Dans notre école, nous menons un travail d'éducation, de formation et d'information. Devant vous, je n'ai pas employé le mot de confiance, mais celui de méfiance : nous apprenons aux conducteurs à devenir méfiants. Manifestement, ce n'était pas une qualité que possédaient deux conducteurs que j'ai croisés avant-hier sur une petite route de la vallée de Chevreuse : alors que je me trouvais derrière un camion en panne, à proximité d'un croisement, ces deux conducteurs qui arrivaient en face n'ont pas ralenti, estimant certainement qu'ils avaient le droit de rouler à 90 kmh… Pour notre part, nous enseignons à ralentir quand c'est nécessaire ! Les conducteurs ne respectent plus l'article du code de la route qui impose d'être maître de sa vitesse, autrement dit d'être capable de s'arrêter quoi qu'il arrive. C'est parce que nous enseignons le respect de cette règle que nous constatons une réduction de plus de 50 % des accidents de nos stagiaires, et que nous conservons nos entreprises clientes, voire que nous en augmentons le nombre, malgré des tarifs plus élevés que ceux la concurrence. Par ailleurs, cette démarche entraîne aussi la réduction de la consommation de carburant : lorsqu'on regarde plus loin, on n'a pas besoin de freiner ou d'accélérer brusquement.
La culture anglo-saxonne est en effet fondamentalement différente de la culture française. Pour illustrer mon propos, je citerai un exemple personnel : alors que je signais des autographes à Silverstone, au Royaume-Uni, les deux seuls demandeurs indisciplinés auxquels j'ai eu affaire étaient des Français !
Cela étant, la France a fini par rattraper son retard sur la Grande-Bretagne en matière de sécurité routière. Il ne faut pas oublier que la Grande-Bretagne ne subit pas un trafic de transit du Nord au Sud, notamment du fait d'étrangers de passage. L'agglomération de Londres n'est pas moins accidentogène que celle de Paris. La Grande-Bretagne comporte aussi moins de zones rurales, notamment de montagne, que la France.
Les causes de l'accidentologie routière sont connues. Ce sont les jeunes de moins de 25 ans qui ont le plus d'accidents. Parmi eux, 80 % des victimes sont des garçons. Et la proportion de ceux qui en sont responsables est supérieure encore : 90 %. Les jeunes femmes de moins de 25 ans qui trouvent la mort sur la route sont le plus souvent des passagères.
Les routes les plus accidentogènes sont aussi les petites routes, moins surveillées que les autres.
La limitation de vitesse sur autoroute, telle qu'elle est appliquée, est un peu injuste. Un conducteur qui n'a pas conduit depuis un certain temps a besoin d'un temps d'adaptation avant de bien conduire à la vitesse maximale autorisée. Mais une fois réhabitué, et ayant retrouvé le niveau d'attention nécessaire, il pourrait rouler au-delà de la vitesse autorisée sur autoroute, jusqu'à 150 ou 160 kmh. Si, sur autoroute, je roule bien sûr à 130 kmh, à cette vitesse, je suis beaucoup moins attentif qu'avant. Je fais partie de ceux –nombreux – qui sont devenus de mauvais conducteurs sur autoroute : je ne suis plus assez attentif au volant !
Lors d'un voyage au Royaume-Uni, des responsables du ministère des transports m'ont expliqué franchement – au contraire de la France où je n'ai jamais pu obtenir toute la vérité à ce sujet – que l'accidentologie des autoroutes était si faible par rapport à celle des petites routes qu'elle ne constituait pas une question prioritaire. Je suis donc un peu étonné du renforcement des contrôles radar sur autoroute et du durcissement de la répression des excès de vitesse qui y sont commis. Pour la limitation de la vitesse à 130 kmh, si le taux d'émission de CO2 peut être un argument, la sécurité n'en est pas un.