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Intervention de Jean-Pierre Beltoise

Réunion du 12 juillet 2011 à 14h00
Mission d'information relative à l'analyse des causes des accidents de la circulation et à la prévention routière

Jean-Pierre Beltoise, créateur de l'école « Conduire juste :

Mon âge fausse sans doute mon opinion sur la formation au permis de conduire. Un de mes amis, âgé de 83 ans et cascadeur automobile prestigieux – il s'agit de Rémy Julienne –, a perdu son permis, sans doute points par points. Or il n'arrive pas à réussir de nouveau l'examen ! Les méthodes ont changé. De ce fait, alors que les jeunes se présentent avec succès, les personnes d'un certain âge, même responsables et habituées aux risques de la route, auront bien du mal à répondre aux questions posées.

Aucune formation de quarante heures ne permet de passer d'un statut de néophyte à celle de connaisseur maîtrisant un savoir-faire. Si, à l'issue de la formation en auto-école, un conducteur a appris les règles du code de la route et est capable de répondre aux questions posées par les examinateurs, il ne sait pas conduire. Les aviateurs expliquent qu'à 500 heures de vol, on croit savoir piloter, et qu'à 1 000 ou 5 000 heures on s'aperçoit qu'on ne sait rien.

Pour moi, il ne devrait pas être possible de se libérer du sigle « A », qui figure à l'arrière du véhicule de tout nouveau conducteur, simplement après deux ans de conduite sans incident majeur. Un examen supplémentaire devrait être nécessaire. Faute de le réussir, le conducteur devrait conserver le « A » qui, indiquant aux autres conducteurs qu'il reste un apprenti, susciterait ainsi leur attention.

Ce deuxième examen – qui créerait certes un léger coût supplémentaire – ouvrirait droit à une sorte de « permis de maturité ». Comme nous le pratiquons à « Conduire juste », il y serait vérifié la qualité du comportement du conducteur, sa maîtrise de la route et sa capacité de méfiance envers les autres ainsi qu'envers les aléas éventuels de la circulation ; bref sa capacité à rouler sans accident. Aujourd'hui, après l'obtention de son permis, le jeune conducteur est jeté ad vitam aeternam dans la circulation, où il prend ses habitudes, en général plutôt mauvaises. Un bon conducteur qui n'a pas d'accident parce qu'il a appris à se méfier ne le doit qu'à lui-même.

L'un de nos moniteurs a dit un jour qu'une journée de stage à « Conduire juste » valait dix ans d'expérience. Nos stagiaires n'imaginent pas que ce que nous allons leur enseigner, c'est la conduite en sécurité. Ils sont surpris d'apprendre qu'elle est faite d'un regard porté plus loin, plus large, d'une méfiance généralisée envers l'ensemble de l'environnement et d'une vigilance de chaque instant. En auto-école, on apprend des règles par coeur et à manoeuvrer une voiture. Mais on en sort non pas méfiant mais confiant en sa capacité de maîtrise, au motif qu'on respecte les règles.

Comme tous les Français qui roulent beaucoup, j'ai été amené à plusieurs reprises à effectuer des stages de récupération de points. Il est en effet très difficile de ne pas commettre de petits excès de vitesse ; or ceux-ci sont très pénalisants. Ces stages sont étonnants par leur caractère suranné : alors que la presse évoque sans cesse les émissions de CO2, elles ne sont jamais évoquées lors de ces stages. De même, devant la violence des reproches d'un psychologue d'un stage envers un stagiaire, j'ai cru que celui-ci avait causé des accidents graves : en réalité, il avait simplement commis de petits excès de vitesse de moins de 10 kmh ! C'est insupportable.

Au bout du compte, ces stages permettent de faire connaissance avec d'autres personnes, de déjeuner avec elles à midi... Pendant le stage, certains écoutent – écouter quelqu'un parler de sécurité routière est toujours utile –, d'autres plaisantent…

Nous avons envisagé, à « Conduire juste », d'organiser des stages de récupération de points, assortis d'une heure de conduite sur notre circuit, pendant laquelle nous montrerions les dangers de la route. Mais ce concept nous amenait à être plus chers de 30 % ou 40 % que la concurrence. Nous n'étions pas compétitifs ! La philosophie du client d'un stage de récupération de points, c'est d'aller au plus tôt, au moins cher et au plus près possible de chez lui pour récupérer ses points.

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