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Intervention de Valérie Boyer

Réunion du 28 septembre 2011 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Boyer :

La lecture de la page 4 du projet de rapport, où figure la comparaison des teneurs en sucres de plusieurs produits de grande marque selon qu'ils sont commercialisés à Paris, en Guadeloupe, en Guyane ou en Martinique, m'a scandalisée. Ces résultats trahissent, en effet, une véritable perversion de la part de l'industrie agro-alimentaire, laquelle n'hésite pas à ajouter à ses produits du sucre, du sel ou des matières grasses, pour la seule raison que ces ingrédients ne coûtent pas cher et induisent – en particulier le sucre – une addiction auprès des populations les plus vulnérables. En effet, l'épidémie d'obésité, problème grave auquel notre pays est confronté, est un véritable fléau dans la France d'outre-mer. C'est pourquoi la Commission pour la prévention et la prise en charge de l'obésité avait souligné la nécessité de développer des programmes spécifiques dans ces collectivités.

Cette prévalence particulière a sans doute des causes liées à une exception culturelle, mais aussi – nous en avons aujourd'hui la preuve – à la façon dont les industriels traitent ces populations. Leurs représentants, que nous avons souvent reçus à l'Assemblée nationale, soulignent généralement les efforts qu'ils accomplissent : signature de chartes, mise en place d'un observatoire de la qualité des aliments, etc. Ils ont promis – et peut-être tiennent-ils parole – qu'ils réduiraient le taux de sel, de sucres et de gras dans leurs produits.

Par ailleurs, on peut lire dans la presse que l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA), juge « stupide » l'institution d'une taxe sur les sodas. Je pense le contraire : non seulement c'est une mesure intelligente, mais elle constitue le premier pas vers une modulation de la fiscalité sur les aliments. Est-il normal, en effet, qu'un même taux de TVA, 5,5 % s'applique à tous les aliments, qu'ils soient transformés ou non transformés, nécessaires à une alimentation équilibrée ou destinés au pur plaisir ? Bien que les boissons sucrées figurent dans la deuxième catégorie, les consommateurs ne disposent d'aucune information sur leur valeur énergétique. Alors que l'Assemblée nationale avait décidé de rendre obligatoire pour tous les aliments l'affichage de la quantité de calories pour cent grammes, le Sénat a rejeté cette proposition. On a prétendu que les institutions européennes allaient prendre des mesures en ce domaine, mais nous attendons toujours. Il est donc impératif, pour des raisons de santé publique et au nom de l'information du consommateur, de progresser sur cette question.

Je rappelle, par ailleurs, que les boissons gazeuses sucrées représentent 30 % des apports en liquide des adolescents. Plus la population est défavorisée, plus elle consomme de sodas riches en sucres. Or aucune information n'est délivrée sur la teneur en sucres et les apports caloriques de ces boissons – pourtant beaucoup plus importants que dans l'alimentation solide.

Le rapporteur a fait la démonstration d'une différence de traitement des populations, selon qu'elles sont favorisées ou défavorisées. Cela étant, nous savons bien que l'adoption de dispositions relevant du pouvoir réglementaire pourrait exposer le Parlement à une censure du Conseil constitutionnel. Or le texte que nous examinons aujourd'hui relève de toute évidence du domaine réglementaire. Ce sujet devrait également faire l'objet de négociations avec l'industrie agro-alimentaire, même si je n'y crois pas beaucoup : jusqu'à présent, la signature de chartes n'a pas donné de résultats. Je propose donc que nous joignions tous nos efforts pour demander au ministre et à l'administration la publication, dans les meilleurs délais, d'un décret ou d'un arrêté destiné à mettre fin à ces pratiques commerciales scandaleuses.

Il n'appartient pas aux directeurs d'agence régionale de santé de mener des discussions avec l'industrie agro-alimentaire. En revanche, il revient au pays de déterminer quelle politique de santé publique il souhaite mettre en place. Or une telle politique doit également avoir pour but de préciser l'information que l'industrie doit à ses clients ainsi que le type d'aliments que les produits doivent contenir ou ne pas contenir.

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