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Intervention de Xavier Breton

Réunion du 6 octobre 2011 à 15h00
Interdiction de la différence de taux de sucre entre les régions d'outre-mer et la métropole — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaXavier Breton :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de M. Victorin Lurel est intéressante car elle soulève un véritable problème de santé publique sur lequel nous devons agir, et vite.

Alors que l'obésité est, selon de récentes études, en augmentation dans les régions d'outre-mer, les Français d'outre-mer consomment des produits plus riches en sucres et en graisse, avec les conséquences que l'on connaît, notamment en termes de maladies cardio-vasculaires et de diabète. En effet, selon une étude menée par l'Observatoire régional de la santé de Guadeloupe, la prévalence du surpoids chez l'enfant est de 25 % et de 7 % pour l'obésité. Il n'est donc pas tolérable, en effet, que la composition des produits manufacturés et vendus dans les régions d'outre-mer soit, comme on le constate, beaucoup plus riche en sucre que celle des mêmes produits vendus en métropole.

Vous aviez d'ailleurs déclaré, monsieur le ministre, lors d'un déplacement à Fort-de-France au début de l'été, l'importance que vous accordiez aux discussions sur le problème de l'obésité en outre-mer et votre intention d'inciter les agences régionales de santé ultramarines à prendre rapidement des dispositions.

Pour autant, si cette proposition de loi pose un problème réel sur lequel il convient d'agir, les solutions proposées ne nous semblent pas à la hauteur des enjeux. II est séduisant d'avoir recours à la loi, mais est-elle vraiment efficace ? Or, il est de notre devoir de viser la plus grande efficacité.

Favoriser et valoriser la production et la vente de produits alimentaires dont la teneur en sucre serait la même qu'en métropole est une des réponses à ce problème. Elle ne doit pas être la seule. Plusieurs facteurs doivent entrer en jeu et il est primordial, en la matière, de responsabiliser les industries agro-alimentaires sur cette problématique.

Le taux de sucre n'est en effet qu'une partie du problème car les facteurs conduisant à l'obésité sont multiples. Et s'il n'y a pas actuellement en métropole d'obligation réglementaire fixant la teneur en sucre des produits, il existe en revanche, dans le cadre du Programme national nutrition santé, des chartes d'engagements volontaires de progrès nutritionnel proposées aux entreprises du secteur alimentaire qui promeuvent une offre alimentaire allant dans le sens des objectifs du PNNS, et qui prennent en compte le problème dans toute sa complexité.

Dans ce cadre, de nombreux engagements ont été pris par diverses entreprises et filières, notamment dans l'Hexagone. Ces engagements visent notamment la réduction des apports en glucides simples, mais aussi en sel, lipides totaux, acides gras saturés ou l'augmentation de la consommation de glucides complexes et fibres, de fruits et de légumes. La signature de l'État au bas de ces chartes est la garantie de l'exigence en matière d'amélioration de la qualité nutritionnelle des aliments.

Ainsi, une réglementation coercitive ne serait pas cohérente ni efficace avec la démarche incitative et volontaire initiée par l'État depuis 2006 et qui a déclenché une dynamique qui doit s'étendre vers les régions ultra-marines.

Par ailleurs, le Programme national de l'alimentation lancé en 2010 par le ministère de l'agriculture incite les professionnels d'un secteur donné à formuler des propositions d'amélioration de la qualité de leurs produits via des contrats collectifs d'engagement de qualité.

Alors bien sûr, nous déplorons les retards pris dans le déploiement de ces programmes en outre-mer et nous pouvons nous interroger sur les raisons de cet état de fait. Y aurait-il une plus grande appétence des ultramarins pour des produits plus sucrés ? Est-ce à cause de la sous-traitance de la fabrication de produits avec des cahiers des charges imprécis ? Sans parler des produits spécifiques à l'outre-mer. Ces raisons sont certainement multiples et c'est pourquoi une interdiction sèche nous semble un peu simpliste si elle n'est pas accompagnée d'une prise de conscience et d'une information.

Nous souhaitons, monsieur le ministre, que vous puissiez redonner une impulsion aux programmes en cours et que vous puissiez nous tenir informés des résultats que vous obtiendrez.

Cette proposition de loi est en outre, et malgré les amendements du rapporteur, particulièrement floue et difficilement applicable concernant les produits spécifiques à l'outre-mer et non distribués en métropole. Fixer un taux de sucre par arrêté du ministre semble assez irréaliste et déresponsabilisant. En outre, qui viendra en contrôler l'application ? La question des produits importés n'est pas explicitée non plus. Il ne faudrait pas créer une distorsion de concurrence entre les industriels français et ceux notamment d'Amérique du Nord ou du Sud. Si l'on peut envisager de contraindre les industriels français, on pourra difficilement le faire auprès des industriels étrangers.

Devant l'importance de ce problème de santé publique, ce n'est pas d'une loi, qui ne serait au final qu'une loi d'affichage puisqu'elle manque en grande partie sa cible, que nous avons besoin, mais d'un véritable plan cohérent qui responsabilise tous les acteurs, en particulier les professionnels de l'agroalimentaire, mais aussi plus largement les populations. C'est la raison pour laquelle les députés du groupe UMP resteront très attentifs aux avancées annoncées sur ce sujet, mais ne voteront pas cette proposition de loi.

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