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Intervention de Guy Malherbe

Réunion du 27 septembre 2011 à 21h30
Renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Malherbe :

Monsieur le ministre, je veux saluer votre détermination et votre réactivité dans l'affaire du Mediator, qui a ébranlé la confiance que nos concitoyens avaient dans le médicament et a mis en lumière les lenteurs et les dysfonctionnements du système de pharmacovigilance.

Vous avez pris immédiatement conscience du scandale, de son ampleur et de sa signification, comme en témoigne l'organisation des Assises du médicament, réunissant tous les acteurs du médicament et de la santé, et, aujourd'hui, l'examen du projet de loi sur la sécurité sanitaire du médicament, qui concerne la santé de tous les Français.

Le projet de loi dont nous allons débattre, et sur lequel nous allons voter, contient des avancées majeures.

Il permet une meilleure gestion des conflits d'intérêts entre les experts et l'industrie. Il s'agit d'un vrai changement dans la culture médicale. Dans un système beaucoup moins perméable, on peut penser qu'une affaire comme celle du Mediator aurait été mise à jour bien plus tôt. L'adoption d'un Sunshine Act à la française permettra de renforcer la transparence des liens entre les différents acteurs de santé en obligeant de déclarer tous les liens d'intérêts avec l'industrie pharmaceutique sous peine de sanctions judiciaires. La chasse aux pratiques douteuses ou au lobbying agressif ne pourra qu'encourager la véritable innovation.

Également au coeur du projet de loi, la réforme de l'Agence du médicament doit garantir plus d'indépendance. Quand notre santé est en jeu, le culte du secret doit être combattu. C'est ce que vous nous proposez en rendant public les débats d'experts de la nouvelle Agence nationale de sécurité du médicament. Dorénavant, ces débats seront enregistrés, filmés, archivés et ils seront consultables par le public. Le directeur de l'Agence disposera de moyens autonomes et de pouvoirs accrus pour suspendre un médicament. Il pourra aussi demander des études supplémentaires aux laboratoires, qui seront tenus de les réaliser. Je souhaiterais être certain qu'on évaluera désormais le bénéfice réel d'un médicament par rapport à tous les autres antérieurs. En effet, à mon sens, on ne devrait autoriser un médicament que s'il apporte un bénéfice supplémentaire pour le patient. Il faut privilégier la notion de progrès thérapeutique. Je sais, monsieur le ministre, que telle est votre volonté.

Concernant la formation du médecin, il faut veiller à ne pas former les praticiens des hôpitaux et de ville en nourrissant le conflit d'intérêt au berceau, dès la formation initiale, lorsque le pot de thèse de nos internes est pris en charge par l'industrie. Il faut aussi leur offrir d'autres choix que de continuer à se former lors de congrès organisés par les laboratoires et éviter que ceux-ci influencent leur prescription dans l'intérêt des firmes. Il faut enfin revoir la pratique des visiteurs médicaux déjà évoquée.

La sécurité des médicaments passe également par la pharmacovigilance. Il s'agit d'un véritable enjeu. L'affaire du Mediator a mis en lumière les lenteurs et les dysfonctionnements du système de pharmacovigilance. Il faut agir pour minimiser les risques inévitables liés à l'utilisation de produits efficaces prescrits par les médecins dans le cadre de l'AMM ou hors AMM, comme c'était le cas pour le Mediator.

Même si la France est l'un des pays où la notification spontanée par les professionnels de santé est satisfaisante, il est possible et indispensable de l'améliorer encore et de renforcer sa capacité de détection des signaux, et surtout des signaux faibles. Le taux de notification par les médecins reste insuffisant. Il faut mettre le patient au centre du processus. La loi HPST prévoit d'encourager le signalement des effets indésirables directement par le patient. L'AFFSAPS s'est engagée dans cette voie depuis 2002. Elle a expérimenté la participation du patient lors de la pandémie grippale en 2009, à la satisfaction de la présidente des centres régionaux de pharmacovigilance. Les informations remontées étaient d'ailleurs très riches et différentes de celles habituellement signalées par les médecins. Il faudrait poursuivre dans ce sens et donner des moyens supplémentaires aux centres régionaux de pharmacovigilance.

Parmi les professionnels de santé, le pharmacien d'officine est un acteur incontournable de la pharmacovigilance en raison de sa proximité avec le patient et de sa connaissance du médicament. La présidente des centres régionaux de pharmacovigilance souligne le gros travail de remontée des informations réalisées par les officines. Demain, des progrès pourront être encore réalisés avec le dossier pharmaceutique, qui s'inscrit dans une démarche de pharmacovigilance et doit être utilisé comme un outil d'alerte descendante et montante par la direction générale de la santé. Dans le cadre des plans de gestion du risque, le dossier pharmaceutique peut permettre de bloquer sans délai des lots de médicaments suspectés, car il atteint la quasi-totalité des officines puisque 80 % des officines l'utilisent.

Le dossier pharmaceutique peut permettre, dans une démarche plus large de surveillance active, l'utilisation des données pour étudier un médicament durant sa vraie vie auprès du patient. Il doit aussi devenir un outil pour développer des études de pharmacoépidémiologie permettant de rechercher les effets d'un médicament grâce au suivi d'une cohorte de patients. La France doit combler son retard dans ce domaine. À ma connaissance, les premiers projets en la matière viennent seulement d'être labellisés dans le cadre du grand emprunt.

Restaurer la confiance dans le médicament et dans notre système sanitaire est une priorité pour les Français. C'est aussi votre priorité, monsieur le ministre, vous l'avez exprimée dès la remise du rapport de l'IGASS qui pointait les responsabilités de chacun dans l'affaire du Mediator et le dysfonctionnement des agences de sécurité du médicament.

Votre projet de loi propose aujourd'hui des mesures indéniablement fortes. Elles ont surtout l'avantage d'être lisibles pour le public. Elles doivent permettre de restaurer l'image du médicament, ce qui est absolument indispensable, ainsi que celle de tous les acteurs et décideurs de la chaîne du médicament.

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