L'évaluation est en effet nécessaire. À ce jour, environ cent cinquante mille personnes sont parties prenantes du programme Sophia quand l'ensemble des réseaux nationaux dédiés au diabète en compte vingt-huit mille. L'impact est d'ores et déjà considérable en termes d'information et d'accompagnement : comment organiser l'activité physique des patients, leur alimentation, l'usage des médicaments et du système de soins, etc.
Le pourcentage de vaccinations contre le virus HPV au Royaume-Uni ne m'a pas, quant à lui, étonné en raison de l'organisation du système de soins : la population étant rattachée à des cabinets de médecins généralistes, ces derniers vérifient au fil des consultations si ce qui doit être fait l'a été. Ainsi 95 % des diabétiques de type 2 bénéficient-ils annuellement d'un examen de fond d'oeil contre 45 % chez nous. Les patients britanniques, en l'occurrence, ne se rendent pas chez un ophtalmologiste car un rétinographe permet de réaliser l'examen chez le médecin généraliste.
Nous disposons d'une politique de dépistages individuels et collectifs des maladies du sein ainsi que colo-rectales et les frottis cervico-vaginaux sont désormais inclus dans la convention de rémunération sur objectif de santé publique. Des progrès seront donc sans doute réalisés auprès des 30 % de la population qui ne bénéficient pas de ce dernier examen mais qui se rendent cependant chez leur médecin traitant, lequel est le mieux placé pour les solliciter – ce qui ne signifie pas qu'il réalisera lui-même l'examen.
Outre les dépistages organisés, il en est de spontanés. Si nous avons choisi de ne pas rendre obligatoire les dépistages organisés – bien qu'ils soient bien meilleurs en termes de qualité en raison d'une double lecture – car, chez nous, le drapeau de la liberté flotte très haut, il nous semble toutefois important de faire évoluer les comportements et les mentalités en expliquant l'intérêt qu'il y a à bénéficier de programmes performants. Il serait également possible de ne plus rembourser des mammographies de dépistage spontanées mais, outre que cela ne serait pas de bonne politique, des difficultés ne manqueraient pas de surgir : laissons donc leur liberté aux individus et continuons d'additionner le dépistage spontané et le dépistage organisé puisque nous avons les moyens de le faire, tout en étant déterminés à montrer combien le dépistage organisé est préférable !
Les campagnes de vaccination, quant à elles, relèvent à mon sens de la responsabilité de l'État : je ne peux pas imaginer que des industriels du médicament proposent des programmes qui n'auraient pas été décidés par ce dernier. Il s'agit là d'actions populationnelles qui ne sont pas sans risques et qui doivent être sereinement décidées. L'essentiel, une fois qu'il en est ainsi, c'est qu'elles soient menées à bien. Il faut bien constater que la programmation de nombre de campagnes de vaccination n'ayant pas été ultimement décidée échoue. Les pouvoirs publics doivent faire savoir qu'ils recommandent telle ou telle vaccination, les différents opérateurs – dont l'assurance maladie – agissant ensuite de manière à assurer son succès. Le travail des laboratoires, c'est de trouver des vaccins utiles pour les populations en France et dans le monde, ce qui est déjà beaucoup !
L'hypertension artérielle légère, qui est la plus massive, se combat également par une hygiène de vie. L'alcool étant le plus grand hypertenseur en France, nous savons que la tension artérielle d'une personne dépendante qui arrête sa consommation d'alcool baisse. Il en est de même en ce qui concerne la consommation de sel : sa diminution d'un gramme par jour constituerait d'après une étude américaine une opération des plus rentables en termes de santé publique. Un dollar investi, ce sont quinze dollars récupérés ! En la matière, nous sommes au coeur du paradoxe de la prévention puisqu'une mesure appliquée à beaucoup ne profite qu'à quelques-uns – six pour mille en ce qui concerne les mammographies. La logique de la prévention implique une exécution au cordeau.
Bien des personnes connaissant une hypertension artérielle sévère – laquelle vient donc de sortir de la liste des affections de longue durée – souffrent également d'une autre pathologie et demeurent comme telles inscrites en affections de longue durée – je vous rappelle d'ailleurs que l'on enregistre depuis peu l'ensemble des motifs d'inscription. De surcroît, nous sollicitons nos cinquante mille médecins généralistes afin qu'ils suivent mieux l'hypertension artérielle, leur objectif dans le cadre de la rémunération à la performance étant de parvenir à normaliser 60 % de leurs dix millions de patients qui en sont atteints. Cela aura un autre impact que l'exclusion de quelques centaines de milliers de personnes dont le traitement sera pris en charge par leur régime complémentaire – si l'on considère que c'est injuste, il faut alors introduire aussi l'hypercholestérolémie parmi les affections de longue durée !
Notre programme de prévention des maladies cardio-vasculaires, quant à lui, est extrêmement important puisqu'il touche 2,3 millions de personnes chaque année.