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Intervention de François de Rugy

Réunion du 25 octobre 2011 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2011 — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

Une telle démarche peut se comprendre parce qu'il faut trouver des réponses rapides à la situation créée par la faillite annoncée de Dexia, mais elle doit être accompagnée d'une garantie forte de l'État. Vous savez très bien qu'en 2008, déjà, les responsables de la Caisse des dépôts ont mis le holà à certains engagements que le Président de la République voulait leur faire prendre. Je réitère ici l'interrogation de Jean-Vincent Placé au Sénat : on peut se demander à juste titre pourquoi le portefeuille risqué qui lui échoit n'est garanti que dix ans…

Quant à la Banque postale, qui est le premier collecteur de l'épargne des Français via le livret A – l'épargne populaire –, comment pourra-t-elle faire face à son nouveau rôle de financement des collectivités locales sans fonds propres nouveaux ? Et ces fonds, où ira-t-elle les lever ? Dans quelles conditions financières ? Sur un marché où régneront quelles règles ?

Monsieur le ministre, au-delà du texte qui nous est proposé aujourd'hui, il y a bien un problème politique, auquel il va falloir apporter des solutions. En travaillant sur le dossier Dexia, j'ai retrouvé une note que j'avais prise il y a trois ans, suite à une audition de M. Noyer, le gouverneur de la Banque de France, devant la commission des finances. Voilà ce que déclarait alors un responsable peu suspect de sympathies « collectivistes » – pour reprendre une épithète qui nous a été accolée. « Il conviendrait », disait M. Noyer le 7 octobre 2008, « de repenser sans tabou l'ensemble de notre réglementation financière : le système des agences de notation, la gestion des risques, l'organisation des marchés, la question des rémunérations, celles-ci ne devant plus inciter au "court-termisme" et à la prise de risques excessifs. On pourrait, par exemple, envisager un code de bonne conduite des banques, dont la violation serait sanctionnée par des exigences plus sévères en termes de fonds propres. »

Trois ans après – l'affaire qui nous occupe cet après-midi en est la triste illustration –, où en est-on de ces questions ?

Les agences de notation continuent de faire la pluie et le beau temps et donnent le la à votre politique budgétaire. Vous le reconnaissez vous-mêmes.

La gestion des risques n'a jamais été aussi aléatoire et les mécanismes prudentiels continuent de faire la preuve de leurs défaillances. Dexia en est la triste illustration !

L'organisation des marchés s'apparente toujours, pour beaucoup, à la loi de la jungle, car la taxation des transactions financières piétine.

Quant à la question des rémunérations, on s'est enfin résolu à l'aborder, mais en la limitant aux banques aidées, alors qu'elle devrait être prise à bras-le-corps, et des règles très strictes appliquées à tout organisme bancaire ou financier.

Enfin, pour ce qui est des exigences en matière de fonds propres, faute d'avoir régulé cette question des rémunérations et brisé cette logique prédatrice qui les sous-tend, nous y sommes, et les gouvernements européens s'apprêtent à relever leurs exigences sur la question, ce qui sera extrêmement difficile compte tenu de la réalité des marchés, et nécessitera sans doute, dans les prochaines semaines, de nouvelles garanties publiques, avec un corollaire inévitable : la dégradation de la parole financière de l'État et une nouvelle perte de confiance dans votre parole, monsieur le ministre, celle du Gouvernement.

Nous savons pertinemment que cette motion de rejet préalable ne sera pas adoptée. Mais en la défendant, et en demandant aux groupes de l'opposition de la voter, les écologistes que je représente veulent clairement signifier que l'indispensable intervention publique pour accompagner le démantèlement de Dexia est la conséquence de choix politiques qu'il vous faut, vous et votre majorité, assumer.

En nous abstenant tout à l'heure, lors du scrutin sur le texte proprement dit, nous démontrerons que cette exigence d'une politique nouvelle va de pair avec un esprit de responsabilité. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

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