennes, sont ainsi complètement différentes des nôtres. Les seules mesures passives, isolées du contexte général, ne sont donc pas suffisantes. On constate ainsi qu'au Québec l'obésité et la mauvaise nutrition concerne la majorité de la population. En France, en revanche, pour des raisons qu'il serait intéressant d'étudier, ce n'est pas le cas et si la question du surpoids chez les enfants reste une préoccupation dans certains milieux, on observe parallèlement une accentuation des inégalités en la matière. Dans ce cadre complexe, néanmoins, je maintiens que des mesures passives, quand elles sont possibles, sont de loin préférables.

Ai-je des modèles ou des méthodes en matière de conflits d'intérêt ? Au risque de vous décevoir, non. Tous les pays que je connais ont à s'y confronter. La solution relève de la négociation politique. Je reste persuadé que le débat démocratique peut aider les pouvoirs publics à prendre les décisions qui s'imposent.

Rémunérer la prévention dans le cadre des pratiques cliniques préventives que j'ai définies devrait être possible. Un forfait sur l'éducation thérapeutique du patient comprendrait cet aspect, comme la prise en charge de la vaccination ou des dépistages, dans le cadre de la capitation ou d'autres modes de rémunération. La seule prévention qui ne serait pas concernée est la prévention primaire qui, de mon point de vue, est une question sociétale, ses actions relevant donc d'un financement collectif.

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