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Intervention de Christophe Guilloteau

Réunion du 12 octobre 2011 à 11h45
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Guilloteau :

La marine a-t-elle déjà fait un retour d'expérience sur l'opération Harmattan ? Confirmez-vous l'information selon laquelle 3 000 obus auraient été tirés par la marine ? 15 missiles SCALP ont été tirés au cours de cette opération, la marine a-t-elle pris part à ces tirs ?

Amiral Bernard Rogel. L'opération Harmattan étant sous la responsabilité de l'état-major des armées, il ne m'appartient pas d'en faire le bilan, d'autant plus que nous ne communiquons jamais sur une mission tant qu'elle n'est pas achevée. Pour autant, je peux vous faire part des pistes que nous avons déjà identifiées pour la marine. Nos bâtiments ont effectivement tiré plus de 3 000 obus avec une précision remarquable. Nous avons également mis en oeuvre les missiles SCALP, en lien et coopération avec l'armée de l'air. Je rappelle que nous avons tiré sur terre depuis la mer ; cet exemple montre qu'il faut toujours bien veiller au maintien de capacités, même si elles ne sont pas fréquemment utilisées.

Il s'est agi d'une opération coordonnée, engageant des avions de reconnaissance, des hélicoptères d'attaque de l'armée de terre, des moyens de renseignement, des avions de l'armée de l'air, de l'aéronavale… J'ajoute que nous intervenions en lien avec les troupes de l'opposition se battant au sol. Nous allons donc devoir analyser très précisément cette opération. D'ores et déjà il apparaît que nous avons réussi à être très réactifs pour l'exploitation du renseignement, même si des progrès sont encore possibles.

L'intervention dans un milieu urbain était une contrainte forte car le risque de dommage collatéral était élevé. Outre les conséquences humaines, il aurait pu être instrumentalisé par les forces du colonel Kadhafi pour rallier les indécis. Ses troupes ont d'ailleurs changé de mode d'action en réaction à nos attaques : elles sont passées des chars blindés à des véhicules tout-terrain armés.

Enfin, nous allons veiller à ce que le retour d'expérience soit partagé avec nos partenaires, en particulier avec les Britanniques.

L'opération Atalanta relève de l'état-major des armées et non de la marine nationale. 25 000 navires passent chaque année dans le golfe d'Aden. Environ 30 bâtiments militaires croisent dans la zone, qu'ils relèvent de l'opération Atalanta, de l'opération Ocean Shield de l'OTAN ou qu'ils soient sous commandement national. Aujourd'hui, une dizaine de navires sont aux mains des pirates ; c'est un volume relativement faible par rapport au nombre total de bâtiments dans ce secteur. J'ajoute que notre action porte ses fruits : en 2008 environ 30 % des attaques des pirates étaient couronnées de succès ; seules 13 % aboutissent aujourd'hui. Le problème n'est pas seulement militaire ; il est avant tout juridique. Il est difficile de traiter judiciairement le cas des pirates et encore plus celui des pirates présumés, ces derniers passant très vite du statut de présumé pirate à celui de simple pêcheur, voire de naufragé volontaire. La France s'est récemment dotée d'un dispositif législatif pertinent qui nous permet de prendre en charge et de rapatrier les pirates avérés. En revanche, la situation est plus délicate pour les pirates présumés, en dépit des accords passés avec les pays de la région.

Concernant l'équilibre entre les armées, je suis convaincu que le monde va se « maritimiser ». Il appartient au chef d'état-major des armées d'opérer les arbitrages adéquats compte tenu du contexte budgétaire. Il faut trouver un équilibre entre nos ambitions de défense et de sécurité et nos moyens financiers pour pouvoir déterminer les capacités dont nous nous souhaitons nous doter. Quoi qu'il en soit, je suis très sensible à ce que les enjeux maritimes de notre pays soient bien identifiés.

La Libye a montré que l'accès au littoral depuis la mer reste un élément déterminant. Nous n'étions pas démunis puisque nos sous-marins pouvaient s'approcher et que nos BPC pouvaient positionner des hélicoptères à proximité des côtes. Si nous n'avions pas pu passer par la mer, cela aurait compliqué très fortement notre tâche et limité nos capacités d'action. Le combat dans la zone littorale me semble être un besoin qui va croître et nous devons bien veiller à le prendre en compte.

La flotte chinoise est en croissance forte, avec des capacités océaniques qui lui permettent aujourd'hui d'intervenir au-delà de la seule mer de Chine. Ce n'est pas une surprise, les Chinois ayant bien compris l'importance de l'enjeu maritime.

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