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Intervention de Christine Noiville

Réunion du 28 juin 2011 à 16h30
Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques

Christine Noiville, présidente du Comité économique, éthique et social, CEES :

Je souhaiterais tirer profit de cet échange pour que nous nous interrogions ensemble sur la fonction et le rôle du CEES que je préside. Créé récemment, ce Comité est une institution singulière par sa composition et ses missions. Il n'est, dès lors, pas étonnant qu'il ait été très observé et qu'il ait suscité à la fois des louanges et beaucoup de critiques, y compris au sein de l'Assemblée nationale.

Aussi, m'apparaît-il utile de faire état de la façon dont le Comité est perçu de l'intérieur, et de préciser ce que l'Assemblée nationale peut en attendre légitimement.

J'évoquerai trois critiques récurrentes :

– Le débat y serait bloqué, ce qui en ferait une « pétaudière » dans laquelle les élus auraient choisi de ne plus siéger. Or, la réalité est assez différente. Un tiers des élus y siègent régulièrement. De façon générale, en moyenne 19 à 20 membres sur 27 sont présents à chaque séance plénière du CEES. Donc les débats ont bien lieu, même s'ils sont animés. Ils sont éloignés du chaos imaginé par certains.

La vivacité du débat est liée directement à la composition du CEES. J'estime qu'on a eu raison d'y faire siéger l'intégralité des parties prenantes, avec leurs points de vue extrêmement divers ; il n'est, dès lors, pas anormal que ceux-ci s'affrontent.

– Le consensus y serait rarissime, ce qui soulèverait la question de l'utilité du Comité. Or, parmi les dossiers dont nous sommes saisis, toute une série d'entre eux – dont par exemple, ceux relatifs à la thérapie génique ou aux essais de médicaments vétérinaires – donne lieu à des consensus ou à des quasi-consensus.

Même si, sur d'autres dossiers, on constate une absence de consensus, le débat est néanmoins intéressant, dans la mesure où il permet à certains points de vue d'évoluer. Ainsi, au cours des échanges concernant la définition des filières sans OGM et l'étiquetage « sans OGM », les points de vue étaient très opposés. Mais comme les recommandations finalement rendues en font foi, les parties prenantes sont parvenues, non pas à un consensus, mais à un point d'équilibre, ce qui a permis de transmettre au Gouvernement un avis à partir duquel il a pu édicter un projet de décret, qu'il a notifié à la Commission européenne.

Dans le cas des dossiers où il n'existe aucun consensus du fait de positions très opposées, le CEES – se refusant de voter – émet en effet des recommandations, qui n'orientent pas la décision publique dans une direction donnée mais rendent compte des positions, lesquelles sont restituées et passées au crible des données économiques et sociales existantes, en vue d'apprécier leur pertinence. Les différentes options, avec leurs avantages et inconvénients, sont ainsi exposées aux décideurs. Certes, le Gouvernement peut ainsi s'estimer frustré de ne pas disposer d'une solution clé en mains ; pour autant, la loi donne au CEES la compétence d'éclairer le Gouvernement sur les questions de biotechnologies, mais non pas celle de prendre les décisions à la place de ce dernier. Il s'agit pour le Gouvernement, en l'absence de consensus, d'arbitrer et, in fine, de trancher.

Là encore, il est discutable que la légitimité du CEES soit reconnue uniquement sur sa capacité à parvenir au consensus et à fournir des décisions toutes faites à l'autorité politique.

– Enfin, le HCB souffrirait d'un mélange des genres, du fait de l'existence de deux comités, puisque le Comité scientifique rend lui aussi des avis sur les impacts environnementaux et sanitaires. Or, jusqu'à présent, le Comité scientifique a été très mesuré dans l'appréciation de l'existence des risques, concluant plutôt à ce qu'ils n'étaient pas identifiés. De son côté, le Comité économique, éthique et social a rendu des avis identifiant au contraire certains risques.

Du coup, apparaît un brouillage des pistes dans l'esprit du public, qui serait défavorable à la compréhension des avantages et des inconvénients des biotechnologies.

Or, le mélange des genres n'existerait que si les deux comités intervenaient dans le même domaine, ce qui n'est pas le cas. Ils examinent certes les mêmes dossiers, mais sous des angles différents.

J'avais compris que tout l'intérêt du HCB résidait dans cette double démarche, à l'heure où les citoyens s'interrogent sur la sécurité des biotechnologies et leur impact sur la société. Mais si l'on admet que ce double regard est devenu non pertinent, il conviendrait de revenir à un pur comité scientifique en ayant toutefois conscience des avantages et des inconvénients s'attachant aux deux systèmes.

Ce sont ces points qui, sans polémique ni défensive de ma part, méritent une discussion. Notre objectif est d'accomplir notre tâche de la façon la plus adéquate possible, conformément à la loi. De ce point de vue-là, le regard de l'Office nous est très utile.

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