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Intervention de général d'armée aérienne Jean-Paul Paloméros

Réunion du 11 octobre 2011 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

général d'armée aérienne Jean-Paul Paloméros :

C'est avec fierté et plaisir que je me présente devant vous pour la troisième fois. Cette année, mon audition revêt effectivement une dimension particulière, l'armée de l'air ayant connu un niveau d'engagement sans précédent, voire exceptionnel, sur de nombreux théâtres, dont le théâtre libyen. Je tiens à souligner, comme vous venez de le faire, la compétence, l'abnégation et la détermination de nos militaires, et en particulier celles de nos aviateurs. Ils ont été au rendez-vous des missions fixées par le chef de l'État. Ils sont aussi au rendez-vous d'une réforme indispensable, mais ô combien difficile.

Voilà environ un an, peu de temps après vous avoir présenté nos capacités en Provence, je déclarais qu'« une armée de l'air moderne, tournée vers l'avenir, est loin d'être un luxe. C'est, à mes yeux, un atout indiscutable pour une Nation qui veut compter sur la scène internationale ». Les événements qui se sont déroulés depuis ont largement illustré ces propos. Si notre pays a pu imposer sa voix dans le concert des nations et être un élément moteur de la mobilisation internationale qui a permis au peuple libyen de prendre en main son destin, l'action de l'armée de l'air y a été essentielle. Notre pays aurait-il pu réunir autant de nations autour de la résolution 1973 de l'ONU s'il n'avait pas disposé d'une armée de l'air capable, dès les premières décisions, dès les premières heures, d'imposer non seulement une zone d'interdiction aérienne au-dessus du territoire libyen, mais aussi d'empêcher les forces de Kadhafi d'intervenir à Benghazi, sauvant ainsi vraisemblablement cette ville du carnage ? La puissance aérienne a démontré par cette opération, si tant est qu'il en était encore besoin, toute sa justification et toute sa pertinence dans les crises actuelles.

C'est par cette dimension opérationnelle que je souhaite débuter mon propos, pour faire écho au niveau d'engagement exceptionnel de nos aviateurs dans le vaste éventail des missions qui leur sont confiées. Dans un deuxième temps, je dresserai un état des lieux, comme vous m'y avez invité, de la réforme de grande envergure qui touche notre institution, et d'abord ses hommes et ses femmes. Enfin, je terminerai en évoquant les perspectives de modernisation de l'armée de l'air, de ses capacités actuelles et futures, à l'aune du retour d'expérience des opérations et du projet de loi de finances 2012.

À ce jour, environ 4 000 aviateurs et une centaine d'avions et d'hélicoptères de l'armée de l'air sont engagés hors du territoire métropolitain dans le cadre d'opérations extérieures (OPEX) ou de prépositionnement de forces. Cette aptitude à la projection s'est particulièrement illustrée lors de notre implication dans l'opération Harmattan en Libye. Mais nous en avons la démonstration au quotidien depuis dix ans en Afghanistan, jour pour jour, et bien plus encore en Afrique et sur d'autres théâtres.

Lorsque je me suis rendu devant votre commission pour expliquer et donner quelques éléments d'éclairage sur l'opération que nous avions engagée en Libye, j'ai souligné que notre action devait s'inscrire dans la durée.

Dès le 23 février, il nous a fallu évacuer nos ressortissants. Nous l'avons fait dans l'ordre, grâce à nos avions de transport stratégique et à la capacité d'anticipation de nos politiques et de nos militaires. Que serait-il advenu si nous avions tergiversé et attendu ?

