Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Gérard Bapt

Réunion du 6 octobre 2011 à 15h00
Conditionnements alimentaires contenant du bisphénol a — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Bapt :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour acter une avancée importante en matière de perturbateurs endocriniens.

Ce n'est qu'assez récemment que l'on s'est saisi de cette question, en dépit des appels à la vigilance lancés depuis plusieurs années par des scientifiques de renommée internationale, aux États-Unis, à Vienne ou à Paris.

En 2009, deux biologistes américains, Carlos Sonnenschein et Ana Soto, ont présenté devant le groupe d'études sur la santé environnementale de notre assemblée leurs travaux expérimentaux sur le bisphénol A et la souris. Par la suite, les alertes émanant de la société civile ont incité les parlementaires, dont votre serviteur, à s'emparer de la question.

Pour ma part, monsieur le ministre, dès juin 2009, j'interdisais dans ma commune, par arrêté municipal, la vente et l'utilisation des biberons au bisphénol. C'est une petite commune, avec trois pharmacies et trois supermarchés : l'interdiction était donc d'application relativement aisée, mais elle ne s'appliquait pas à l'hypermarché de la commune voisine. Néanmoins, le préfet ne déférait pas mon arrêté devant le tribunal administratif, ce qui me laissait un espoir pour la suite des événements.

C'est finalement en juin 2010, qu'était votée, quasiment aux forceps, le principe de l'interdiction de l'utilisation des biberons contenant du bisphénol A. Mais, à cette époque, l'essentiel de la contamination par le bisphénol, dont l'AFSSA nous disait qu'elle émanait pour 80 % des contenants alimentaires ou du lait maternel pour les nouveaux nés, échappait à cette interdiction, limitée aux seuls biberons.

Mon amendement, demandant son extension à l'ensemble des contenants alimentaires à partir de janvier 2012 pour tenir compte des nécessités d'adaptation des industriels, était repoussé. Une proposition de loi déposée à mon initiative par le groupe socialiste reculait ensuite l'échéance à juillet 2012 et, le temps passant, Mme Delaunay déposait à son tour, au nom de la commission, un amendement proposant que l'interdiction du bisphénol dans l'ensemble des contenants alimentaires prenne effet en juillet 2013. Un compromis passé avec le groupe UMP en commission des affaires sociales a enfin permis que soit voté à l'unanimité, une fraction notable de ce groupe choisissant cependant de s'abstenir, un texte qui fixe la date de l'interdiction à janvier 2014.

Monsieur le ministre, vous nous proposez aujourd'hui d'aller plus loin. Un journal que j'ai sous la main dit même que vous voulez allez plus loin que la proposition du parti socialiste : mais c'est parce que nous avons accepté en commission un compromis avec l'UMP que nous avons repoussé la date d'interdiction au 1er janvier 2014 ! Vous n'allez en vérité guère plus loin que notre proposition initiale pour les enfants de moins de trois ans.

Quoi qu'il en soit, l'important est que le mouvement ait été lancé et que l'échéance permette aux industriels de résoudre la question de la substitution qui, toute mauvaise volonté mise à part, est pour eux un réel problème. Je l'avais d'ailleurs moi-même soulevé cet été en découvrant dans un média suisse, après m'être réjoui que l'on ait supprimé des tickets de caisse le bisphénol A qui pouvait contaminer les caissières – souvent des jeunes femmes susceptibles d'être enceintes –, que la substitution par le bisphénol S n'avait pas éliminé tout risque de contamination par un perturbateur endocrinien, certes différent, mais plus dangereux peut-être à certains égards puisqu'il est plus persistant dans l'environnement.

Au Danemark, le bisphénol est déjà interdit dans les biberons mais également dans les contenants alimentaires destinés aux enfants de moins de trois ans ; dans le Connecticut, l'interdiction générale du bisphénol est effective depuis le 1er octobre. Le problème des substituts est donc bien réel, mais il semblerait qu'on ait déjà trouvé, aux États-Unis, des solutions de substitution.

Un autre aspect de la question, avant même que l'interdiction soit effective, concerne l'information qu'il convient de diffuser auprès des populations les plus concernées, dans les maternités ou les structures de la petite enfance, auprès des femmes enceintes, des jeunes enfants et des adolescents en période de puberté, chez qui le système hormonal est le plus susceptible d'être perturbé.

J'avais regretté, monsieur le ministre, qu'aucune initiative n'ait été prise à ce jour en matière d'information préventive. Il y a dix jours encore, en visite dans le laboratoire d'analyses médicales de ma commune, je lisais l'un de ces fascicules destinés aux femmes enceintes. J'ai pu noter que, la rubrique concernant l'alimentation évoquait le calcium, la vitamine D, le fer, les sucres lents, les protéines, la salmonellose, la listériose, la toxoplasmose… continuait par la cigarette, mais sans un mot sur le bisphénol.

Monsieur le ministre, vous avez pris la décision de rompre avec l'immobilisme et vous nous avez présenté la maquette d'une plaquette d'information, assez proche dans sa forme de la plaquette éditée par le département de santé publique du Massachusetts, que j'avais soumise à votre prédécesseur, et qui est depuis des années déjà distribuée dans les maternités.

Je dirai cependant un mot du contenu de votre plaquette : à la rubrique « Y a-t-il des risques pour votre santé et celle de vos enfants ? », il me semble que la phrase : « Les études scientifiques ne parlent pas de risques avérés pour la santé aux doses auxquelles les consommateurs sont exposés dans des conditions normales d'utilisation » est en contradiction avec les conclusions de l'ANSES, selon lesquelles les effets sanitaires expérimentaux surviennent à des doses inférieures aux doses normales d'utilisation. Il faudra donc corriger ce passage.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion