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Intervention de François Rochebloine

Réunion du 28 septembre 2011 à 10h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Rochebloine, rapporteur :

Le protocole d'amendement à la convention du Conseil de l'Europe concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale, signé à Paris, le 27 mai 2010, s'inscrit pleinement dans le mouvement en faveur de la transparence fiscale initié en 2009, sujet que la commission des affaires étrangères a eu maintes fois l'occasion d'aborder, comme en témoigne encore notre réunion d'hier.

La convention du 25 janvier 1988 qu'il modifie témoigne de l'attachement ancien du Conseil de l'Europe à la lutte contre la fraude fiscale au nom de la défense de l'Etat de droit qu'incarne l'institution.

Dès 1978, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe avait ainsi adopté la recommandation 833 en matière de coopération entre les Etats membres afin de lutter contre l'évasion et la fraude fiscale internationales, accrues alors par le développement des mouvements de capitaux, de biens et de services. Cette recommandation appelait les Etats membres à conclure un accord multilatéral européen relatif à la coopération entre les administrations nationales en vue de combattre les infractions fiscales.

Ce fut chose faite avec la convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale du 25 janvier 1988, élaborée conjointement par le Comité d'experts du Conseil de l'Europe pour la coopération juridique et le Comité de l'OCDE chargé des questions de fiscalité.

La convention, entrée en vigueur le 1er janvier 1995, a constitué une avancée majeure vers une collaboration internationale plus structurée sur l'échange d'informations. Elle permet aux parties – Etats membres du Conseil de l'Europe et pays membres de l'OCDE – de développer, sur des bases communes et dans le respect des droits fondamentaux des contribuables, une vaste coopération administrative couvrant tous les impôts obligatoires à l'exception des droits de douane.

Avec la crise financière internationale, la lutte contre l'évasion fiscale est devenue cruciale non plus seulement dans la lutte contre la criminalité économique mais aussi en termes de stabilité financière internationale, de moralisation du capitalisme, de mobilisation des ressources domestiques des pays en développement ou encore de préservation des ressources fiscales de pays sous fortes contraintes budgétaires.

Fort de ce constat et à la suite de la déclaration du G20 d'avril 2009, qui prévoyait de permettre aux pays en développement de bénéficier du nouvel environnement de la coopération fiscale, l'OCDE et le Conseil de l'Europe ont franchi un nouveau pas en matière de transparence financière. Ils ont invité les parties à la convention à la réviser afin de la mettre en conformité avec les nouvelles normes internationales, d'une part, et de l'ouvrir aux pays non membres des deux organisations, d'autre part.

Au terme des modifications apportées par le présent protocole, la convention du Conseil de l'Europe ne diffère plus en rien du modèle de convention fiscale de l'OCDE : l'échange de renseignements répond désormais aux standards internationaux puisque sont supprimées les nombreuses restrictions qui permettaient d'y faire obstacle. En outre, la possibilité offerte aux Etats non membres des deux organisations de ratifier la convention amendée permet de donner corps à l'intérêt des pays en développement pour la coopération fiscale internationale.

L'article II du protocole que nous examinons réécrit l'article 4 de la convention qui définit l'obligation d'échange de renseignements. Reprenant la terminologie de l'OCDE, il vise les renseignements « vraisemblablement pertinents ».

L'article III modifie l'article 18 qui détermine les renseignements à fournir par l'Etat requérant afin d'élargir les possibilités d'identification de la personne sur laquelle porte la demande de renseignements.

L'article V, qui propose une nouvelle rédaction de l'article 21, comme le constate le rapport explicatif, « revêt une importance particulière dans la recherche d'un équilibre satisfaisant entre la nécessité de rendre effective l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale et la nécessité d'accorder des garanties aux contribuables et également à l'Etat requis. »

En premier lieu, il prévoit que les droits et garanties que les législations et les pratiques administratives nationales reconnaissent aux personnes ne sont en aucune manière affectés par la convention. Celles-ci ne doivent néanmoins « pas être appliquées de manière à saper l'objet et le but de la convention ».

En second lieu, l'article fixe les divers cas – que vous connaissez désormais – dans lesquels un Etat requis peut se soustraire à l'obligation d'assistance.

Mais la véritable avancée réside dans les nouveaux paragraphes 3 et 4 qui mettent fin à la possibilité pour l'Etat requis d'opposer l'absence d'intérêt fiscal national ou le secret bancaire.

L'article VI renforce les garanties en matière de protection des données personnelles échangées entre les Etats.

L'autre principale innovation introduite par le protocole est la possibilité pour les Etats non membres de l'OCDE et du Conseil de l'Europe de solliciter l'adhésion à la convention. Ceci « offre à ces pays une occasion précieuse de mettre rapidement en oeuvre leurs engagements à l'égard des normes reconnues sur le plan international dans le domaine de la transparence et de l'échange de renseignements à des fins fiscales, et permet aux pays émergents et en développement de tirer parti des avantages découlant du nouvel environnement de coopération fiscale ».

C'est l'article VIII du protocole qui modifie en ce sens l'article 28 de la convention. L'Etat intéressé doit adresser sa demande à l'un des dépositaires qui la transmet ensuite aux parties et aux organes décisionnels du Conseil de l'Europe et de l'OCDE. Les parties décident alors par consensus, par l'intermédiaire de l'organe de coordination, d'inviter l'Etat concerné.

L'article VIII indique également que tout Etat devenant partie à la convention postérieurement à l'entrée en vigueur du protocole est réputé partie à la convention amendée sauf s'il exprime une intention différente qu'il doit dans ce cas notifier à l'un des dépositaires.

L'article VII apporte une précision utile sur l'articulation entre les dispositions de la convention et les règles de l'Union européenne. Il offre ainsi la possibilité nouvelle d'appliquer dans l'Union européenne les dispositions de la convention plus favorables à la coopération nonobstant les règles européennes. Cette modification correspond à l'esprit qui gouverne cet accord de « faire usage dans une situation donnée de l'instrument le plus efficace ».

L'article IX qui a trait à la signature du protocole, précise qu'au moins cinq États doivent ratifier le protocole pour qu'il entre en vigueur. Le protocole a été signé et ratifié par le Danemark, la Finlande, la Norvège, la Géorgie et la Slovénie. Il a été signé par la France, l'Islande, l'Italie, la Corée, le Mexique, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la Suède, le Royaume-Uni, les Etats-Unis, l'Ukraine, la Belgique, l'Espagne et la Moldavie. En vertu des dispositions précitées, l'entrée en vigueur du protocole est donc intervenue le 1er juin 2011.

En conclusion, si la France dispose d'un réseau très étendu de conventions et accords permettant l'échange de renseignements – la France pratique à ce jour l'échange de renseignements avec l'ensemble des signataires du protocole, à l'exception de la Moldavie – , la ratification de ce protocole vise à témoigner de l'engagement de la France en faveur de la transparence fiscale et « de la meilleure association des pays en développement au nouveau contexte international. »

C'est par souci de l'exemplarité de la France dans ce domaine que j'estime nécessaire d'adopter le présent projet de loi.

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