Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, une fois encore, nous ne pouvons que déplorer que le projet de loi de financement de la sécurité sociale se borne à des questions financières en excluant toute problématique de santé publique.
Pour étayer mon propos, je prendrai l'exemple de l'article 16, relatif aux taxes applicables aux alcools fortement titrés. Cette mesure, dont le rendement est estimé à 340 millions d'euros, s'inscrit, soutenez-vous, dans le cadre de votre politique globale de lutte contre la consommation excessive d'alcool. Si l'on peut comprendre le lien entre le prix et le niveau de consommation, on ne peut que regretter une fois de plus que la fiscalité seule vous tienne lieu de politique de santé publique. Toutes les études montrent qu'en termes d'amélioration des pratiques sanitaires et des comportements de santé, il faut associer une mesure portant sur les prix à une amélioration de la prise en charge des comportements à risque. Autrement dit, la seule logique financière n'a aucun impact si elle n'est pas conjuguée à une politique de prévention primaire, secondaire et tertiaire. Vous augmentez les prix mais ne prévoyez pas de consultations d'alcoologie ni d'augmenter les moyens ou le nombre des professionnels aptes à suivre les malades tout au long du processus de sevrage.
Autre exemple : la nouvelle augmentation du prix du tabac. Devant les ravages que provoque ce fléau sanitaire, la mesure s'explique : en France, chaque année, 60 000 personnes meurent prématurément à cause du tabac. L'ambition est noble et juste. Tous, ici, nous partageons les enjeux de santé publique mais, là encore, vous oubliez de renforcer les moyens des consultations en tabacologie. En ne proposant pas une prise en charge des fumeurs qui souhaiteraient s'arrêter, vous favorisez les comportements de substitution à la distribution classique que sont les achats en contrebande et les achats frontaliers.
Enfin, le produit de la taxe sur les sodas que vous proposez comme moyen de lutte contre l'obésité doit finalement être affecté aux revenus des agriculteurs. Où se trouve la logique de santé publique ?
Plus largement, ces trois exemples illustrent votre abandon de toute politique de santé publique.
Contrairement à ce que l'on nous a expliqué commission, les préoccupations de santé publique ont bien leur place dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Et comme l'a souligné notre collègue Denis Jacquat, il faudra bien qu'un jour nous ayons enfin un vrai débat sur la politique de santé publique.