La campagne de renseignement menée en amont des opérations a permis d'établir un ordre de bataille : grâce aux Mirage F1 équipés du pod ASTAC et du C160 Gabriel, les moyens aériens y ont joué un rôle prédominant, qu'on n'a sans doute pas suffisamment souligné. Ainsi, dès le premier jour, le 19 mars, nous avons pu lancer les premiers raids avec des Mirage 2000-5, des Mirage 2000D ainsi que des Rafale. Cette capacité dite « d'entrée en premier » a été déployée avec un bon degré de maîtrise des risques et sans une appréhension trop forte de la menace, que nous avions pu évaluer à sa juste mesure. Cela nous a évité des opérations lourdes de destruction des menaces aériennes, qui auraient sans doute fragilisé les opérations elles-mêmes. Deux atouts ont permis cette performance : le maintien d'une posture permanente en France et l'aptitude à passer très rapidement, voire instantanément, du temps de paix au temps de crise sur nos bases aériennes. Ces dernières ont ainsi justifié leur vocation d'« outils de combat », que ce soit au service de la posture permanente de sûreté ou d'opérations extérieures comme celle-ci.

Je tiens à souligner un autre facteur clé du succès des opérations : la maîtrise de la violence, qui est demeurée en permanence proportionnelle aux objectifs politiques recherchés, ce qui n'était pas aisé. En somme, la puissance aérienne a permis un emploi précis, retenu et dosé de la force au travers d'une large palette d'effets, allant du tir d'opportunité à la frappe conventionnelle, y compris stratégique, avec des missiles de croisière. Nous sommes donc très loin des bombardements massifs d'antan : 100 % de nos tirs ont été des tirs de précision, effectués dans le strict respect des règles d'engagement et avec le souci constant d'épargner la population que nous étions venus sauver.

Par ailleurs, et cela me semble intéressant pour les choix à venir, l'empreinte humaine générée par l'armée de l'air est restée en permanence limitée – avec une moyenne d'une vingtaine de personnes par avion de chasse –, quelles que soient les plateformes de déploiement à partir desquelles nous avons été amenés à opérer. L'emploi de l'arme aérienne a ainsi permis de répondre à des objectifs politiques ambitieux pour un coût financier et humain maîtrisé. En Crète, encore aujourd'hui, 310 aviateurs sont déployés pour servir seize avions de chasse. Ce ratio me paraît satisfaisant et favorable; il est en tout cas inférieur à celui de la plupart de nos alliés.

Je précise que ces opérations ont été menées dans une période de transition, caractérisée par des réformes profondes, en particulier de notre soutien. Cette expérience démontre que les bases de défense fonctionnent correctement et qu'elles ont pu apporter le soutien nécessaire.

Dès le début de l'opération, j'avais demandé à l'armée de l'air de se préparer à durer. C'est ce qu'elle a fait. Aujourd'hui encore, nos avions volent au-dessus de la Libye, une vingtaine de sorties étant effectuées quotidiennement, soit pour renseigner, soit pour intervenir. Évidemment, le rythme des interventions a baissé. Mais nous sommes toujours présents et ce jusqu'à la fin des opérations.

L'opération Harmattan a démontré la forte capacité de notre armée de l'air à travailler avec ses partenaires étrangers. Nous avons accueilli et soutenu nos amis qataris et émiratis. Nous avons également travaillé de manière constructive avec nos partenaires européens du commandement européen du transport européen (EATC) créé voici à peine un an.

Cet engagement de haute intensité ne doit pas nous faire oublier les autres théâtres d'opérations et prépositionnements, auxquels nous continuons à participer avec la même constance et la même efficacité : l'Afghanistan, les Émirats Arabes Unis, où cinq de nos Rafale sont déployés en permanence, Djibouti, le Tchad, où nous maintenons également des avions de combat. J'observe que le nombre et la diversité des théâtres d'opérations sur lesquels nous sommes engagés ont évidemment un prix, notamment en termes humains. Le fait d'être présents sur tout l'arc de crise, tel qu'il avait été défini par le Livre blanc, implique des efforts de reconstitution de notre potentiel.

Ces missions opérationnelles menées hors de notre territoire ne peuvent pas nous faire oublier la contribution de l'armée de l'air aux missions permanentes. Dans le même temps nous devons assurer, et c'est même une priorité, notre contribution à la dissuasion nucléaire.

