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Intervention de Dominique Orliac

Réunion du 25 octobre 2011 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Orliac :

Madame la présidente, mesdames les ministres, le Gouvernement a joint au PLFSS 2012 une annexe B décrivant de grandes hypothèses économiques optimistes avec une prévision de croissance de 1,75 %, alors que tous les organismes économiques français et internationaux l'estiment deux fois moins élevée.

Ces données sont peu réjouissantes, puisque l'ajustement de la prévision de croissance et la baisse probable des cotisations sociales engendreraient un sous-financement de l'assurance maladie de 5 à 10 milliards d'euros, alors même qu'il faudrait défendre un financement équilibré de la sécurité sociale et la pérennité de l'équilibre des comptes, si nous voulons garantir l'avenir de l'assurance maladie et de la sécurité sociale.

Depuis cinq ans, vous avez tenté de répondre à ce déficit chronique par de nombreuses mesures qui portent gravement atteinte à la justice sociale et touchent les plus modestes : les franchises médicales, la hausse du forfait hospitalier, ou encore la taxation des mutuelles, qui menace l'accès aux soins, en particulier pour les étudiants et les seniors qui se « démutualisent ». Aujourd'hui, un tiers des Français disent avoir reporté des soins médicaux ou y avoir renoncé en raison de difficultés financières, alors qu'ils n'étaient que 11 % en 2009 et 23 % en 2010. Ce taux est le plus élevé d'Europe.

Pour rétablir les comptes, profitant du scandale du Mediator, vous n'avez trouvé, à côté des ponctions sur les complémentaires, que les économies sur le médicament. Vous déremboursez tout ce qui peut l'être. Sans vous soucier des discordances entre la commission d'AMM et la commission de transparence, vous baissez le prix de ce que vous ne pouvez pas dérembourser. Ces mesures vont encore affaiblir l'industrie pharmaceutique française et renforcer notre dépendance vis-à-vis de l'étranger, avec, à terme, un coût financier élevé. Avec ces transferts, le reste à charge payé par les malades bat tous les records : 16,3 % sur les dépenses de médicaments, alors que nos cotisations sociales, là aussi, sont les plus élevées d'Europe. Le patient paie donc ce que l'assuré social ne peut plus payer. Le problème, c'est que l'un et l'autre sont les mêmes. Cela s'appelle la double peine.

De plus, certaines mesures de déremboursement ne génèrent plus d'économies, le transfert de prescription vers des médicaments remboursés s'avérant souvent plus coûteux. Vous reconnaissez vous-mêmes que vous n'en attendez plus d'économies.

Pourquoi ne pas imposer à la commission de transparence de suivre les avis de la commission d'AMM qui avait exprimé que tous les produits d'une même indication devraient être traités de la même façon, ce qui n'a pas été le cas dans votre dernier arrêté de déremboursement ?

C'est maintenant la baisse des indemnités journalières, introduite dans le PLFSS, qui vient s'ajouter à la précédente réduction de l'indemnisation des accidents du travail. C'est une mesure d'économie injuste et stigmatisante pour les salariés malades, qui va entraîner une diminution de près de 6 % de l'indemnisation pour les 7 millions de salariés dont l'état de santé nécessite un arrêt maladie. Or, près de 30 % des non-cadres ne disposent d'aucun complément pour compenser cette chute de revenu, avec pour conséquence, là aussi, un impact lourd sur les entreprises.

Côté économies, l'ONDAM pour les soins de ville et les soins hospitaliers, fixé à 2,8 % est déjà insuffisant et ne pourrait souffrir de diminution, même si nous sommes dans un contexte fortement dégradé de croissance économique. L'avenir de la CADES est inquiétant car elle devra encore reprendre les déficits des branches maladie et famille, transférant la dette sur les générations futures.

L'accès à des soins de qualité pour tous, qui semblait une préoccupation de votre gouvernement, a donné naissance à plusieurs missions dont les conclusions ont été ignorées. La volonté d'allégement des charges administratives, libérant du temps médical, n'est toujours pas suivie d'effet ! Autre exemple : l'effet d'annonce concernant les maisons de santé pluridisciplinaires, dont le nombre et le financement sont cruellement insuffisants.

La baisse de la démographie médicale pourrait être en partie palliée en faisant appel à des médecins exerçant leur activité professionnelle dans le cadre d'un cumul emploi-retraite, qui pourraient être exonérés de cotisations d'assurance vieillesse lorsqu'ils exercent dans des zones sous-dotées. Ce serait un élément de réponse au défi de la pénurie médicale. Il y a aujourd'hui 10 978 médecins retraités, mais ils sont rebutés par le paiement de cotisations n'ouvrant pas droit à prestations.

Alors, si le PLFSS 2012 est parfois un PLFSS d'ouverture, comme pour les pharmaciens avec l'article 39, c'est surtout un PLFSS de rigueur pour d'autres spécialités médicales : radiologues, biologistes ou encore masseurs-kinésithérapeutes, eux-mêmes touchés par la mise en place de référentiels qui ne s'appliquent qu'aux soins de ville alors que la loi est claire.

En conclusion, ce PLFSS ne témoigne d'aucune vision ni perspective de santé publique. Il laisse un lourd déficit à la sécurité sociale, particulièrement à l'assurance maladie, en raison de recettes insuffisantes – au demeurant parfois scandaleuses comme la taxe sur les mutuelles – car ce ne sont pas les dépenses qui dérapent. On ne peut que condamner les hypothèses de croissance non sincères de ce gouvernement et regretter le report de la réforme, pourtant indispensable, sur la dépendance. Vous l'aurez donc compris, les députés radicaux de gauche ne pourront pas apporter leurs suffrages à ce texte.

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