J'avais insisté l'an dernier sur la rénovation de notre composante, qui est maintenant terminée. L'ASMP-A équipe un escadron de Mirage 2000N et de Rafale. La réduction d'un tiers du format des armes est aujourd'hui effective. L'ensemble de ces avions, que ce soit les Rafale de Saint-Dizier ou les Mirage 2000N d'Istres, contribuent directement aux opérations en Libye, ce qui prouve leur polyvalence et leur aptitude à mener aussi bien des missions nucléaires que des missions classiques. Ces moyens sont certes prévus, préparés, entraînés pour la dissuasion nucléaire, pour cette mission d'excellence, mais ils sont également utilisables et utilisés pour des missions conventionnelles. Il en est d'ailleurs de même de nos ravitailleurs. Ainsi ne peut-on plus dire aujourd'hui que la composante aéroportée est strictement dédiée à la mission de dissuasion nucléaire. Le fait qu'elle soit utilisable dans un vaste spectre de missions participe à l'optimisation de nos moyens et de nos outils. C'était ce que nous souhaitions. L'opération Harmattan a été l'occasion de le démontrer.

Une autre de nos missions permanentes est celle de la police du ciel. Cette année n'a pas échappé à la règle. Il en va de la sûreté de notre pays et de son espace aérien. À l'aune de l'anniversaire du 11 septembre 2001, une telle mission, qui fait appel en permanence à 900 aviateurs, reste une priorité.

Ces nombreuses opérations ne doivent pas cacher la véritable préoccupation qui est la mienne – au-delà de la préoccupation humaine : le maintien en condition opérationnelle (MCO) de nos appareils, qui garantit la disponibilité de nos équipements et le moral de nos équipages. Cette « bataille du MCO », nous l'avons en partie gagnée. J'en veux pour preuve le fait que depuis près de sept mois, nous volons en permanence en Libye et en Afghanistan et sur tous les théâtres que j'ai rappelés, avec une disponibilité de l'ordre de 95 %.

Cet effort a évidemment un prix et une influence sur l'entraînement et la régénération de nos forces. Ainsi nos jeunes ont-ils moins volé que nous ne l'avions prévu : de 110 à 130 heures pour les pilotes de chasse, alors que nos objectifs sont de l'ordre de 180 heures, conformément aux standards de l'OTAN. Dans le cadre des perspectives pour 2012, je considère qu'il est prioritaire de donner à nos jeunes pilotes les moyens de s'entraîner et de se préparer aux opérations futures avec le même niveau de compétence que leurs anciens, même si l'expérience de ces derniers est déjà pour eux un facteur de motivation. À cet effet, nous avons besoin des crédits de MCO prévus dans le décret du recomplètement du budget OPEX, dit « décret d'avance sur les OPEX ». Notre demande est de l'ordre de 120 millions d'euros. Mais il ne faut pas se leurrer, la régénération doit s'inscrire sur un plus long terme, c'est-à-dire au-delà de 2012. À ce stade, j'évalue à une cinquantaine de millions d'euros l'effort supplémentaire qui sera demandé. Il conviendra de le confirmer en 2012.

Il est clair que les résultats d'aujourd'hui sont directement la conséquence des efforts que nous avons consentis hier et du soutien que vous nous avez apporté pour gagner la bataille de la disponibilité et du MCO. D'importantes réformes ont été menées, dont le déplacement d'un certain nombre d'instances comme celui de la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) vers Bordeaux, ou la concentration des moyens en pôles de compétences. Mais nous n'aboutirons que si nous menons une politique constante, en particulier en ce qui concerne les ressources financières et humaines.

J'en viens à l'état des lieux de la réforme. On aurait tort d'oublier que toutes ces opérations sont vécues par notre personnel sur un fond de restructurations profondes.

Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, l'objectif de déflation est de 15 900 aviateurs pour un format cible qui sera inférieur à 50 000, dont un quart travaillera d'ailleurs à l'extérieur de l'armée de l'air dans des missions de soutien interarmées, soit 25 % du format initial de l'armée de l'air en 2008. Entre 2008 et 2011, nous avons supprimé 7 360 postes. En 2012, la déflation annuelle des effectifs de l'armée de l'air sera de 2 200 postes ; elle sera atteinte, je m'en porte garant.

Ces efforts, qui sont considérables, se traduisent de manière visible. Ne serait-ce que sur la période 2008 – 2010, c'est-à-dire sur trois ans, la diminution des effectifs de l'armée de l'air s'est concrétisée par une économie nette de masse salariale que j'estime à 300 millions d'euros, en intégrant dans ce décompte les mesures d'incitation au départ. Et l'année 2011 n'échappera pas à la règle.

Nous terminerons la gestion 2011 pour l'armée de l'air à 17 millions d'euros près, c'est-à-dire à 0,5 % de la masse salariale qui nous était fixée. J'y vois le signe d'une gestion particulièrement rigoureuse, notamment de la part de la direction des ressources humaines. Ce résultat n'est pas dû au hasard : nous avons pris des mesures en matière d'effectifs, d'avancement et même de recrutement afin de respecter les termes de la réforme. L'armée de l'air croit en cette réforme ; elle a confiance et tient ses engagements. Bien entendu, les aviateurs en attendent les dividendes.

La réforme se traduit aussi par la fermeture de nombreuses implantations, qui engendre progressivement des économies de fonctionnement. Ces économies sont reversées au budget de soutien de l'ensemble des implantations de défense et non pas strictement au budget de l'armée de l'air. Ce n'est qu'un changement de référentiel.

En 2011, la base de Reims a été complètement fermée et celle de Taverny l'a été en grande partie. En 2012, l'effort sera encore plus grand puisque nous fermerons quatre bases principales : Brétigny, Cambrai, Metz et Nice, ainsi que trois bases outre-mer : la Réunion, Papeete et les Antilles. Ainsi, en l'espace de quatre années, nous aurons fermé 12 bases aériennes.

Les hommes et les femmes de l'armée de l'air consentent des efforts considérables pour mener à bien cette réforme. Ils en attendent légitimement des effets positifs et concrets. Il faut que l'outil de travail suive et soit à la hauteur de la motivation et de l'engagement de nos hommes et de nos femmes. Cette modernisation doit se traduire dans leurs conditions de vie. De nombreuses avancées ont eu lieu : nouvelles grilles indiciaires et diverses mesures, que je ne cesse de faire valoir auprès de mes troupes. Les militaires doivent pouvoir vivre en harmonie avec leur société. Cela implique que nous soyons vigilants.

La réforme passe aussi par la modernisation de notre armée de l'air et de ses équipements. Nous essayons de la conduire en fonction du retour d'expérience des différentes et nombreuses opérations que nous menons. Nous avons la chance de passer au filtre de la réalité nos visions de l'avenir et nous ne nous en privons pas.

Nous retenons de ce retour d'expérience que nous devons être attentifs au maintien des compétences et à la satisfaction des nouveaux besoins, en particulier dans le domaine du renseignement, des systèmes d'information et de communication ou de la maintenance aéronautique. Nos hommes et nos femmes doivent être capables d'analyser les informations qui affluent à différents niveaux. Les nouveaux systèmes d'information exigent des experts pour assurer leur sécurité, de plus en plus souvent mis en danger par les cybercriminels. La maintenance aéronautique suppose non seulement des moyens financiers, mais encore des bras et des têtes. En ce domaine aussi, il nous faudra veiller au niveau de compétence requis et au nombre de spécialistes à conserver au sein de notre institution.

S'agissant des équipements, les opérations en Libye ont montré, dès le 19 mars, la polyvalence du Rafale. Je me suis récemment rendu en Inde pour en faire la démonstration à mes homologues indiens, et j'ai été surpris de découvrir qu'ils n'étaient pas au fait de notre performance opérationnelle, en tout cas pas de celle du Rafale. Les faits ont d'ailleurs confirmé que cet avion pouvait assurer des missions défensives, offensives et de reconnaissance, comme aujourd'hui à partir de la Sicile, avec des armements très divers : armements guidés laser, armements tirés à distance de sécurité comme nos armements sol-air modulaires et missiles de croisière. C'est le seul avion au monde capable de réaliser une telle prouesse aujourd'hui et nous avons tout lieu d'en être fiers. Il faut le faire savoir.

Pour ce qui est des perspectives d'avenir, le Livre blanc prévoit que la composante aérienne projetable se compose à l'horizon 2020 d'un parc unique d'avions polyvalents de type Rafale et Mirage 2000. À l'aune du retour d'expérience, cet objectif confirme sa pertinence : toutes les flottes de l'armée de l'air et de l'aéronavale ont été et sont employées pour les opérations en Libye et en Afghanistan. Actuellement, trois de nos Rafale et trois de nos Mirage 2000D sont positionnés en Afghanistan, ce qui préfigure bien le format de l'armée de l'air du futur.

Je considère que la rénovation à mi-vie du Mirage 2000D, bien que repoussée pour des besoins budgétaires, demeure une opération indispensable pour maintenir la cohérence de notre outil de combat aérien. Cette rénovation, d'un coût unitaire modeste, fera du Mirage 2000D un aéronef polyvalent, qui pourra assurer, entre autres, les indispensables missions de police du ciel dans notre espace aérien.

Enfin, au-delà de l'analyse qualitative, le retour d'expérience des opérations démontre toute la nécessité de disposer d'une flotte de combat en quantité suffisante pour tenir dans la durée. C'est l'objet de l'analyse des formats que nous devons continuer à conduire, les éclairages fournis par le Livre blanc prouvant leur pertinence.

Notre flotte se compose d'environ 250 avions de combat en ligne. Nous avons engagé la réduction prévue par le Livre blanc – un tiers de l'aviation de combat sur cinq ans – et nous sommes un peu en avance sur cet objectif. Précisons que, sur ces 250 appareils, certains Mirage F1CT et Mirage 2000C, utilisés en Libye, seront retirés du service dès le début de l'année 2012.

Les opérations actuelles confirment le caractère primordial de la fonction stratégique connaissance et anticipation. Les drones y jouent un rôle incontournable, ainsi que nous l'avions prévu depuis de nombreuses années.

Notre armée de l'air peut s'enorgueillir d'une forte expérience acquise grâce aux systèmes intérimaires en Afghanistan et en Libye : 100 % des drones disponibles – et donc 100 % de l'escadron de Cognac – sont aujourd'hui déployés au-dessus du ciel libyen à partir de la Sicile, ou en Afghanistan. C'est pour nous une expérience irremplaçable, qu'il nous faudra entretenir.

Le système de drones futur est en cours de définition. Le système intérimaire, qui doit nous conduire à ce drone à l'horizon 2020, a lui-même été retenu par notre ministre sur la base du drone Heron TP de la société israélienne Israeli Aerospace Industries (IAI). Il faudra donc l'importer et, si nécessaire, le franciser. Mon souci est évidemment d'éviter toute rupture capacitaire en la matière car nos compétences n'y résisteraient pas. Des hommes et des femmes ont dépensé beaucoup d'énergie pour développer et maîtriser cette capacité, notre devoir est de faire en sorte qu'ils puissent continuer dans cette voie.

La fonction connaissance et anticipation est aussi soutenue par d'autres moyens : le Transall Gabriel, spécialisé dans la guerre électronique, dont on nous livrera un exemplaire rénové cette année ou encore quatre nacelles de reconnaissance nouvelle génération RECO-NG adaptées sur Rafale, qui permettent d'obtenir de l'information en temps quasi réel, ont montré leur efficacité durant les opérations libyennes – elles sont d'ailleurs toujours utilisées.

Comme vous l'avez-vous-même souligné, monsieur le président, en Libye, 80 % des missions de ravitaillement en vol sont effectuées par des avions ravitailleurs américains. Il est évident que le lancement du programme de ravitailleur polyvalent MRTT est impératif, sous peine de perdre des capacités opérationnelles tant dans le domaine de la projection des forces que dans celui de la dissuasion nucléaire, qui s'appuient aujourd'hui sur nos vénérables C135 entrés en service il y a quarante-sept ans – ce qui fait courir à cette flotte un risque réel de rupture capacitaire et entraîne en tout cas un coût certain d'entretien. Je recommande vivement que cette future acquisition soit patrimoniale pour éviter certains écueils identifiés par nos amis britanniques et pour disposer d'une autonomie totale sur une flotte stratégique car ces appareils sont indissociables de la composante nucléaire aéroportée.

L'année écoulée a également montré combien les capacités de transport stratégiques étaient cruciales. Je pense à nos Airbus A340, dont le contrat de leasing se termine en 2015 et qui doivent être remplacés par les MRTT, et qui nous ont permis de rapatrier non seulement nos ressortissants de Libye, mais encore ceux du Japon après le séisme.

Vous avez évoqué la lenteur relative de la montée en puissance du Rafale. Nous devrions néanmoins pouvoir ouvrir le troisième escadron Rafale en 2012 à Mont-de-Marsan ; en tout cas, nous nous y employons. Pour le quatrième, il nous faudra évidemment attendre beaucoup plus longtemps.

En dehors de ce programme Rafale qui nous tient à coeur, la rénovation des Mirage 2000D, le programme de drones MALE et le MRTT sont les trois priorités sur lesquelles l'armée de l'air doit faire porter son effort.

Toutefois, la modernisation de l'armée de l'air passe également par la mise en service de l'A400M. À ce sujet, je suis tout à fait d'accord avec le délégué général pour l'armement (DGA) : on ne saurait concevoir que l'A400M arrive dans les forces sans disposer d'un soutien technique à la hauteur des ambitions que permet ce programme. Sachez que l'utilisation de l'A400M nous aurait permis de diviser par quatre le besoin de flux de transport nécessaire au soutien de l'opération Harmattan.

En attendant, l'armée de l'air percevra en 2012 cinq avions Casa CN235, qui nous permettront de préserver a minima les compétences tactiques de nos équipages, de les faire voler pour les endurcir et de les préparer à l'arrivée de l'A400M.

Parmi les autres motifs de satisfaction de l'année 2011 et du PLF 2012, je citerai les systèmes sol-air nouveaux comme l'Aster 30 ou le SAMP-T, lequel a déjà fait la démonstration de son bon fonctionnement et sera déclaré opérationnel dans les jours à venir. Ce système présente des capacités d'interception contre les missiles balistiques tactiques. Encore faut-il lui adjoindre une capacité de surveillance, dans le domaine spatial par exemple, avec le démonstrateur SPIRALE ou encore les radars longue portée ; pour détecter, identifier et suivre les missiles balistiques en question. Il s'agit également d'un système polyvalent, dans la mesure où il peut détruire non seulement des aéronefs, des missiles de croisière, voire des drones, mais également des missiles balistiques tactiques, à condition évidemment de s'inscrire dans un ensemble de moyens cohérents.

Je vous ai tracé le portrait d'une armée de l'air au service de notre pays, qui fait face aux missions les plus exigeantes partout où cela est nécessaire, une armée de l'air qui n'est pas figée dans des dogmes dépassés, qui s'adapte aux évolutions du monde et qui est au rendez-vous des réformes, une armée de l'air parmi celles qui comptent dans le monde.

Il nous appartient aujourd'hui de continuer la modernisation de notre institution, à l'aune des ambitions politiques que notre pays souhaite afficher. Nos femmes et nos hommes constituent incontestablement notre plus grande richesse. Ils consentent depuis de nombreuses années des efforts pour atteindre les objectifs des différentes réformes. Ils sont en droit d'en toucher les dividendes, car jamais ils n'ont baissé les bras, ayant su constamment se mobiliser pour donner le meilleur d'eux-mêmes au service de leur pays.

Alors que se termine dans quelques mois cette législature, je souhaite ici remercier en toute modestie cette commission, ses membres, et en premier lieu son président, pour le soutien indéfectible que vous avez apporté à nos armées, à notre armée de l'air et à son personnel. Nos succès d'aujourd'hui sont aussi vos succès.

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